« Jaime Lake River-Field, voulez-vous prendre pour épouse Olympe Fairmont ? » Son nom de famille ne me fit même pas tilt. Je n’hésitai pas un seul instant, et après l’avoir passionnément contemplé, je me tournai enfin vers le curé déguisé en un vieil Elvis Presley. « Oh ouiiii je le veux !!! » Nous nous avancèrent alors pour nous embrasser. Vous savez, ce baiser, qui scelle la cérémonie et qui vous fait obtenir officiellement ce statut marital. J’étais en jean basket, elle en short. Rien ne nous avait paru déplacé. Nous avions simplement voulu nous marier et ne pas attendre une minute de plus. A peine la cérémonie terminée qu’elle sautait dans mes bras. Les deux trois spectateurs applaudissaient et hurlaient aux heureux mariés, tandis que je me ruais sur mon téléphone. Une touche et voilà que le nom d’Abigaël s’affichait en gras sur l’écran. Deux sonneries suffirent pour entendre sa voix aigüe dans le combiné. « Abbie ? C’est Jai. Bon écoute j’ai plus de crédit. J’appelle juste pour te dire que je viens à l’instant de me marier. […] ouaiis t’as bien entendu. Ne dis rien pour le moment à Papa-maman. Je veux leur dire en personne et la présenter à la famille, donc tu fermes ta bouche. […] Ya pas de mais ! J’ai dit tu l’ouvres pas. Donc voilà, maintenant t’as une sœur ! T’es contente ? » Ma discussion divaguait ensuite sur l’achat des Louboutins de ma petite sœur. Rien de très cultivé. Bref. Je tirai par le bras mon épouse et nous prenions la direction de ma chambre d’hôtel. J’étais vraiment gaie. Elle aussi, malgré qu’elle m’avait dit qu’elle tenait très bien l’alcool. Une fois dans l’antre elle me poussa sur le lit, commençant à se déshabiller. Le seul fait d’avoir touché le lit douillé m’emporta dans un profond sommeil. Le lendemain je ne vous parle même pas de cette méchante gueule de bois qui me plongea dans la réalité. Une alliance à l’annuaire, une jeune femme étalée sur mon torse nu. Eh merde.

Je marchais à pas lent jusqu’à chez elle, tandis que je me remémorai le peu de souvenir de ce jour qu'il me restait dans l'esprit ; L'alcool avait tout épongé. Rue du trèfle m’avait elle dit par texto ; non loin de la mienne. Cependant je lui avais bien mentionné que je ne voulais pas me pointer à son palier. Le deal étant qu’elle me retrouve à l’entrée de son allée. "Habilles-toi bien !" lui avais-je supplié. Moi-même vêtu d’un costume cravate –très peu courant-, une clope accroché à mes lèvres –ça c’était tout de même plus normal-. Mon pied claquait nerveusement contre le bitume tandis que mon portable vibrait. Message d’Abbie. "Maman a préparé un buffet de fou. Elle a intérêt à gérer ta chérie". Dose supplémentaire de nerf. Mon billet d’avion en main, je m’insultai par la pensée. Pourquoi avais-je appelé ma sœur ce soir-là… un appel qui aurait pu m’éviter un tel mensonge, une perte de temps et surtout m’aurais dispensé de claquer mille cinq cent balles pour un aller-retour Montsimpa, Sydney. Avec une inconnue du nom d’Olympe. Pas que sa compagnie était désagréable, cependant la situation l’était. Je ne me souvenais plus de rien. Je ne savais même pas ce qui avait pu se passer avec elle, au-delà du mariage. Joie incommensurable. Je respirai une grande taffe pour déstresser et la vit non loin s’approchait. Pas trop tôt. Ce n’était pas comme si on allait rater l’avion…