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Les gens pensent souvent que l’un des jumeaux est meilleur que l’autre. L’un est forcément plus populaire, plus beau, plus intelligent. Bref, qu’il y en ait un plus parfait que l’autre. Sincèrement, je ne sais pas qui a pu sortir un truc pareil. Il faut être stupide pour croire une chose pareille. L’un des jumeaux n’est pas la pâle copie de l’autre et ne se fâche pas dans son coin en attendant que quelque chose de bien se produise pour lui. C’est tout simplement faux. Les gens qui tentent de comprendre ou de savoir qui, entre ma sœur et moi, est la meilleure n’ont tout simplement rien compris. Depuis le début, Noheyla et moi avons toujours été des jumelles complémentaires et fusionnelles. Nous sommes différentes, mais on se comprend tellement. Personne n’a jamais tenté de nous séparer. Enfin, s’ils ont essayé, ils n’ont pas dû réussir puisque nous avons grandi et vécu ensemble depuis notre enfance. Neyhla et moi, on forme une paire, on est un duo. Nous avons partagé tellement plus que le ventre de notre mère. Nous nous sommes soutenues mutuellement lorsque nos parents sont décédés. Les gens portaient un regard différent sur nous à cet instant. «Pauvres enfants, que vont-ils devenir ?» C’était la phrase que nous entendions régulièrement, jusqu’à temps que l’on nous trouve une famille d’accueil compétente. Peu de famille adoptait deux enfants à la fois, surtout deux sœurs jumelles. La famille dans laquelle nous sommes tombées était si différente de la notre. Aller à la messe tous les dimanches, sérieusement, c’était pas du tout mon truc. Porter une robe rose en forme ballon pour y aller non plus. Nos parents adoptifs étaient beaucoup trop pur, trop catholique. Dès que nous sommes tombées dans l’adolescence, je crois qu’ils s’en sont voulus, qu’ils auraient préférés tomber sur d’autres jumelles beaucoup plus faciles à vivre.

Ma sœur et moi étions identiques physiquement avant notre adolescence. Il était si facile de nous mélanger. On peut encore le faire aujourd’hui, mais nos styles restent tout de même différents. J’ai toujours préféré les chandails grunge et les converses avant de m’envoler pour l’Angleterre. Ma sœur a découvert la féminité avant moi, évidemment. Notre famille d’accueil détestait la voir sortir avec sa mini jupe et son décolleté. Elle le faisait souvent pour les enrager, c’était si drôle. Ma passion, c’était les jeux vidéos. Bon dieu que j’adorais ça. Je pouvais passer une journée complète devant l’écran pour compléter un niveau. J’étais une accro, si on veut. C’est en une journée complètement banale que nous les avons rencontrés. Isaac et Ezra, deux jumeaux comme nous, qui avait eu une enfance aussi difficile que nous. C’était d’une évidence que nous allions nous entendre, beaucoup trop évident même. Les gens devaient trouver ça complètement bizarre, deux voir deux couples de jumeaux traîner ensemble. C’était pas très courant. Isaac et moi, on se ressemblait quand même. Niveau jeux vidéos en tout cas, c’était indéniable. Isaac et moi, on était différent mais nous nous complétions. Surtout niveau jeux vidéos. Ce qui devait arriver arriva, le rapprochement entre Isaac et moi ce fit naturellement. Malgré tout, ma sœur et moi avions eu de la difficulté à leur faire confiance au tout début. C’est de là qu’est venu notre plan diabolique d’échanger de place à la soirée d’Halloween. C’était désastreux, mais hilarant. Qui aurait pu croire que j’aurais ma première fois avec le partenaire de ma sœur jumelle ? D’un commun accord, nous avions décidé de ne pas en parler… mais ils ont fini par le savoir, bien sûr. Il fallait bien le dire, ce ne fut pas le dernier plan foireux que ma sœur et moi avions fait contre eux.

«Je savais que je te batterais sur ce coup !» «Qu’est-ce que tu racontes, t’as eu d’la chance, c’est tout.» Les soirées jeux vidéos avec Isaac étaient toujours parfaites. Je gagnais souvent, même s’il ne voulait pas l’admettre. Je crois que j’ai toujours été plus forte que lui, enfin... Passons. On s’entendait bien lui et moi, d’une manière ou d’une autre, on était pratiquement tout le temps ensemble. J’étais une vraie geek, tout comme lui pouvait l’être. Entre lui et moi, ça pouvait être le jour et la nuit. Il fallait toujours qu’une bombe explose entre nous, c’était fort, puissant. On avait une drôle de relation, personne ne pouvait vraiment comprendre sauf nous. Malgré tout, on était bien ensemble, dans notre monde à nous. «Vous êtes dingues, je n’partirai pas pour l’Angleterre !» «Toi et ta sœur partez demain à la première heure. Pas de discussion.» L’horreur. Notre famille d’accueil détestait Isaac & Ezra, mais de là à nous envoyer vivre en Angleterre, non mais c’était du délire. Isaac et moi avons passé deux années extrêmement difficile. À mon arrivé en Angleterre, je détonais. Personne ne me ressemblait, c’était atroce. J’ai finalement changé petit à petit, tout en gardant mon éternel look décalé. J’étais plus classe. Ce changement radical s’était produit sans que je ne m’y attende. Je n’en avais pas parler à Isaac, du moins, je ne croyais pas nécessaire de le faire. Nous discutions tous les jours à partir de Skype. Geek oblige. C’était dur, mais nous avions réussis.

Je devais le faire, cet énième test. J’avais changé, j’avais peur pour notre relation. La geek en moi était pratiquement disparue, mes études en médecine ayant pris pratiquement toute la place dans ma vie, en même temps que les sorties avec mes amies. Isaac, lui, restait toujours avec ses jeux vidéos. C’était ainsi. « C'est ta console ou moi. » « Bonne blague raconte m'en une autre ! » « Je déconne pas Weaver, soit elle, soit moi mais pas les deux. » Après ces dernières paroles, j’étais partie. Comme ça, sans rien dire. C’était ça le test. J’étais revenu le voir, après une soirée que j’avais eu avec des amis. Le voir avec une autre fille, c’était dégueulasse. Il n’avait même pas pu me donner une explication, il ne se souvenait de rien. «C’est fini Weaver.» Les derniers mots que j’avais prononcé avant de partir de l’appartement. Si je l’aime ? Toujours. Folle amoureuse de lui même. Stupide, je sais. Je me bourre le crâne dans les études, en essayant de passer à autres choses. C’est un peu difficile puisqu’il est dans pratiquement la totalité de mes cours. Qu’est-ce que vous voulez que j’vous dise ? C’est nul, mais pour le moment, c’est comme ça. On verra ce que l’avenir nous donnera.