Je poussai un léger grognement en apercevant les quelques rayons de lumière pénétrés ma chambre. Je devais être folle pour me lever à cette heure après la soirée que je venais de passer. Sortir un dimanche soir, c’était officiellement à proscrire, surtout quand on avait des cours le lundi matin. En bonne étudiante que j’étais, je me levai en bougonnant, attrapant ma robe de chambre. Le même rituel recommençait une nouvelle fois. Je me levais rarement pour aller en cours le lundi matin avec les fins de semaines que je passais mais… depuis que j’avais rencontré Luckaël, je me forçais un peu plus. Ouais. Moi, Aloysia Worthington, j’allais en cours pour voir un gars sur le campus de l’université. En fait, j’y allais aussi pour suivre mes cours mais bon, mon principal intérêt était de voir Luckaël le plus souvent possible et le fait d’aller sur le campus renforçait mes chances de le croiser. Je pris rapidement une paire de jeans et un t-shirt blanc plutôt normal avant d’enfiler mes chaussures et de partir en direction l’université.

Le soleil était beaucoup trop fort par ici, sérieux. Mes yeux allaient mourir face à ses nombreux rayons UV. Je plissai légèrement les yeux, observant les alentours du campus pour voir si je ne connaissais pas quelqu’un. Connaître, c’était un grand mot. Quelqu’un que j’aurais croisé une seule fois dans ma vie pouvait bien suffire. Je continuai ma marche, continuant de regarder autour de moi. Je passai une main dans mes cheveux, les faisant virevolter au passage. C’est en m’approchant plus près des tables que j’aperçus finalement Luckaël, la tête dans ses bouquins dès le matin. J’eus un léger sourire à le voir comme ça. Il était tout le contraire de moi, vraiment. Je me dirigeai vers lui rapidement, heureuse de le voir. Je me postai derrière lui avant de m'appuyer sur ses épaules, observant ce qu'il faisait par la même occasion. «Déjà dans tes livres ce matin ? »

On ne peut pas dire que Luckaël avait bien dormi cette nuit, trop pris par ses cauchemars concernant sa mère. Le genre de cauchemar qu'il déteste mais qu'il aime néanmoins juste parce que cela lui permet de revoir sa mère. Ayant donc peu dormi, Luckaël se leva afin de se préparer pour aller à la bibliothèque universitaire, au moins là-bas il peut travailler sans être dérangé par sa demi-soeur. Mais avant cela et comme tous les matins, le jeune homme doit avant tout conduire sa petite soeur à l'école, petite soeur qu'il doit élever avec sa demi-soeur, ce qui lui vaut d'être bien plus mature et responsable que les personnages de son âge. Se levant doucement histoire d'émerger, Luckaël alla prendre son petit déjeuner avec sa tête brune préférée pour ensuite se doucher alors que celle-ci regarder gentiment la télévision. Une fois prêt et habillé d'un jean et d'un pull manche long, Luckaël céda la salle de bain à la petite alors que lui nettoyer les bols et la cuisine. Ce genre de matinée ressemble en quelque sorte à toutes ses matinées. Cela ne le dérangeait pas et finalement il y avait cette complicité avec la petite qu'il n'avait avec personne d'autre mis à part sa demi-soeur. À eux trois ils sont une famille, à eux trois ils sont prêts à tout pour survivre à la mort de leurs parents.

Après avoir déposé la petite à l'école, Luckaël marcha jusqu'à l'université où il avait cours dans quatre heures, ce qui lui laissait donc quatre heures devant lui pour bosser, lire et faire tout ce qu'il avait à faire. Les jeunes de son âge, d'ordinaire préfèrent dormir et prendre leur temps pour venir en cours, du moins pour ceux qui viennent. Mais lui préférait y venir dès le matin afin de profiter de la journée et de sa soirée. Une fois arrivé sur place, il se dirigea machinalement vers la bibliothèque où il s'installa à une table légèrement à l'écart afin d'être tranquille. Il est vrai qu'il connaissait ceux qui venaient principalement pour se donner bonne conscience et parler, ce qui avait le don de l'agacer. Installé, il attrapa les livres dont il avait besoin et commença sa lecture avant d'être interrompu une bonne demi-heure plus tard par la ravissante Aloysia qui s'appuya gentiment sur ses épaules. « Et oui et toi déjà à l'université ? Tu m'étonneras toujours... » Lâcha t'il en levant son regard vers la belle brune. Sa matinée révision était foutue, il le savait avec Aloysia dans les parages il ne pouvait se concentrer et se résigna donc à fermer son livre tout en gardant son sourire.

Aloysia, que dire d'elle à part qu'elle sait ce qu'elle veut contrairement à lui ? Cette fille ravissante n'était pas fait pour lui, il le savait et même s'il faisait tout pour la persuader, celle-ci revenait toujours à la charge pour sa plus grande frustration. Comment réussir à rejeter éternellement une personne qui l'attire à ce point ? « Pourquoi es-tu debout si tôt ? T'es tombé de ton lit ? » Questionna t'il avec un sourire taquin sur le visage. Quitte à passer la matinée avec elle, autant qu'elle soit la plus agréable possible...

La bibliothèque était le dernier endroit du campus universitaire où l’on pouvait me trouver en temps normal. Je n’étais pas le genre de fille à me lever de bonne heure, ni à venir lire dans la bibliothèque. J’étais vraiment tout le contraire de la fille studieuse qui révisait le matin. Appuyée tout bonnement contre les épaules de Luckaël, je regardai aux alentours. Y’avait quand même beaucoup de monde à la bibliothèque, quand même étonnant. « Et oui et toi déjà à l'université ? Tu m'étonneras toujours... » Il tourna son regard vers moi avant de fermer son livre. Pour une énième fois, je le perturbais dans ses études. Vraiment, j’étais douée pour ce genre de chose. Je passai une main dans mes cheveux, toujours appuyée sur ses épaules. «Je sais, je suis étonnante.» Oui, ça m’arrivait de me pointer à l’université pour aller en cours. Fallait bien que je réussisse mon année quand même. Je lui fis un de mes magnifiques sourires avant de me reculer légèrement. Il m’avait manqué, je devais bien me l’avouer. Je me déplaçai à contre cœur pour m’asseoir sur la chaise à ses côtés, ouvrant au passage un des livres traînant sur la table. Misère, lire ce tas de brique dès le matin, ce serait ma mort assuré. Je fis un légère grimace et je retournai mon regard vers Luckaël. Il devait me trouver énervante parfois, de toujours être là à le déranger ou de simplement vouloir être avec lui. Il faisait tout pour me dissuader de le revoir, d’avoir quelque chose de plus qu’une amitié avec lui mais… Nah, je pouvais pas. Je revenais toujours à la charge et je finirais par l’avoir. Il était différent de moi mais… en un sens, il me complétait. « Pourquoi es-tu debout si tôt ? T'es tombé de ton lit ? » Ce sourire, trop craquant. Vraiment, il me faisait fondre. Je le frappai légèrement sur l’épaule avant de rigoler. J’entendis quelques «silence on est dans une bibliothèque ici» et je secouai ma tête de gauche à droite. Fallait se calmer mon dieu, si on pouvait plus rire. «C’est le soleil qui m’a réveillé. J’avais pas fermé les rideaux. Et puis… je me suis dit que je pouvais bien me pointer en cours pour une fois. Pour me donner bonne conscience.» Totalement mon genre oui. Fallait bien que payer les frais de scolarité servent à quelque chose. Je plantait mon regard dans celui de Luckaël, souriant de nouveau. «Tu te casses la tête dès le matin avec cette tonne de bouquins ? C’est toi qui est tombé de ton lit d’après moi.» Il était studieux, beaucoup plus que moi. Il avait d’autres occupations aussi, avec ses sœurs et tout. Je ne savais pas tout de sa vie, mais je savais qu’il avait eu des problèmes, des histoires difficiles. J’avançai ma chaise plus près de lui un peu, pour sentir sa présence encore plus. J'aimais bien être près des gens, surtout près de ceux que j'appréciais davantage. Réduire l'espace entre nous était comme essentiel pour moi. Moi et mes agissements bizarres. C’était terriblement dommage qu’il me résistait ainsi, mais bon. C’était la vie.