Les lumières tamisées dévoilèrent son corps de sirène qui se déhanchait derrière le rideau avant de se montrer au grand jour. Sous les spotlights. Je souris à sa vue, comme si elle ravivait l'espoir en moi. Et pourtant, elle n'était qu'une danseuse de cabaret qui me prenait probablement pour tout autre client habituel qui vient voir des filles danser en petites tenues de spectacle. Ce n'était pas cela. Pour moi, la danse de cabaret n'avait rien de pornographique comme les bars de danseuses nues. C'était une danse sensuelle et féminine, plus un art et un sport qu'une provocation. Ça, j'espérais que Kim le savait. Nous nous parlions assez fréquemment, après son boulot, à la sortie des bars. Nous marchions jusqu'à chez elle - je n'aimais pas l'idée qu'elle soit seule à cette heure, alors je la raccompagnais. Bref, je la regardai accomplir un nouveau numéro. J'applaudis à la fin et souris en la voyant s'approcher de moi. Elle s'assit à ma table. « Tu étais magnifique là-haut, Kim. C'est vraiment fait pour toi, la scène. » Lui avouais-je. Personnellement, j'étais bien trop coincé et timide pour m'adonner à quoi que ce soit qui requiert d'être sur une scène devant des centaines de personnes qui ont les yeux rivés sur vous. Je lui levais mon chapeau. « Ta famille vient-elle te voir, parfois ? » Me risquais-je à demander. Je ne connaissais pas beaucoup Kim. Que superficiellement. Je ne savais donc pas comment elle réagirait face à moi qui essayais d'entrer dans sa vie privée.

Les autres danseuses du cabaret étaient elles aussi franchement magnifiques à regarder. Toutes sensuelles et féminines. Toutefois, Kim avait un je-ne-sais-quoi. Je n'arrivais vraiment pas à mettre le doigt sur ce que c'était. Dans tous les cas, elle se démarquait des autres et elle me faisait sourire à la simple vue de son visage. Physiquement, elle représentait une sorte d'idéal féminin à mes yeux. J'avais toujours eu un faible pour les cheveux clairs. Les blondes, quoi. « Je te remercie, c'est gentil. Je suis contente de te voir là. » J'étais content de l'entendre me dire cela. C'était la première fois qu'elle me manifestait sa joie de me voir. Certes, souvent elle venait s'asseoir avec moi, mais j'avais parfois l'impression que c'était parce qu'elle se sentait obligée. Là, je compris que non. Je lui souris donc en signe de réponse, avant de lui demander si sa famille venait la voir de temps en temps. « Très franchement, il me reste que mon frère et il croit que je suis stripteaseuse, il a d'autres choses à faire plus importante certainement... » J'hochai la tête en baissant les yeux sur mon verre. « Je suis désolé ... je ... je l'ignorais. » Répondis-je concernant la mort de ses parents. J'avais encore mes deux parents, et je ne réalisais pas toujours la chance que j'avais. « C'est dommage ... pour ton frère je parle. Il ne sait pas ce qu'il manque. Tu as beaucoup de talent, ça devrait se savoir. » L'assurais-je.

Quand elle posa sa main sur la mienne, un courant électrique me traversa le corps en entier. Cette femme était fabuleuse, et le simple fait qu'elle ait ce contact physique avec moi, si minime fut-il, raviva en moi des sentiments éteints. Elle la retira toutefois bien rapidement, peut-être en voyant à quel point celle-ci m'avait animée. Je soupirai légèrement. « Ce n'est pas grave, ne t'en fais pas. » J'ignorais si c'était récent. Peut-être avait-elle grandi sans parent. Je ne voulais toutefois pas entrer dans le vif du sujet. Je ne me sentais pas assez à l'aise avec Kim pour m'improviser psychologue en sa présence. Je n'avais pas les meilleurs paroles réconfortantes à lui offrir, alors je préférai changer de sujet, parler de son frère plutôt. Lui qui était vivant. « Warren n'est pas du genre à venir, il ignore tout de moi. Pour lui, mon métier revient à être stripteaseuse, or ce n'est pas le cas, vois-tu ... » J'écoutai à peine le reste de sa confidence. À la simple énonciation du nom "Warren", je le relevai brusquement la tête vers elle et la regardai avec de grands yeux, presque apeuré. Elle était Anglaise, le Warren que je connaissais aussi. « Warren ... Warren Culligan ? » Puisque je ne connaissais pas le nom de Kim, je ne pouvais le savoir. Si elle était la soeur de Warren, celui qui m'avait frappé jusqu'à ce que je tombe inconscient, alors je devais tout de suite prendre mes jambes à mon cou et fuir. Loin d'elle.

Ce que je redoutais depuis qu'elle avait prononcé le prénom de Warren venait juste de sortir des lèvres de cette femme que j'appréciais tant. Que j'affectionnais tant. « Oui, Warren Culligan, c'est mon frère. » Un frisson me parcourut le corps au grand complet. Je baissai les yeux vers mon verre, que je bus d'un seul trait suite à cette annonce. Je le déposai nerveusement sur la table en regardant autour de moi. Depuis cette nuit où je m'étais retrouvé inconscient sur le ciment, la gueule en sang et le torse brûlé par sa cigarette, j'avais peur de Warren. J'avais voulu me montrer plus fort que lui, voilà que je payais. « Comment se fait-il que tu le connaisses ? » Ajouta-t-elle, voyant bien que j'étais agité mais que je ne lui en disais pas plus. Me voyant aussi nerveux, elle allait probablement penser que j'avais des problèmes reliés à la drogue. Des problèmes avec Warren, des problèmes de dettes. Non, du tout. Des problèmes de justice, plutôt. « Kim, je vais devoir arrêter de venir ici. Je ne peux plus venir te voir. » Lui avouais-je comme ça, sans plus d'explications. Je fis signe à un serveur que j'étais prêt à payer pour mes consommations.

Alors que je venais de lui lancer en pleine gueule que je ne pouvais plus venir la voir, que nous devions cesser de nous parler, Kim attrapa violemment ma main. Je la regardai d'un air surpris, perplexe. Évidemment, je m'imaginais bien qu'elle se poserait des questions, qu'elle voudrait avoir des explications, mais je ne m'attendais pas à ce qu'elle me retienne de cette façon. « Mais qu'est ce qui te prends Gene' ? Tu vas pas partir comme ça ! » Je regardai autour de moi encore une fois. J'avais peur de voir Warren surgir d'une seconde à l'autre. Il me faisait peut-être suivre, qui sait. Ce mec était carrément un malade. Certes, la paranoïa s'emparait sans doute de moi, mais j'avais toutes les raisons pour. « Il le faut, Kim, je suis vraiment désolé ... » Lui dis-je en la suppliant du regard de me laisser partir. Elle ne lâcherait pas le morceau aussi facilement. « Il t'a fait du mal ? Ne me mens pas s'il te plaît... » Je m'étais assis de nouveau entre temps, mais voilà que je me relevais encore. Elle me caressa le bras, plus doucement cette fois. Je soupirai d'angoisse et de déception. « Je ne peux rien te dire, Kim ... J'en ai déjà trop dit, trop montré ... » Parce que maintenant, elle savait que quelque chose s'était passé avec Warren. Elle en parlerait avec lui. Et il allait revenir me voir, me faire du mal. Comme cette nuit-là. « Je t'en prie explique moi ce qu'il se passe ... » Pourquoi ne comprenait-elle pas que son frère était bien plus dangereux qu'elle ne le pensait ? Je secouai la tête. « Pourquoi veux-tu le savoir, Kim ? Je suis qu'un client, à tes yeux. Laisse-moi partir. » Lui répondis-je sèchement.

Ma réaction au nom de son frère avait été spontanée, irréfléchie. Si j'avais su qu'elle était la soeur de Warren, j'aurais fermé ma gueule. Cependant, la surprise avait fait en sorte que j'avais paniqué devant elle. Je n'avais pu contenir ma peur et c'est pour cette raison que maintenant, Kim en savait beaucoup trop sans pourtant connaître quoi que ce soit de notre problème. « Trop montré ? Tu te moques de moi j'espère ! Tu as commencé, alors tu finis, et vite ! » Certes, j'avais commencé, mais de façon inconsciente et insouciante. Je ne pouvais pas effacer ma réaction, je ne pouvais pas retourner en arrière, mais je pouvais m'arrêter là, maintenant. Kim n'avait pas besoin de savoir toutes les horreurs que son frère m'avait fait subir quelques nuits plus tôt. Warren était la dernière personne qu'il lui restait. Si je lui avouais ses démons, elle allait lui en vouloir, et je ne voulais pas lui faire perdre sa famille. Ce qui en restait. « Arrête d'insister, Kim, c'est pas grave. » Pourtant, ça avait l'air bien grave, et je savais qu'elle n'était pas stupide. Elle ne se laisserait pas duper ainsi. Certainement pas par moi, en plus, qui venait de lui mettre sous le nez que je n'étais qu'un client alors qu'elle représentait bien plus pour moi. Elle m'emmena donc rapidement dans sa loge, où nous étions seuls. J'étais à la fois soulagé et angoissé. Soulagé parce que je ne me sentais plus observé. Angoissé parce qu'elle allait avoir ce qu'elle voulait. « Qu'un client ? C'est pour cela que tu viens me voir aussi souvent ? Parce que je ne suis qu'une danseuse parmi tant d'autres ? » Je secouai la tête. « Ce n'est pas ce que je voulais dire et tu le sais ... » Elle croisa les bras et baissa les yeux. J'aurais tellement aimé me confier à elle. Lui montrer mes blessures. Qu'elle me soigne, physiquement et psychologiquement. Qu'elle m'aime. « Je ne te laisserai pas partir sans réponse, crois moi ... » Je soupirai en m'éloignant d'elle, allant m'asseoir sur le rebord du comptoir où se dressait un grand miroir entouré de lumières rondes. « J'ai quelques problèmes avec ton frère, c'est tout. Je ne veux pas te mêler à ça. » Lui avouais-je, espérant que ça suffirait.

J'avais l'air de tout sauf d'un drogué. Timide, attentionné, droit. J'étais tellement sûr de mes opinions et de mes principes. J'étais donc loin d'être influençable. Tomber dans l'enfer de la drogue était inconcevable dans ma tête. Je n'étais pas assez faible pour m'abandonner à ce genre de paradis artificiels. Kim le savait aussi, rien qu'à me regarder aller dans la vie de tous les jours. D'autant plus qu'elle côtoyait Warren ; elle savait de quoi elle parlait. « Je vais continuer d'insister Gene', je ne te laisserais pas partir sans que tu ne m'expliques la situation. » Ça, je l'avais bien compris. Je ne capitulais pas tout de suite, toutefois je laissai tomber mon envie de m'en aller, de la fuir. Kim ne me laisserait pas quitter cette pièce, de toute façon. Je soupirai, encore une fois. Essayant de la satisfaire par quelques explications, je lui lâchai simplement que j'avais quelques problèmes avec son frère, que je ne voulais pas la mêler à tout ça. Ça ne la regardait pas. « Quelques problèmes ? Développes ! » Dit-elle d'un ton doux. Je savais qu'elle ne voulait que mon bien, mais lui avouer ce que Warren m'avait fait ne lui amènerait rien de bon. Je voulais la protéger, parce que je l'appréciais beaucoup plus qu'elle ne pouvait se l'imaginer. Voyant que je n'en dirais pas plus, elle continua : « Je ne suis pas comme lui, il faut me le dire s'il t'a fait du mal ... » Je relevai les yeux vers elle et au même moment, elle glissa sa main le long de mon bras. Je grimaçai de douleur. Je portais un chandail gris à manches longues pour cacher toutes les ecchymoses que Warren avait laissées sur ma peau. Mes bras en étaient parsemés, mais mon ventre encore plus. Ce dernier était mauve en entier et des brûlures se démarquaient de la couleur. « Arhhg ... » Grognais-je entre mes dents, à cause de la souffrance. Maintenant, plus moyen de m'en sortir. Elle allait tout voir. Tout comprendre.

En voyant mes grimaces, Kim commença à son tour à angoisser. Elle passa nerveusement une main dans ses cheveux, puis releva la manche de mon chandail même si j'avais essayé de me déprendre de son emprise. Elle avait été plus rapide que moi. C'est ainsi qu'elle découvrait les ecchymoses qui coloraient mon bras. Je baissai les yeux, ne voulant pas affronter le regard de la blondinette. « Montre moi le reste Gene' ! » Je relevai un regard surpris sur Kim. Je n'allais certainement pas lui montrer le reste. Je me sentais déjà assez vulnérable. « Déshabille toi immédiatement, dépèche toi, ne me fais pas répéter. » Je soupirai en me relevant. « Si c'est ce que tu veux ... » Je m'éloignai un peu d'elle, me tournant de dos à elle. Je retirai mon chandail gris. Mon dos n'avait reçu aucun coup, il n'avait eu comme choc que le moment où je m'étais écroulé sur le ciment, inconscient. Le moment où Warren m'avait laissé seul sous la pluie, inerte. Je pris une grande inspiration et me tournai de face à Kim, lui révélant ma pire blessure : mon ventre bleu et mauve, et mon torse couvert de brûlures de cigarette. Je ne voulais même pas la regarder dans les yeux. Je me sentais si faible. Je m'étais fait battre par un homme. Son frère en plus. Comment pouvais-je alors espérer qu'elle me verrait un jour autrement que comme un être faible ? Elle aurait pitié de moi, voilà tout. Je n'avais plus rien à perdre ; je n'aurais jamais rien venant d'elle. « Tu ne peux rien dire à Warren, Kim. Rien, c'est compris ? » Dis-je en la regardant d'un regard dur, sévère. « Sinon il me tuera. » Ma voix se cassa. Je repris rapidement le contrôle sur moi-même. Je n'allais pas me montrer encore plus faible.

Le regard de Kim détailla chaque blessure ornant mon corps meurtri. Meurtri par les mains de son frère. Comment un être aussi méchant pouvait-il avoir comme soeur un tel ange ? La blondinette était la bonté incarnée. Elle m'inspirait tellement de confiance, de gentillesse. C'est pour cette raison que j'avais tellement hésité à lui montrer l'oeuvre de son frère. Parce que ça la blesserait. La famille, c'est l'amour inconditionnel. Alors d'apprendre que son frère pouvait agir comme un homme sans coeur devait être difficile pour elle. Je le savais. « Je ne lui en parlerai pas, je t'en fais la promesse ... » M'assura-t-elle. J'hochai la tête en soupirant de soulagement. « Merci ... » J'espérais pouvoir lui faire totalement confiance. Après tout, Warren était son frère. J'imaginais bien qu'elle aurait envie de lui en parler, de le confronter à ce sujet. Je ne le voulais toutefois pas, et je pense qu'elle comprenait l'enjeu que cela représentait. Elle me mettrait en danger. Je doutais fortement que c'était ce qu'elle désirait. Kim s'approcha finalement de moi, posant ses mains délicatement sur mon torse blessé. Je fermai les yeux à ce contact si doux. Si bon. « Je suis tellement désolée ... » Souffla-t-elle. J'ouvris les yeux de nouveau alors que ses mains entouraient ma nuque et qu'elle m'enlaçait. Je plongeai mon regard dans le sien après m'être éloigné un peu. L'une de mes mains était venue se poser sur sa joue, l'autre contre sa hanche. J'approchai doucement mon visage, posant mon front sur le sien. J'avais envie de l'embrasser depuis tellement longtemps, et maintenant cette proximité faisait redoubler d'ardeur cette envie. Nos nez s'effleuraient. Nos lèvres s'attiraient comme des aimants, nos souffles s'emmêlant l'un dans l'autre. « Je ferais mieux de partir ... avant d'aggraver la situation ... » L'embrasser aurait été irresponsable. Je ne voulais pas jeter de l'huile sur le feu. Si Warren savait ce que j'éprouvais pour sa soeur, j'étais pire que mort. Je m'éloignai donc de Kim, la tristesse se lisant dans mes yeux.

Un frisson me parcouru à moi aussi le corps en entier quand je sentis le contact de la peau de Kim sur la mienne. Je sentais son coeur battre plus fort que la normal, et de savoir qu'elle était tout aussi enflammée que moi me donnait un peu d'espoir. Espoir que je devais tout de suite étouffer, pour ne pas me faire encore plus de mal. Avant de commettre une bêtise, je m'écartai de Kim, la laissant en retrait alors que je rattrapais mon chandail. Avant de ne l'avoir remis, je me tournai vers la jeune femme, qui m'attrapa délicatement le bras, cette fois. Elle m'attira contre elle, ce qui me fit perdre tout mon contrôle. Je fermai les yeux en sentant son parfum de si près. « Ne pars pas, ne me laisse pas toute seule ... » Me chuchota-t-elle. Mon corps en entier la désirait. Je voulais lui faire l'amour, l'embrasser toute la nuit, la couvrir de mes sentiments. Je fermai les yeux lorsqu'elle m'embrassa sur la joue. Ce n'était pas assez, j'en voulais plus. Je caressai sa joue de ma main, une nouvelle fois. Mon pouce glissa le long de son visage. Il fallait que je me retienne. Que je me contrôle. Il faisait de plus en plus chaud et je savais que c'était Kim qui me faisait cet effet. C'était mal. « J'ai envie de toi Kim ... » Murmurais-je en passant une main dans ses cheveux, les yeux toujours clos. Puis je les rouvris. « Mais il faut que je parte. Si ton frère apprenait ce que ... ce que je ressens pour toi ... s'il apprenait tout ça je ... » Je baissai les yeux en reculant de nouveau. « Je n'ai pas seulement peur de ce qu'il me ferait à moi, mais aussi de ce qu'il pourrait te faire à toi ... » Lui avouais-je avec peine.

Je comprenais maintenant que Kim avait elle aussi envie de moi. Ses sentiments n'étaient certainement pas aussi forts que les miens, mais ils étaient là. Il y avait bien un début à tout. C'était juste tellement dommage et triste qu'elle se rende compte qu'elle tenait à moi que maintenant. Maintenant que je ne pouvais plus compter pour elle. Maintenant qu'elle ne pouvait plus compter pour moi. C'était trop dangereux. J'avais si souvent rêvé d'elle, rêvé de ce moment où je pourrais découvrir chaque parcelle de son corps. Ce moment venu, il fallait que je recule, pour notre bien à tous les deux. « Je m'en fiche de ce qu'il pense tu sais, il ne me fera rien, et il ne te touchera plus sois en certain, je m'en assurerais ... » Je secouai la tête. « Tu ne peux rien faire, Kim. Tu ne dois rien faire. Cela ne ferait qu'empirer toute cette situation ... » Dis-je en reculant encore un peu. Je ne voulais pas qu'elle sous-entende quoi que ce soit auprès de Warren. Il n'était pas dupe, il comprendrait d'où venait sa source. Cela le conduirait jusqu'à moi. Jusqu'à ma mort. Mais Kim ne lâcha pas le morceau encore une fois, et elle s'approcha de moi, posant ma main sur son coeur qui battait si fort pour moi. J'esquissai un sourire. « Tu sens ? Alors ne pars pas s'il te plaît ... » Je la regardai un moment. Je réfléchis. Qui le saurait ? Nous étions seuls ici. Si nous faisions attention, personne n'avait à le savoir. Je passai donc une main autour de sa taille, laissant ma paume se déposer contre son dos. Je posai mon autre main dans son cou, que j'approchai de moi afin d'enfin déposer mes lèvres sur les siennes. D'abord de furtifs baisers, ceux-ci se transformèrent en une cascade de baisers langoureux et incontrôlables. Ma respiration se faisait de plus saccadée alors que ma main descendait plus bas dans son dos. J'avais envie d'elle. Mon corps brûlait pour elle. Mon entre-jambe la désirait plus que tout. Je me détachai de ses lèvres pour aller couvrir son cou des miennes.

Rendu là, je m'en fichais. Le mal était fait. Que j'arrête là ou que j'aille jusqu'au bout, cela ne changerait rien dans la réaction de Warren. Alors aussi bien en profiter pendant que j'en avais encore l'occasion, et le temps. Je m'abandonnai donc complètement à Kim, oubliant mes blessures - pour le moment - alors que je l'embrassais passionnément. Tous ces mois à l'observer à distance en valaient enfin la peine. Je pouvais toucher sa peau du bout de mes doigts. Goûter le goût sucré de ses lèvres. Elle avait envie de moi. Je ne l'aurais jamais imaginé autre part que dans mes rêves. Et ce soir, elle était là, à couvrir mon torse meurtri de baisers. Mes mains caressèrent ses cheveux alors que ses lèvres se frayaient des chemins entre mes brûlures. Tout mon corps semblait s'apaiser, lui qui avait été si tendu ces derniers jours. Je souriais de bonheur, avant de m'emparer de ses lèvres de nouveau. Je la pris finalement sous les fesses et la soulevai le temps d'aller l'asseoir sur le comptoir du miroir, ses jambes autour de ma taille. Alors que la température montait dangereusement entre nous, je tournai la tête vers la porte. « Et si quelqu'un rentrait ? » Demandais-je. N'importe qui. Peu importe si c'était en lien avec Warren ou pas, je ne voulais pas que Kim ait d'ennuis. Elle était au boulot, après tout.

J'espérais seulement que pour Kim, ce n'était pas qu'un instant éphémère de folie. Un abandon aux plaisirs les plus insensés. Une page à écrire entre quatre coups de reins pour ensuite la tourner tout aussi vite. Ce n'était pas qu'une baise pour moi. C'était le résultat de semaines et de semaines d'attente, attente où fantasmes envers cette blondinette furent omniprésents dans ma tête et au creux de ma main droite. Je ne voulais toutefois pas l'arrêter pour le lui dire. De peur de gâcher le moment. De peur de ne pouvoir y goûter de nouveau par la suite. Je me disais alors "c'est toujours mieux que rien" mais au fond de moi, je savais que si pour elle, ça ne voulait rien dire, alors pour moi, rien aurait été préférable. Bref, la concentration dérangée par toutes mes inquiétudes, je me tournai finalement vers la porte qui était source trouble depuis le début de notre petite aventure. « Ne t'en fais pas... » Me murmura-t-elle à l'oreille. Je ne m'en fis donc pas et continuai à l'embrasser. Après un moment toutefois, je m'arrêtai de nouveau et regardai la porte de nouveau. « Attends ... désolé, ça me dérange vraiment. » Je me défis donc de l'emprise physique et psychologique qu'elle exerçait sur moi et je me rendis jusqu'à la porte pour la verrouiller. Je retournai finalement doucement vers Kim, avec un mince sourire. « Là c'est mieux ... » Et je l'embrassai fougueusement, lui retirant son chandail et son soutien-gorge, laissant mes mains caresser ses seins, puis ma bouche et ma langue.