Aspen venait de déposer JJ, le fils ainé d'Eliott, à l'école et les deux petits derniers, Aileen et Shane, à la garderie. Elle n'avait plus qu'à rentrer et profiter des quelques heures libres qu'elle avait devant elle. Etant encore petits, ceux-ci n'avaient pas un emploi du temps très chargé, et dans deux heures déjà, la jeune femme devrait venir les remmener à la maison. En attendant, la jolie blonde prévoyait de prendre un peu de temps pour elle, en flânant dans les rues. Elle entra dans une parfumerie, ce qui lui chatouilla aussitôt les narines, essaya plusieurs flacons, en acheta un avec le salaire de la veille, puis en ressortit. Elle était dans la rue marchande et tous les bons magasins se trouvaient là. La demoiselle fit quelques emplettes puis, ravie de ses nouveaux achats, consulta sa montre. Il ne lui restait plus qu'une heure. Elle se promit de rentrer aussitôt à la maison pour manger quelque chose avant de retourner chercher les monstres. Sur le chemin, elle enfonça son iPod dans ses oreilles, toute guillerette. Sa joie de vivre soudaine lui fut arrachée lorsque les premières gouttes de pluie frolèrent son adorable petit nez. Aspen ronchonna et rangea ses écouteurs. Elle pressa le pas, agacée. La pluie se faisait de plus en plus dense et bientôt elle dut plisser les yeux pour arriver à y voir quelque chose. Zut, sa coupe était fichue. La jeune femme entra dans le premier bar qu'elle croisa, Chez Hogan, et courut se mettre à l'abri. Elle alla dans un premier temps aux toilettes, se lava les mains, remit du rouge à lèvre face à la glace puis passa sa tête sous le séchoir automatique pour déshumidifier ses cheveux trempés. Après s'être refait une beauté, la blonde sortit de cet espace clos puis s'assit au bar. Elle contempla la rue à travers la baie vitrée, désemparée. Un homme était assis à côté d'elle. Aspen attendit que le barman vienne chercher sa commande, alors elle jeta un oeil à l'écran. « C'est quoi le score ? » hasarda-t-elle à l'inconnu, sans gêne. « C'est 26 - 21 pour les Saints. C'est très serré. » Il lui avait répondu du tac-au-tac. Surprise, elle le remercia en un hochement de tête plutôt bref. « Fan de football ? » Elle sourit. « Oh non, j'entends suffisamment le boss en parler à la maison, m'enfin. » lui répond-t-elle en fronçant les sourcils. Elle ajoute « On fait ce qu'on peut, quoi. » en haussant les épaules, le regard rivé vers la pluie qui martelait les vitres.

Quel temps pourri. Aspen se dit qu'elle aurait mieux fait d'appeler une copine et de se poser dans un café en prévision du sale temps. C'était pas sa faute, elle n'avait jamais le temps pour regarder le journal télévisé ou la météo, que ce soit le midi ou le soir. Et après voilà, elle avait une longueur de retard sur tout le monde. « Je suis bien d'accord. » Aspen se mordit la lèvre inférieure. Le silence faisait rage, et enfin le serveur accosta la jolie blonde qui tourna son regard vers lui. Il lui demanda ce qu'elle souhaitait, Aspen commanda un Monaco. Il fallait bien se réconforter de cette journée gâchée. Cinq minutes passent, et toujours la pluie est là. Aspen pensait que l'inconnu aurait préféré en rester là, mais il lui parla à nouveau. « Pour ma part, je n'ai jamais été un grand fan non plus. En Angleterre, le football américain n'est pas le sport le plus regardé. Je connais davantage le soccer ou le cricket. » Amusée, elle tourna sa tête vers lui. Anglais, alors ? Comme elle, tiens. Elle aurait du le deviner, les anglais ne passaient jamais inaperçus. Après réflexion, c'était évident. Sa gestuelle, sa façon de parler sur un ton retenu mais sûr de lui ; c'était bien un anglais. Definitely. « C'est drôle, je suis anglaise aussi. » Son léger accent la trahissait de toute façon. Les anglais avaient toujours ce truc en plus qui faisaient qu'ils étaient uniques. Dans la famille d'Aspen, les gens venaient de partout et d'ailleurs. Pour sa part, elle était non seulement anglaise, mais aussi slovaque et allemande. Elle était d'ailleurs très fière de ses origines variées. « Ça fait plaisir de voir un anglais ici. Même si à Montsimpa, ça ne manque pas. » Elle lui sourit un peu. « Je viens de Bristol, et vous ? » Il semblait un peu plus âgé, elle le vouvoya donc. Les anglais avaient la conversation facile, alors parler un peu de leurs origines communes était un bon moyen de passer le temps en attendant que cette pluie interminable veuille bien disparaitre.

Aspen se mit à siroter sa boisson en silence et remercia à voix basse le serveur, qui était, il fallait le dire, plutôt pas mal. Elle sortit un billet de son porte-feuille ; il y avait bien plus que ce que la facture annonçait. « Vous pouvez garder la monnaie. » Glissa-t-elle au serveur avant de tourner à nouveau son attention vers le jeune homme avec qui elle conversait depuis tout à l'heure. « C'est vrai que ça fait plaisir. Je viens de Londres, mais je vivais à Bristol deux mois par année, l'été. J'avais un job là-bas pendant mes vacances. » Elle lui sourit pour toute réponse. C'est là qu'elle se souvint alors qu'elle ne connaissait toujours pas son prénom. Et lui non plus d'ailleurs. « Intéressant. » se décida-t-elle enfin à dire. Elle n'eut pas le besoin de se présenter puisque son interlocuteur lui demandait déjà son prénom. Visiblement ils étaient connectés psychologiquement. « Comment vous appelez-vous, si je peux me le permettre ? » « Moi c'est Aspen-Chloé. Mais vous pouvez m'appeller juste Aspen. » Elle remit une mèche de cheveux en place derrière son oreille. Elle était toujours un peu gênée lorsqu'elle disait son prénom car il était peu commun et on s'était souvent moqué d'elle à ce sujet. Oh, Aspen comme la station de ski ? Et ma main dans ta gueule, connard ! avait souvent alors répliqué la jolie blonde piquée au vif. Pour sa part, son prénom elle l'aimait beaucoup ; les gens ne savaient juste pas apprécier l'originalité à sa juste valeur selon elle. C'était si simple d'appeler son gosse Lucy ou Mary, puisque tout le monde s'appelait comme ça ils ne craignaient rien. Mais Aspen se demandait comment il était possible de se sentir unique si tous ses voisins avaient le même prénom. Bref, quoi qu'il en soit la conversation était aux présentations et pas aux débats sur les prénoms. « Et vous ? » Attentive, elle attendit sa réponse tout en essayant de deviner comment ce charmant jeune homme s'appelait.