IL Y AVAIT UN COOKIE, QUI S'APPELAIT 'TIT BISCUIT, CARABI !

Quand on pense au mot « policier », en général, on voit tout d’suite le grand et beau flic, avec un flingue autour de la taille, qui passe sa journée à jongler entre une scène de crime, huit interrogatoires et trois attaques terroristes. Ouais, c’est bien c’que je pensais. Ça, c’est Jack Bauer dans 24h chrono, Horatio Caine des Experts Miami ou bien Gibbs de NCIS. Moi aussi, j’aimerais avoir leur vie, quoi que parfois ça doit être bien relou, de dormir une heure par semaine et de se prendre à peu près trois balles par mois. Oh, j’vous entends d’ici : ouais, c’est désespérant ! J’ai tellement rien à foutre que j’me pose ce genre de questions.
La vie d’un flic à Montsimpa, c’est assez drôle, en fait. Parce que c’est pourri, tout simplement. Y’a bien quelques affaires sympas, genre, une vieille qui s’est fait piquer son sac à la sortie de la messe ou bien une bagarre d’écoliers, en plein centre ville. Et voilà, ça s’arrête là. Le reste du temps, on le passe à ne rien foutre, assit dans nos fauteuils à peine confortable. La vie est injuste. J’suis sûr que si on devait passer nos journées dehors sur des missions top cool, on aurait de gros fauteuils trop géniaux… dont on pourrait même pas se servir, du coup. Donc ouais, la vie est grave injuste.
Alors, en attendant, bah, la fin de la journée, j’suis là, calé dans mon fameux fauteuil, à clairement rien faire. Les jeux de facebook commencent sérieusement à me souler, et puis personne ne m’envoie les muses dont j’ai besoin pour construire la nouvelle pièce de la maison de mon sims, alors, merde. Je soupire et ferme la page, avant de faire un tour, puis deux, sur ma chaise. Ouais, elle tourne, grave cool hein ?! Enfin voilà, bravo, du coup j’ai envie d’vomir. Je soupire encore et attrape ma tasse de café, avant de réaliser que… Merde, elle est vide. Allez hop, go la remplir, hein. Oui, la vie d’un flic à Montsimpa, c’est passionnant. Enfin, j’crois pas si bien dire. J’ai à peine le temps de m’approcher de la cafetière que j’entends un grand « OUUI ». Je hausse les sourcils et me tourne vers la petite chose qui vient de prononcer ce mot. Je souris immédiatement, parce que la phrase qu’il vient de prononcer est assez, ambigüe, en fait. J’adore cette façon qu’il a de parler, genre, comme si c’était normal de me poser cette question. J’attrape alors le panier de cookies avec force et souris de plus bel : de rien du tout, hein… ! « Tu sais que j’m’attendais pas à te revoir de si tôt ? J’veux dire, tu te fais arrêter, et tu reviens pour m’offrir des cookies. » Je souris encore, genre je m’en rends même plus compte, avant de répondre à sa question. « Tu sais qu’tu illumines ma journée ? Sérieusement, la vie d’un flic à Montsimpa est passionnante, remplie d’action et… va pour un café ! »

IL Y AVAIT UN COOKIE, QUI S'APPELAIT 'TIT BISCUIT, CARABI !

C’est clair que j’m’attendais pas à le voir trainer par ici. Sérieusement, j’pensais qu’il était limite parti en courant dès que je l’avais relâché, qu’il m’oublierait complètement, et surtout, qu’il tenterait de vivre loin de moi, loin de ce commissariat, et probablement loin de tous les flics en général… Mais, c’est sympa parce que, confronté à lui, là, maintenant, je réalise que, merde, en fait, il est absolument pas comme je l’avais imaginé. Il a osé revenir ici, tout sourire, genre, heureux de repasser par la case prison, vous voyez ? Ouais bon, peut-être que finalement, il est content de passer dans le coin parce que ça lui fait plaisir de voir les cellules de l’autre côté.
J’esquisse un immense sourire alors qu’il affirme être « fifou dans sa tête », et je plussoie totalement ces paroles, hein, je l’aurais juste pas prononcer avec le même vocabulaire, moi. Bref, il me propose un p’tit tour au café d’en face, et je hausse doucement les épaules, genre ‘j’te suis’ quoi, après avoir déposé la boite de cookies sur la première table trouvée. Pas que j’en n’ai rien à foutre de ses cookies hein, mais bon, j’crois que pour le coup j’ai un peu autre chose à foutre qu’aller trouver un petit endroit calme et mignon pour les ranger soigneusement. Avant qu’il ne laisse trop de distance entre nous et finisse par me semer, je cours presque derrière lui et, finalement, j’remarque que tous ces couillons de flics nous mâtent. Genre, ils ont jamais vu un mec sortir d’un commissariat accompagné d’un autre mec ? C’est ça ouais. Eux ils le font toujours et personne dit JA-MAIS rien, genre personne les remarque quoi. C’est dingue ce monde : moi j’sors discrètement, accompagné d’un mec au jean délavé et à la démarche étrange, et ça y est j’suis un phénomène de foire. Laisse tomber, les gens sont fous, puis parano aussi.

A peine le temps d’y penser qu’il me change déjà les idées en me demandant clairement de payer son café. Je hausse un sourcil : c’est une blague, hein ? Genre, je l’ai arrêté avant qu’il n’ait eu le temps de faire sa pute, donc il a pas pu gagner des tunes, donc il peut pas payer le café. Non mais WTF quoi ! Je lève les yeux au ciel et me racle la gorge, cherchant une façon, disons, assez soft pour répondre à sa demande. « Tu sais quoi ? Je suis flic, pas banquier. » Ouais bon, limite ma phrase elle veut rien dire quoi, mais bon, tant pis. Un dernier coup d’œil vers le commissariat et je fais un pas, puis deux, sur le trottoir. « Laisse tomber, on peut bien s’passer de café, hein ? On a qu’à marcher là, c’est plus tranquille et c’est toujours quelques centimes de gagner. » Moi, radin ? Que dalle ouais ! Mais bon, enfin j’sais pas, je suis flic à Montsimpa j’ai dit, pas banquier à Washington, hein.
Il m’a posé la fameuse question : quoi. De. Neuf. J’déteste cette question. J’suis un pauvre flic célibataire de vingt-six ans : y’a rien de nouveau dans ma vie, jamais ! « Au risque de te décevoir, il me semble que ma vie est aussi triste que… Ouais nan, j’vais pas te faire de comparaison, mais t’as compris quoi. Par contre, mon p’tit doigt me dit que toi, ta vie est palpitante alors, tu dois en avoir des trucs à me raconter… ! »

Un crevard, moi ? Merde, je crois que ce môme a un peu tendance à oublier que je suis flic, parfois. Non mais sérieusement quoi : je pourrais le foutre au trou en moins de deux, juste à cause de la dernière fois, mais lui, il se permet de m’insulter. Normal, hein ? Je hausse les épaules, résigné : je crois qu’on pourra rien faire de ce mec. Enfin, pas pour l’instant quoi. Mais avec un peu de volonté, pas mal d’efforts et beaucoup de courage, y’a peut-être moyen de faire quelque chose. Quoi que.
C’est bien c’que je pensais. Ça m’étonne même pas quand il balance que s’il me racontait tout, je serais obligé de le coffrer. Genre il peut passer sous silence certains détails, lui ! Ça ressemble à une bonne grosse blague, et je peux pas m’empêcher de sourire en attendant la suite. Merde, il atteint vraiment des sommets lui ! J’me retourne vers son p’tit minois et je l’observe quelques secondes, genre, choqué quoi. Faussement choqué évidemment, je le connais à peine, mais ça m’étonne absolument pas de lui. Je crois que c’est le genre de spécimen que tu rencontres une et une seule fois dans ta vie, c’est tout. C’est marrant, mais j’ai pas envie de le lâcher celui-là, va savoir pourquoi. Bref il continue sur sa lancée, comme s’il avait absolument pas besoin de moi pour faire une conversation, quoi. Une vieille, hein ? Ca m’étonne pas, franchement. Les vieux n’aiment pas vraiment les machins de son genre, qui s’habillent absolument pas comme il faudrait. Et, optionnellement, qui se prostituent à quelques mètres de leurs portes. Ouais, c’est tout à fait compréhensible et, d’ailleurs, ça m’étonne qu’elle n’ait pas encore appelé pour signaler ça. ça devrait pas tarder, j’en doute pas. A moins que mon incroyable interlocuteur… ait menti sur toute la ligne.

Mon sourire s’agrandit un peu plus quand il tourne le sujet vers moi : les vieilles, hein ? Pas trop le genre que je regarde, j’avoue. Mais bon, effectivement, j’y suis pas mal confronté, sachant que je suis flic. Mais, c’est clair, elles me regardent pas de la même façon qu’elles doivent le regarder lui. « Tu verrais tout c’que certaines peuvent baver, putain c’est dégueulasse. » Foutaises évidemment. Et puis, même si ça doit être relativement flatteur, j’crois que c’est peut-être mieux que ça n’se passe pas comme ça en vrai. Non, je crois qu’en fait, je fais pas attention au regard des gens. Pas quand je suis en service, quoi. C’est surement pour ça que j’ai pas vu comment mes collègues nous ont regardés, quand on est sorti tous les deux. Bah quoi, ils lui reprochent quoi ? Moi, j’le trouve génial, ce mec. Genre, il est complètement, différent. Personne ne lui ressemble, c’est pas possible : autant dans sa façon de s’habiller, que dans sa façon de parler, de s’exprimer, d’être, tout simplement. Il est génial, parce qu’il est totalement différent. C’est ça que j’aime, chez-lui. Oh et puis, son cul, aussi. Mais ça, ça reste entre nous, évidement.