La sombre capitale britannique, une vingtaine d'année auparavant. Dans une tumulte de fumée, d’énervement et de cris, les cris d'un nouveau-né se font entendre dans l’Hôpital St Ursule. Enfant fortement désiré, il fait la joie et la fierté des jeunes parents. Ses iris sont extrêmement clairs, à tel point qu'il est difficile de définir la véritable couleur de ses derniers. Qu'importe. Leur enfant aurait pu naître borgne, cela n'aurait rien changé. Mari et Lewis n'ont jamais ressenti un tel sentiment, le bonheur s'est installé dans leur cœur et ils ne sont pas près à le lâcher. Ils veillent ensemble sur leur enfant alors endormi, les idées plein la tête quant' à son avenir.
Avocat. Médecin. Homme d'affaire. L'enfant aurait un futur radieux, ils en sont sûrs.
Seulement, les projets remplis de promesses des Steathford finiront par n'être que de simples illusions. Alors que leur fils, Emrys est âgé de deux ans, Mr Steahford perd toutes sa fortunes à cause d'un bien mauvais investissement. La famille ne parvint pas à se relever de cette crise et prend une décision très hâtivement ; ils quittent Londres avant la naissance de leur second enfant pour se rendre dans un petit village sûrement inconnu sur toutes les cartes. Les citadins se retrouvent à jouer les campagnards, comique me diriez-vous, mais pas totalement stupide.
Reparti à zéro, Mr Steahford gravit les échelons sans problème dans ce coin paumé, il arrive à devenir la personne la plus importante du village. Même lui n'arrive pas à y croire, jamais il n'aurait cru qu'il gagnerait le pactole en se la jouant fermier.
La famille déménage de temps en temps en fonction des revenus des Steahford et des besoins du paternel, mais reviennent pratiquement toujours dans le village qui à fait leur fortune. Si bien qu'Emrys le considérera comme son lieu natal. A bas Londres et ce qu'il représente. La maison familiale devient un repère pour lui, il est persuadé que jamais elle ne changera et il a raison. Il verra sa chambre gagner en rangement et sa collection de jouer doublera de volume au fils des ans. Le jeune garçon ne s'en plaindra pas.

Vie aisé pour le garçon, Emrys ne manque de rien. Pourtant, il ignore pourquoi mais un feu brûle en lui et le consume doucement de l'intérieur. Une envie de tout renverser, de tout saccager. Il ne supporte pas cette petite sœur si envahissante et son côté 'petite princesse'. Il souffre de l'absence continuelle de son père. Sa mère s'occupe bien de lui, là n'est pas le problème, il lui manque simplement cette figure masculine avec qui jouer le week-end et de qui apprendre la vie comme un homme. Ses parents lui avaient expliqué : si tu aimes ta vie, c'est le prix a payer pour la mener. Il aurait voulu balancer leur fortune au feu. Une vie aisée mais un père absent. Mari avait beau avoir accepté pour le bonheur de ses enfants, mais quelques billets verts peuvent-ils remplacer l'absence d'une figure paternelle ? Non, et Emrys souffre de ne pas pouvoir profiter de cet homme qui lui a donné la vie.
Le jeune garçon ne sait comment se faire remarquer de son père. Tous les compliments ne vont qu'à la petite sœur. Après, tout Laërte est adorable. Même Emrys vient à regretter la période où il n'était qu'enfant unique et où ses parents ne gagnaient pas un sous. Le jeune garçon sombre peu à peu. Mais là encore, personne n'y fait guère attention ''Le mauvais âge'' entendra-t-il. Le mauvais âge qui perdure un peu trop longtemps.

A l'âge de dix ans, il laisse exploser la rage qu'il a en lui. Ses mauvais démons prennent le dessus et il ne cherche pas à les maîtriser. Emrys se fait violent. Chacun de ses membres lui fait mal. L'agréable chaleur du confort familiale gagne en intensité mais aussi en amertume. Insupportable. Brûlant. Les flammes se répandent de part et d'autres. Tout s'embrase en lui. Il ne peut plus la contenir. Sa souffrance est bien réelle, et prend beaucoup trop de place. Il ne peut faire l'impasse dessus. Cette dernière ne demande qu'à sortir ; soit, Emrys s'exécute. Premier coup d'éclat et première satisfaction. Il a cogné un gamin qui lui a volé ses billes. Attitude bien immature, mais qu'importe, il n'est qu'un gosse après tout. Laërte cesse d'être le centre d'attention ''la princesse peut aller se coucher'', et son père le regarde enfin. Il se fiche des punitions et des serments, il n'est plus invisible.
Il n'en finit pas, en redemande toujours. Il vint à jouer des caïds avec d'autres lorsqu'il est au collège. Son mal être se fait ressentir par son style vestimentaire. Emrys affiche désormais une jolie teinte dorée. Tout de cuir, tel est son code. Il en vient même à se coller un pansement sur la joue pour renforcer son image de mauvais garçon, toujours en quête de duel et de nouvelle sensation. Dépassés, ses parents ignorent comment recadrer leur enfant. Ils tentent le sport et espère qu'à force de s'épuiser physiquement son besoin de violence s'effacera. Raté. A force de se dépenser, Emrys devient plus fort, plus endurant, et profite de sa nouvelle force pour en faire baver d'autre.
Mais finalement, soutenus par le directeur de l'école, les Steahford incitent leur enfant à pratiquer une activité qui lui permettrait de retranscrire le mal être qu'il éprouve, et cette fois sans aucune chance de retour boomerang. Lorsque ses parents l'amènent à son premier cours d'Arts Plastiques, l'enfant rigole. Un rebelle dans son genre dans un tel domaine? Il fut le premier surpris. Très vite, le dessin prend une place cruciale dans sa vie. Son professeur y joue certainement pour quelque chose mais qu'importe. Emrys ne joue plus, il a cessé d'être quelqu'un qu'il n'était pas. Pour la première fois depuis bien longtemps, l'adolescent se sent serein. Pour la première fois, il arrive à faire taire le feu qui est en lui et parvient à s'ouvrir à sa sœur, Laërte. Sa vie change du tout au tout. Sa vie lui plaît.

Rapidement, Emrys délaisse les études. Il a trouvé sa vocation, à quoi bon continuer les maths et l'histoire ? Il peint constamment, allant de la nature morte au portrait. Ironie du sort, son modèle préféré est Laërte. Elle qu'il a tant détesté pour être le centre du monde devient son exemple à lui, sa bouffée d'air. La relation entre les deux êtres s'améliorent de jour en jour. Ils se complètent : lui, le colérique et lunatique, elle, la passive et franche. Elle n'y va pas de mains mortes brusquant l'adolescent. Elle parvint à l'épingler sans mal. Ça tombe bien, il a besoin d'être recadré par moment. Leur entente est difficilement imaginable pour les personnes les ayant connus enfants. Ils font plaisir à voir ensemble.

Emrys n'a jamais été aussi épanoui de sa vie. Alors qu'il recherche une université près de chez lui, on lui propose un voyage tout frai payer vers le bout du monde, son travail est apprécié et plusieurs université le veulent. Lui, le gamin des rues. Il en rit presque. Sans vraiment réfléchir, il en choisit une. Du jour au lendemain il quitte sa petite vie tranquille de campagnard et prend le premier avion vers Montsimpa. Il ne connaît pas la ville, ne sait pas dans quoi il s'embarque, mais y va avec de l'espoir. Il a quitté sa famille, ses amis. A peur de se perdre dans ce nouveau monde, mais fait mine de tout contrôler en gardant la tête haute.