When you're trying to run faster than ever ...

Je rentrais dans la maison en claquant la grande porte en verre, les yeux gorgés de peur, de haine et de tristesse qui ne demandaient qu'une chose : exploser. Seulement, je ne le faisais pas pour une seule et simple raison, je ne l'avais jamais fait, je n'avais jamais pleuré et ce n'était pas demain la veille que ça allait commencer. Je me rappelais soudain de cette phrase que ma mère me disait toujours étant petit ...

« Non Nia', ne peur pas ! Les garçons ça ne pleur pas ... »

Je me tapotais le visage avec les mains avec plus de violence que de délicatesse et réfléchi un instant à ce que j'allais pouvoir faire pour oublier ces horribles minutes qui s'étaient écoulées à l'hopital. Je jetais un oeuil par la fenêtre, sortais dans le jardin et tombant nez à nez avec la picine, sans réfléchir, je vidais mes poches au sol, laissant tomber portable, portefeuille et clefs et me laissait tomber dans la piscine. Je nageais, tout habillé pendant une vingtaine de minutes avant de sortir.
Je rentrais dans la maison, allumais la musique et tournait le bouton du volume jusqu'à « MAX », allais jusqu'à l'atelier, pris un chevalet, des pinceaux, de la peinture et m'installait dans le jardin, au soleil brulant ma peau et commençait à peindre
Peindre c'était avec le sport et la programmation informatique : l'une des seule chose capable de me détendre et m'amener à ne plus penser à mes problèmes & c'était bien là le but de ma démarche. Je ne voulais plus penser à ces images de ma mère, malade, couchée depuis des jours dans ce lit d’hôpital, je ne voulais pas réaliser qu'elle était dans une phase critique, qu'elle pouvait ne pas survivre et que peut-être je ne fêterai jamais plus son anniversaire, mon anniversaire ou bien encore noël avec elle ...
Je ne voulais plus y penser, je voulais, l'espace d'un instant l'oublier !

Je peignais, sans faire attention à ce qui se produisait autour de moi, sans réaliser que j'étais ici depuis déjà 3h, que j'étais maintenant presque tout sec, que je n'avais pas mangé de la journée, que ma musique ne permettait même pas de m'entendre penser tellement j'en avais élevé le volume & pire encore, je n'avais pas réalisé que j'étais observé ...
Je me retournais lorsque j'entendis que la musique avait été baissé, pensant voir débouler ma grand-mère avec un air désolé. Au bout de quelques secondes, personne n'apparaissait, je courrais vers la maison et tombait nez à nez avec une fille. Une petite blonde qui visiblement s’attendait à tout sauf à me voir, elle avait cet air désolé qui amplifia ma colère. Pourquoi était-elle rentrée, comme ça, sans qu'on l'y invite ? Qui était-elle ? Pourquoi était-elle même venue ici alors que je ne le l'y avais jamais vu ...

« J'peux savoir ce que vous faites là ?! On est pas au musée ici & encore moins au supermarché, on entre pas ici comme dans un moulin bordel !!!! SORTEZZ !!!!! »

Ma colère ne me permettait pas de garder mon calme et de poser tout simplement des questions à cette jeune fille. Empli d'agressivité, je me reportais sur elle, l'utilisant presque comme un punching-ball.

When you're trying to run faster than ever ...

Un éclat de rire se fit entendre et résonna dans le jardin sur un fond de musique … Oui, la situation était vraiment drôle et méritait bien que j'en rigole un peu … Cette journée était définitivement une blague !
Comment cette inconnue pouvait-elle se permettre de me dire que moi, moi je n'étais pas ici chez moi … Alors qu'elle prononçait cette phrase visiblement très naïvement et par manque de rhétorique ou par manque de réponse, je m'avançais vers elle, lui pris le poignet – un peu violemment il faut bien l'avouer – la lançant échapper un « Aïïïeee !!! ». Après s'être débattue quelques secondes, je la lâchais, me retournant et lui lançant sèchement :

« Oh pitié … »

Un sourire se dessina sur mon visage alors que j'entrais dans le salon, j'ouvris le premier tiroir d'une grande commode en bois vernis en tournant une clef dans la serrure et se présentèrent à moi des dizaines d'albums photos. L'un deux, avec une belle couverture bleu et gris métallisé, assez masculine portait mon nom : Niallán, je l'extirpais du tiroir, toujours avec un grand sourire et refermais le tiroir. Je me retournais vers la demoiselle qui se tenait à un mettre de moi, l'air vexé ou énervé, croisant les bras. Je n'avais pas pris le temps de bien la regarder et je réalisais qu'elle portait une paire de pantoufles en tête de cochon totalement ridicule ce qui m'intrigua l'espace de 10 secondes …
J'ouvris l'album, feuilletais les pages et m'arrêtait à l'une des dernières : c'était une photo de mes 20 ans où je posais devant la porte d'entrée du manoir avec grand'pa & grand'ma. Je lui tendis l'album et ajoutais :

« Maintenant je crois que vous avez gagné le droit de prendre la porte, je vous la laisse en souvenir si vous voulez … »

Je lui repris des mains l'album, le fermait et le posait sur la commode en ajoutant :

« Pour sortir c'est comme pour rentrer : La grande porte ! Laissez moi vous raccompagner … »

Je n'avais pas pour habitude d'être cynique, ironique voir aussi méchant et je ne voulais même pas savoir pourquoi cette fille était là, ce qu'elle faisait en pantoufles, comment elle était rentrée etc, je voulais simplement qu'elle dégage, qu'on me laisse tranquille et qu'elle foute le camp le plus vite possible ! Elle serait tombé un autre jour, j'aurai pu acheté ses chocolats, son calendrier ou ses pantoufles ridicules mais … pas aujourd'hui ! Après réflexion, j'aurai presque du l'inviter à rester, elle avait l'air d'être une grande comique, elle aurait pu me faire passer le temps et oublier tous mes traquas avec deux trois autres bonnes blagues comme elle savait visiblement si bien les faire !..

When you're trying to run faster than ever ...

Je n'étais pas méchant, juste un peu lunatique à mes heures … Cependant, cette fille n'était pas tombée un bon jour. Effectivement, je n'étais pas d'humeur à faire des cadeaux à qui que ce soit et certainement pas à une inconnue.
Je ne sais pas si ça arrive souvent aux autres mais certains jours, je pourrais me frapper si j'en avais l'occasion … Des jours durant lesquels je me déteste tellement d'être comme je suis : trop têtu, trop dramatique, trop froid etc … Aujourd'hui, j'étais trop faible ! Je n'avais pas su rester plus de dix minutes avec ma famille dans la chambre d’hôpital de ma mère et je n'avais pas pu retenir une ou deux larmes, je n'avais pas non plus été capable de contenir mon agressivité en attrapant par le poignet cette pauvre fille qui n'avait certainement rien demandé.
Oui ces jours comme aujourd'hui je m’énervais moi même, ces jours où, sans le vouloir tous mes défauts ressortaient, toutes mes faiblesses apparaissaient au grand jour et où finalement je me sentais impuissant ! Impuissant face à la maladie, que dis-je, face à la MORT … Impuissant face à mes émotions, impuissant face à mon impulsivité …

Quand je vis Birdie-Rose – maintenant que je sais qui elle est – tourner les talons et commencer à s'en aller je voulu la retenir et lui dire que j'étais désolé mais je ne le fis pas. Non pas par fierté comme le nient la plupart mais parce que des excuses impliquaient des explications, des explications concernant mon comportement et je ne voulais pas lui expliquer ô combien cette journée, cette période était difficile pour moi. Plutôt que de passer pour le mec qui se plaignait alors qu'il avait tout le fric qu'il aurait pu vouloir, alors que je réalisais qu'elle était la jeune fille dont mes grands parents m'avaient parlés, celle qui logeait chez eux en contrepartie d'un peu de ménage … Je préférais donc passer pour le salop, froid et agressif, trop sûr de lui …

Cependant, je ne sais pourquoi, la fille s'est subitement retourné, me regardant avec un sourire elle m'annonça qu'elle restait en bas. Je ne su lâcher qu'un : « C'est vrai ? » qui sonna comme la réponse la plus stupide que j'aurais pu prononcer en guise de réponse, j'aurai voulu m'enterrer six pieds sous terre. * vous voyez comme en 5 minutes on peut enchaîner les conneries ?! *

Il était grand temps que je reprenne les rennes, que je redevienne maître de mes actions et paroles ! Que j'agisse comme j'en avais l'habitude comme qu'un de naturel, gentil et drôle. Ça n'allait pas être facile mais je devais arrêter de me laisser abattre – comme je sais si bien le faire – et reprendre le dessus !

« Hum … A moins que tu ne tiennes à perdre 2h à regarder cet album avec les photos de mes pires moments je crois que je vais le ranger à sa place ... »

Je posais l'objet dans le tiroir puis le refermait à clef et la redéposait à sa place. En me retournant je vis que la jeune fille me regardait avec insistance. Je ne savais pas trop quoi faire, quoi répondre et je lançais pour détendre l'atmosphère :

« Eeeh … Elles sont cool tes pantoufles, ça fait ressortir la couleur de tes yeux … »
C'était con et je ne pu m'empêcher de rigoler quelques instants puis je repris mon sérieux et ajoutais :

« Je vais aller ranger mon bordel dehors et puis si tu veux on fera du thé … Grand'ma a certainement fait des scones ce matin … Si tu aimes le thé bien-sur … Et si tu ne m'en veux pas au point de ne pas vouloir t'asseoir en face de moi pour prendre une tasse de thé ... »

When you're trying to run faster than ever ...

Nous pénétrions dans la cuisine comme dans un temple, en silence, sur la pointe des pieds – ou presque -. Pour ma grand-mère la cuisine avait toujours été une pièce sacrée, celle-ci tout particulièrement car elle l'avait faite faire sur mesure, car elle était la seule à y avoir jamais cuisiné et surtout parce que c'était ici qu'elle avait inventé la plupart de ses recettes qui ont fait sa fortune. Enfin, ce n'est pas tout à fait exacte, cette maison ils l'achetèrent 10 ans après le lancement de son premier restaurant mais c'est en tous cas ici qu'après les dix années qui s'étaient écoulées elle a réussi à trouver des plats qui sortaient de l'ordinaire.

Je sortis la théière du placard, ayant du mal à la retrouvé – depuis le temps que je n'étais pas venu - … Et j'entendais la voix de la jeune fille provenant de derrière moi, je me retournais, la voyant le nez fourré dans le placard où étaient entreposés tous les thés, infusions et cafés, je me doutais qu'elle me demandais ce que je voulais sans pour autant avoir compris ce qu'elle avait dit. Ne voulant pas la faire répéter et au risque de paraître pour le dernier des crétins je lui lançais un :

« Pour moi ce sera thé vert ou thé noir … Mais j'aime tout donc si tu préfères autre chose, dis le moi, je m'adapte ... »

La jeune fille acquiesça et me certifia que ça lui allait, elle me tendit le pot de thé noir, je déposais deux cuillères à café de ce thé dans la théière puis lui rendis la boite qu'elle rangea de nouveau soigneusement. Pendant que le thé infusait et pour ne pas rester sans rien dire, sans rien faire à regarder l'eau bouillir et s'imprégner de ce délicieux goût, je regardais la jeune fille et lui dis un peu gêné …

« Birdie c'est ça ? Hum … On s'installerait pas sur la terrasse ?! Il fait encore bon, on pourrait profiter des derniers rayons du soleil, à moins que tu préfères te mettre dans le salon pour être au chaud ? »

Reculant et m'appuyant contre le plan de travail, je m'en décollais aussi-tôt, j'avais mal estimé le ''séchage'' de mes vêtements et à l'évidence, le derière de mon pantalon n'était pas sec … Quel con …