amandie; the perfect family tree

Le métro. Depuis pratiquement quatre ans que j'étais ici, je ne me souvenais pas l'avoir pris une seule fois. Il fallait dire que j'avais toujours conduit cette vieille voiture, je n'avais conduit qu'elle que depuis que j'avais eu mon permis. Et chaque fois que je l'amenais pour une révision, c'était carrément la mort. Il fallait marcher. Mon dieu, je ne voyais pas pire activité que la marche. C'est pour cette raison que le métro m'apparaissait comme la meilleure solution. Et c'était beaucoup plus rapide, surtout quand je devais désormais aller à l'autre bout de la ville pour rentrer "chez moi". Chez moi. Je me demandais si ça avait encore un sens. Chez moi, c'était désormais chez Cooper, chez Olive, et chez tous ses autres colocataires, et ce, depuis que mon immeuble avait été condamné suite aux inondations. L'inconvénient, le trajet entre le domicile d'Olive et mon boulot était beaucoup plus long. L'un des nombreux avantages était que la maison était toujours pleine de vie. D'ailleurs, je ne m'inquiétais même pas de trouver la maison vide quand je rentrerai du boulot. Il était déjà tard dans l'après-midi quand je quittais le Hogan et je comptais bien profiter de l'une de mes rares soirées de libre. Peut-être même que les autres avaient quelque chose de prévu pour la soirée, c'était une surprise que je me réservais pour plus tard. Pour l'instant, ma principale préoccupation était de parvenir jusqu'à chez Olive, et pour ça, je ne voyais qu'une seule solution : le métro. Bondé, à cette heure-là, évidemment. A croire que tout Bridgeport s'était donné rendez-vous ici et que tout Montsimpa avait décidé de faire éruption également. Au moins, les métros passaient régulièrement, c'était déjà ça. Grimpant dans l'une des rames bondées, je pris appui sur l'une des barres de fer quand une personne sembla me confondre avec cette même barre. « Vous ne pourriez pas faire attention ? » La fusillant du regard, je découvris Amanda, cette autre personne qui partageait mon sang. Une soeur ? Oh pitié, non. Cela faisait déjà bien longtemps qu'elle n'était plus une soeur, qu'elle n'était même plus un membre de la famille. Elle n'était plus une soeur depuis qu'on avait quinze ans, depuis qu'elle avait décroché une audition, mon audition, depuis qu'elle avait pris ma vie et qu'elle était partie sans se retourner. Et même si je pensais à mille et une façon de lui rendre la pareille, tout ce dont j'avais envie pour l'instant c'était de la pousser hors de cette rame et la laisser sur le bord du quai.

❝ ANDIE & AMANDA ❞

© Loon

Amanda comme tous les jours prenait le métro pour rentrer chez elle. Elle avait eu de la chance, son appartement n'avait pas été inondé comme beaucoup puisqu'il se trouvait assez en hauteur. Amanda n'avait jamais été fan du métro, en particulier lorsqu'il était bondé parce que ça lui donnait l'impression d'être enfermée dans une boîte à sardines tellement c'était confiné. Amanda avait toujours préféré les grands espaces. Elle n'avait pas spécialement besoin que ce soit dans la nature, un grand espace dans la ville lui convenait tout autant, mais il fallait qu'elle puisse se sentir libre de danser. Danser était pour elle comme une seconde nature, une drogue dont elle ne pouvait plus se passer. Petite, c'était juste une passion comme une autre, comme ses petites filles qui sont fan d'équitation ou les garçons fans de football. Mais pour Amanda c'était devenu bien plus qu'une passion, c'était devenu toute sa vie. Elle y avait consacré tellement de temps et d'énergie qu'elle n'imaginait même pas une vie sans la danse. Elle a dû faire des sacrifices pour y arriver mais elle a réussi, et maintenant, elle fait partie du cercle fermé des meilleures danseuses de sa génération et pour rien au monde elle ne l'échangerait...
Ce soir-là, elle pensait rentrer tranquillement chez elle pour passer la soirée à répéter dans son appartement et commander chez le chinois pour ne pas avoir à faire à manger, seulement le destin allait en décidé autrement et rendre ce trajet bien moins tranquille que d'habitude. Alors que tous les gens s’agglutinaient autour d'elle, Amanda fermait les yeux et se remémorait la chorégraphie qu'elle était en train d'apprendre. Les yeux toujours fermés, elle dirigea sa main vers la gauche pour s'accrocher à la barre qui était censée être tout prêt mais ce n'est pas une barre qu'elle attrapa mais un bras. Elle ouvrit alors les yeux et découvrit que ce n'était pas n'importe quel bras qu'elle avait attrapé mais celui de sa "soeur". L'emploi des guillemets est pleinement justifié ici tant les relations des soeurs Sawyer-Hawkes sont loin d'être de vraies relations fraternelles. « Vous ne pourriez pas faire attention ? » dit Andie en fusillant sa soeur du regard. Amanda lui répondit par un beau sourire. « Dis donc, je pensais que les parents t'avais mieux éduqués que ça, c'est de cette façon que tu dis bonjour à ta soeur? ». Amanda savait qu'elle avait "l'avantage" sur sa soeur, que cette dernière la détestait depuis cette fameuse audition il doit avoir 6 ou 7 ans et que c'était surtout la jalousie qui dominait la jolie blonde quand elle voyait Amanda...

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Amanda. C'est pourtant bien elle. Ma soeur. J'ai beau cligner des yeux autant de fois que je le veux, prier comme jamais en espérant qu'elle disparaisse dans un claquement de doigt, rien n'y fait. Elle est ici, en chair et en os. J'aurais pensé qu'elle se déplaçait avec chauffeur privé à ce stade, mais il fallait croire que non. Amanda était arrivée il y a plus d'un an à Montsimpa, et pourtant nos conversations avaient été rares. Et il fallait bien dire que je mourrais d'envie de lui poser tout un tas de question. Comme par exemple, ce qu'elle était devenue, si finalement elle avait fait carrière. Ou pourquoi elle avait miraculeusement attéri dans la même ville que moi, si loin de chez nous. Et pourtant à chaque fois que je posais mes yeux sur elle, tout ce que je parvenais à voir, c'était la rancoeur et la jalousie, la rage folle peut-être aussi d'une vie volée et pas complètement oubliée. Et je savais aussi que rien que pour ça, elle était impardonnable à mes yeux. « Dis donc, je pensais que les parents t'avais mieux éduqués que ça, c'est de cette façon que tu dis bonjour à ta soeur? » C'est d'ailleurs pour cela que la moindre de ses paroles me faisait lever les yeux au ciel. Elle n'avait pas le droit, d'invoquer nos parents à la première occasion venue. Pas quand ils avaient pris son parti, au détriment du mien. Je ne les avais pas revu depuis que j'avais quitté l'Australie quatre ans auparavant et je ne comptais pas changer ça. Et pourtant, à chacune de leur allusion, je ne pouvais pas m'empêcher de me demander ce qu'ils devenaient, ce qu'ils pouvaient bien faire maintenant. J'avais beau ne plus vouloir les voir, ils restaient mes parents. « Ma soeur... Tu parles de celle qui m'a poignardé dans le dos, c'est ça ? » Bon d'accord, c'était trop de drama peut-être. Mais je ne pouvais pas juste rester là à la regarder tenter de me remettre en place sans rien faire. Je lui lançais un regard noir tandis que je retournais à mes occupation, en l'occurrence, observer les paysages urbains de Bridgeport en tentant d'oublier sa présence. « Et puis d'abord, qu'est-ce que tu fais dans un endroit pareil ? Tu te mélanges à la population pour voir ce que ça fait d'appartenir à la classe moyenne ? » L'oublier, c'était plus difficile que prévu finalement. Si pour nous, donner des nouvelles ressemblait plus à se lancer la première remarque désagréable venue, je crois qu'on sortait plutôt bien pour l'instant. Et puis tant qu'à faire, autant passer le temps d'une façon ou d'une autre.

❝ ANDIE & AMANDA ❞

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Revoir Andie était toujours un vrai plaisir pour Amanda, elle savait qu'elle allait voir chez sa soeur une jalousie terrible et elle aimait ça. A vrai dire c'est elle qui avait toujours été jalouse de sa grande soeur, la considérant comme plus belle et plus intéressante qu'elle. Pour elle, Andie était un modèle et elle voulait lui ressembler. Peut être qu'à la base, c'est cela qui a poussé Amanda à commencer la danse en même temps que sa soeur. Parfois, même si elle ne lui avouerait jamais, sa soeur lui manquait. Quand elles étaient plus petites, elles avaient l'habitude de passer plus de temps ensemble mais la danse avait très vite instauré une compétition entre elles. Amanda ne se rappelait plus exactement quand leur relation avait commencé à se détériorer mais cette fameuse audition a fini de l'achever.
Amanda avait fait exprès de parler de leurs parents car elle savait qu'Andie ne leur donnait plus aucun signe de vie depuis quelques années. Amanda qui elle avait toujours gardé contact avec ses parents savait que ces derniers étaient attristés par le fait qu'Andie ait disparue de leur vie mais ce n'était pas les affaires d'Amanda et elle n'allait pas s'en mêler. Seulement Andie ne releva rien quant aux parents mais releva le fait qu'elle avait dit le mot soeur. « Ma soeur... Tu parles de celle qui m'a poignardé dans le dos, c'est ça ? » Maintenant, elle donnait dans le dramatique, ça en devenait presque pathétique alors Amanda allait tourner sa phrase en dérision. « Sors les mouchoirs, je crois que je vais pleurer! » Amanda s'amusait de la situation, et ce n'est pas le regard noir que lui lançait Andie qui allait changer grand chose. Elle reprit cependant sur un ton plus sérieux. « C'est pas moi qui t'ais poignardé, j'ai pas décidé qui serait choisi, j'ai juste été meilleure que toi c'est tout! »
Andie détourna son regard sûrement pour faire comme si Amanda n'était pas là mais elle finit vite par retourner son attention vers elle. « Et puis d'abord, qu'est-ce que tu fais dans un endroit pareil ? Tu te mélanges à la population pour voir ce que ça fait d'appartenir à la classe moyenne ? » Amanda ne put retenir un gloussement. C'est vrai que connaissant Amanda et le pactole qu'elle avait touché à la mort de son mari, cela pouvait susciter des questions mais en réalité, si Amanda prenait le métro plutôt qu'un chauffeur ou un taxi c'est parce que le métro évitait les bouchons et était beaucoup plus rapide pour rentrer chez elle. A choisir elle préférait passer 10 minutes dans un métro bondé plutôt que 40 minutes dans une voiture dans les bouchons. Mais au lieu de donner la vraie raison, Amanda répondit sur un ton ironique. « Ma limousine est tombée en panne, je n'ai pas eu d'autre choix que de me mélanger à la populasse... »

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J'avais du mal à me souvenir avec précision du moment où notre relation était passée d'innocente à complètement invisible. Je me souvenais pourtant de nos journées à s'entraîner, à pratiquer, à se moquer gentiment de nos chorégraphies, parfois même de nos après-midi à jouer à la poupée. Et pourtant, au fil du temps, je ne saurais dire pourquoi, l'intérêt particulier de notre père pour Amanda, l'amour parental concentré sur la cadette de la famille, ou bien simplement nos ambitions communes, je crois que c'était plutôt un tout qui avait fini par nous éloigner. Et même si je ne l'avais pas supporté, j'étais reconnaissante d'avoir ouvert les yeux et d'avoir découvert le véritable envers du décor. Je ne m'imaginais même plus faire partie de la si belle famille Sawyer-Hawkes. Et à voir comment était devenue Amanda - c'est-à-dire, le si beau petit soldat de la famille, prête à défendre bec et ongle l'honneur de la famille contre un petit chèque signé par papa - j'étais bien contente de ne plus en faire partie. Même si à leurs yeux, je devais plutôt être le vilain petit canard, l'élément rebel éloigné volontairement, aux miens, ils étaient plutôt cette parfaite combinaison de manipulation et d'hypocrisie. J'étais pratiquement sûre d'être le seul sujet à éviter lors des réunions de famille, celui qu'on avait enterré précieusement après toute la débâcle qui avait suivi le départ en Europe d'Amanda. J'avais été oubliée, reniée. Pour les amis et la famille éloignée, à qui l'on avait méticuleusement menti, j'étais pratiquement certaine d'être devenue celle que l'on avait envoyé dans un pays lointain faire des études. Il fallait sauver la face, c'était leur règle d'or. Mais ce n'était pas grave, j'étais très bien sans eux. « C'est pas moi qui t'ais poignardé, j'ai pas décidé qui serait choisi, j'ai juste été meilleure que toi c'est tout! » Alors celle-là c'était la meilleure. Surtout quand on pensait que son très cher papa avait du glisser un mot aux directeurs des auditions, un joli mot dans un noeud cadeau, sur du papier qui valait sans doute des millions. « Meilleure ? Arrête un peu. T'as jamais été capable de faire tes propres choix. C'était tellement plus simple pour toi de te t'approprier ce pour quoi j'ai travaillé toute ma vie. » Je voulais simplement sortir de cette rame le plus rapidement possible. Tant pis si je devais mettre des heures pour rentrer, tant pis si je me perdais en chemin. Tout était bon à prendre pour m'éloigner d'elle. « Ma limousine est tombée en panne, je n'ai pas eu d'autre choix que de me mélanger à la populasse... » Etrangement, ça ne m'étonnait même pas d'elle. Pourtant je n'avais même pas envie d'y croire. Je n'y croyais plus depuis que j'avais compris que tout ce qui sortait de la bouche d'Amanda n'était pas raison. « C'est ça ton excuse ? Enfin je comprends que n'importe quel mensonge est bon à prendre quand ton chauffeur attitré ne veut plus de toi, même pour tout l'argent du monde. » Et s'il fallait être blessante, eh bien tant pis. Parce qu'à présent, plus rien d'autre n'avait plus d'importance que de régler les problèmes une bonne fois pour toute et ne plus jamais avoir affaire à elle.

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Amanda avait l'impression qu'elle allait assister à un mélodrame de sa grande soeur. Parfois, elle s'était demandée qu'elle aurait été leur vie si ce directeur de casting avait choisi Andie plutôt qu'elle, si c'était sa soeur qui était devenue une star et elle n'aurait été personne. Est-ce que leur relation se serait autant dégradée? Peut être pas. Certes Amanda aurait été détruite en apprenant que sa soeur aurait été choisie mais elle lui aurait certainement pardonnée car elle reste sa grande soeur. En fait, malgré tout ce qu'Amanda pouvait dire et son comportement face à Andie, elle l'aimait et elle lui manquait. Mais c'est le genre de trucs qu'elle n'avouerait que sous la torture et encore... Bref, Amanda se posait régulièrement cette question commençant par "Et si..." mais la vie était tellement faite de ce genre de questions que rien qu'un petit changement à un moment pouvait faire basculer toute une vie.
Mais alors qu'Amanda rappelait à Andie que si elle avait été choisi c'est parce qu'elle avait était meilleure, elle lui cracha encore son venin. « Meilleure ? Arrête un peu. T'as jamais été capable de faire tes propres choix. C'était tellement plus simple pour toi de te t'approprier ce pour quoi j'ai travaillé toute ma vie. » Jamais capable de faire ses propres choix? Elle était bien bonne celle-là. Elle avait peut être à la base choisi de faire de la danse pour faire comme Andie, en faire sa carrière avait été son choix à elle, Andie aurait très bien pu avoir comme ambition d'être docteur que ça n'aurait rien changé au choix d'Amanda d'être danseuse. « Je te rappelle que j'ai au moins autant travaillé que toi pour en arriver là où je suis, seulement toi tu n'as pas réussi contrairement à moi. Tu veux quoi que je me morfondes sur ton sort en te suppliant de me faire pardonner d'avoir réussi? Si c'est ça tu peux de suite oublier. » Amanda se montrait certainement blessante en mettant bien en évidence le fait qu'elle avait réussi alors qu'Andie non mais c'est elle qui l'avait poussé à être aussi blessante en commençant. Ce raisonnement semblait un peu puéril mais Amanda n'était pas encore des plus mures du haut de ses 22 ans.
Cependant, cela ne s'arrêtait pas là et Andie se montra à nouveau blessante avec cette histoire de métro et voiture. Ne pouvait-elle pas se contenter de l'excuse bidon d'Amanda? Non il fallait toujours qu'elle en rajoute une couche. « C'est ça ton excuse ? Enfin je comprends que n'importe quel mensonge est bon à prendre quand ton chauffeur attitré ne veut plus de toi, même pour tout l'argent du monde. » Elle voulait jouer à ça? Ok Amanda allait jouer alors. « Oh mais t'as fini d'être jalouse? Tu sais la jalousie te va vraiment pas au teint et ça te fait une petite ride là. » Elle désigna de son index la zone entre ses deux sourcils. « Et si tu veux tout savoir, j'ai un chauffeur qui serait prêt à accepter une misère pour travailler mais c'est moi qui préfère prendre le métro. »

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Rien n'avançait réellement. Depuis des années, on en était au même point. Et si cette fois, on ne se disputait plus pour savoir qui avait la plus belle poupée Barbie mais bien pour quelque chose de plus sérieux, ça n'en rendait pas moins l'évidence parfaitement claire à présent. Amanda ne comprenait pas. Elle ne l'avait jamais fait. Mais sur ce point, comment lui en vouloir ? Depuis toujours elle ne s'était jamais soucié de grand monde à part d'elle-même, et aujourd'hui encore, rien n'avait changé. Alors elle ne pouvait pas comprendre, ce que ça faisait d'être celle en retrait quand elle était celle qui avait réussi. « Je te rappelle que j'ai au moins autant travaillé que toi pour en arriver là où je suis, seulement toi tu n'as pas réussi contrairement à moi. Tu veux quoi que je me morfondes sur ton sort en te suppliant de me faire pardonner d'avoir réussi? Si c'est ça tu peux de suite oublier. » Sa piètre justification me décrocha un rire amer. Est-ce qu'elle y croyait vraiment ? Même si avec elle, rien n'était jamais vraiment certain, j'avais peine à croire que c'est ce qu'elle se répétait à longueur de journée. De mon côté, même si j'évitais en général de repenser à cette époque, je préférais penser que j'avais été victime d'une sorte de conspiration, que ma famille s'était soudain unie contre moi pour m'empêcher d'accéder à mon rêve. Et quand on y pensait, cette idée était loin d'être stupide. « T'es vraiment pas croyable. Parce que tu crois que t'as mérité tout ça ? Ne me dis pas que tu penses en être arrivé là par tes propres moyens. » Je faisais référence à notre père tant adoré, qui faisait toujours son possible pour aider ses deux filles. Ou plutôt Amanda, car nos relations s'étaient très vite détériorées. A mes yeux, si Amanda avait été choisi à ma place, c'était uniquement parce que Papa Sawyer-Hawkes avait dû se mettre les jurys dans la poche. C'était un homme influent, et avec lui, tout était vraiment possible. Alors forcément, quand elle prétendait être arrivée au sommet de sa carrière par ses propres moyens, il y avait de quoi rire. C'est que je finirais presque par avoir pitié d'elle, tiens. « Et d'ailleurs, où en est ta carrière, Amanda ? » je lui lançais dans un sourire sadique, comme persuadée qu'elle avait fini par retomber dans l'ombre. Il y avait sans doute ici un brin de curiosité également, parce qu'à part son mariage avec un milliardaire - qui ne devait sûrement plus supporter sa femme au point de se donner la mort, c'est vous dire combien elle pouvait se montrer insupportable, je ne connaissais pas grand chose de la vie d'Amanda.

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Pendant que les soeurs Sawyer-Hawkes étaient en train de se prendre le bec, un homme les regardait étrangement, certainement amusé et fasciné par leur conversation. Mais pour Amanda, cette conversation ne les concernait que elles deux et personne d'autre alors elle lança un regard mauvais à l'homme qui devait avoir une quarantaine ou cinquantaine d'années. « Tu veux notre photo?! » L'homme détourna alors instantanément le regard. « Ouais c'est mieux comme ça... » dit-elle avant de finalement retourner son attention vers sa soeur.
Alors qu'Amanda pensait avoir le dessus de la conversation, Andie aborda le sujet qui fâche: la possible intervention de leur père lors de cette fameuse audition. « T'es vraiment pas croyable. Parce que tu crois que t'as mérité tout ça ? Ne me dis pas que tu penses en être arrivé là par tes propres moyens. » Amanda se rappelait le regard bienveillant de son père juste avant l'audition, le fait qu'il lui avait répété qu'elle allait réussir. Elle s'était posé parfois cette question pour savoir si son père était à l'origine de tout ça mais jamais elle n'oserait la lui poser à lui au cas où la réponse ne lui plairait pas. Amanda avait toujours préféré se voiler la face alors ça n'allait pas changé aujourd'hui. Elle ne voulait pas entendre ce genre de choses mais peut être aussi que cette possibilité rendait les choses plus faciles à Andie. Après tout se dire qu'il y avait eu un complot contre elle plutôt que de se dire que sa petite soeur avait été meilleure devait lui faciliter la vie... « Pourquoi c'est si dur d'accepter que j'ai été choisi sans l'intervention de personne? » Amanda se posait vraiment cette question de savoir pourquoi sa soeur ne voulait pas être un minimum contente pour elle et pourquoi elle ne pouvait pas cesser de lui en vouloir pour qu'elles retrouvent la complicité qu'elles avaient gamines avant que la compétition vienne tout changer. « Mais tu sais, cette vie s'est pas toujours le rêve, ça demande beaucoup de sacrifices... » En disant ça, elle pensait surtout au fait qu'Andie était avec Cooper et si elle avait été à sa place, il y aurait eu peu de chance pour qu'ils soient ensemble...
Puis ce fut avec un espèce de sourire sadique, qu'Andie lui posa une nouvelle question. « Et d'ailleurs, où en est ta carrière, Amanda ? » Elle devait certainement s'imaginer qu'Amanda était reléguée au second plan mais malheureusement pour elle ce n'était pas le cas. « Si tu veux tout savoir, elle se porte à merveille. Je pourrais t'offrir des billets pour mon prochain ballet si tu veux... Et toi tu en es où? Toujours serveuse? » Elle l'avait cherché, elle l'avait trouvé. Alors qu'Amanda commençait à ressentir de l'empathie pour sa soeur, il fallait que celle-ci lui donne le bâton pour se faire battre...

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« Pourquoi c'est si dur d'accepter que j'ai été choisi sans l'intervention de personne? » C'était incroyable ce qu'elle pouvait être stupide quand elle s'y mettait. Il ne fallait pourtant pas chercher bien loin, et même si moi j'avais les yeux bien ouverts sur ce qui avait pu se passer des années auparavant, j'avais dû mal à croire qu'Amanda vivait autant dans le déni. Et moi, je commençais à perdre patience, je n'avais pas envie d'attendre qu'elle se réveille pour comprendre que sa vie était un mensonge comme la mienne avait pu l'être. « Parce que c'est impossible ! Réfléchis, Amanda. Nous avons suivi les mêmes cours, eu le même parcours. Il n'y aurait pas dû y avoir de différences entre nous deux. » Je mettais de côté la bataille sans issue, celle de lui faire comprendre que j'étais sûrement la meilleure des deux dans le domaine pour finalement admettre que ma petite soeur avait été au moins tout aussi douée que je l'étais. Et quand bien même cela ait été vrai, nos chorégraphies, nos techniques, tout était identique. Personne n'aurait pu faire la différence, à moins que l'on ait généreusement été payé pour. « Mais tu sais, cette vie s'est pas toujours le rêve, ça demande beaucoup de sacrifices... » Elle me faisait vraiment rire, parce qu'elle était vraiment drôle ou bien parce qu'il valait mieux en rire pleurer, ça je ne le savais pas. La danse, un sacrifice ? Amanda avait toujours eu tout ce qu'elle voulait. Et je l'admettais avec difficulté mais elle avait également eu tout ce que j'avais toujours voulu. Et malgré tout ça, ce n'était pas sufisant ? Il fallait m'expliquer, même si elle semblait vouloir faire planer le mystère. Finalement, non, ça ne m'intéressait pas non plus. « Fais-moi rire. Ose me dire que ta vie n'a pas été parfaite, ose me dire que tu n'en as pas eu assez. Prendre le métro, tu parles d'un sacrifice. » Elle était vraiment incroyable, d'oser dire que ça ne lui était pas suffisant. Qu'est-ce qu'elle voulait de plus, une alliance en diamant, une maison de vacances au bord de la plage ? Elle avait déjà eu tout ça. Tout ça, et plus encore. « Si tu veux tout savoir, elle se porte à merveille. Je pourrais t'offrir des billets pour mon prochain ballet si tu veux... Et toi tu en es où? Toujours serveuse? » Elle avait osé. Je n'en revenais toujours pas, et pourtant, elle avait osé. Me rabaisser comme ça, si facilement. Remarquez, l'art de la méchanceté avait toujours été inné chez Amanda. Je n'en étais pas à ma première expérience. Le Hogan, certainement la seule chose sur laquelle elle aurait pu nous comparer. Ma sortie de secours quand la danse n'avait pas marché. Je n'avais pas honte de mon boulot de serveuse, mais il fallait dire que je n'avais pas cherché bien loin avant d'accepter le job. Mais au moins, ça permettait de payer les factures et c'est tout ce qui m'importait à présent. Tâchant tout de même de faire bonne figure - l'éducation à la Swayer-Hawkes me servait au moins à quelque chose - j'évitais de m'emporter alors que tout ce dont je rêvais c'était la gifler. « A merveille, c'est gentil de t'en inquiéter. Et d'ailleurs, toi et ton mari pourriez peut-être passer nous rendre visite, un de ces jours. Oh, j'oubliais ; il est mort. » Lancée sur la route sinueuse qu'on avait toujours empruntée, elle et moi, celle des mensonges et des coups-bas, j'avais l'impression qu'aujourd'hui n'échapperait sans doute pas à la règle. Il fallait croire que rien ne serait terminé jusqu'à ce que l'une de nous deux soit complètement détruite, mais s'il fallait en arriver là pour qu'elle arrête enfin, j'étais prête à prendre le risque.

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Amanda ne voulait pas entendre plus de sous-entendus de sa soeur Andie. Elle comprenait qu'elle lui en veuille mais tout de même il y avait des limites. « Parce que c'est impossible ! Réfléchis, Amanda. Nous avons suivi les mêmes cours, eu le même parcours. Il n'y aurait pas dû y avoir de différences entre nous deux. » Bon au moins, elle semblait accepter le fait qu'elles avaient le même niveau. En même temps, ça devait certainement être le cas vu qu'elles avaient suivi exactement les mêmes entraînements, pendant la même période, avec la même professeur. Mais Amanda n'allait pas donner dans le jeu de sa soeur et allait rajouter de l'huile sur le feu en laissant des petites piques. « Alors peut être qu'ils ont choisi la plus belle, ou la plus gracieuse, ou la plus jeune! De toute façon ça change quoi? Ce qui est fait est fait, alors arrêtes avec ta jalousie maladive ça te va mal au teint. » Amanda savait que sa soeur n'aimerait pas du tout ce qu'elle venait de dire mais elle avait eu tellement envie de rabattre le caquet de sa soeur qu'elle n'avait pu s'en empêcher.
Par la suite, quand Amanda évoqua le fait que sa vie n'était pas aussi rose que ce qu'elle pensait, Andie lui rit au nez. « Fais-moi rire. Ose me dire que ta vie n'a pas été parfaite, ose me dire que tu n'en as pas eu assez. Prendre le métro, tu parles d'un sacrifice. » Amanda lui lançait alors un regard noir. « Crois ce qui t'aide à mieux dormir le soir... » Amanda ne voulait pas poursuivre sur cette voie, elle ne voulait pas avouer à Andie que la vie qu'elle avait n'était pas aussi fantastique que ce qu'elle croyait plus petite. Elle n'avait pas de relation stable, n'avait presque pas d'amis, presque pas de temps libre, sa vie tournait uniquement autour de la danse.
Lorsqu'elle avait lancé une pique sur son travail de serveuse, Amanda savait qu'Andie tenterait de faire bonne figure et lui porterait certainement un coup bas mais elle s'attendait pas à un coup aussi bas de sa part. « A merveille, c'est gentil de t'en inquiéter. Et d'ailleurs, toi et ton mari pourriez peut-être passer nous rendre visite, un de ces jours. Oh, j'oubliais ; il est mort. » Sur le coup, Amanda était tellement choquée qu'elle en resta bouche bée. Elle lui aurait bien fait le coup des larmes pour la faire se sentir mal mais elle n'avait pas envie de se mettre à pleurer en public. « Tu veux quoi Andie? Que j'avoue que j'ai raté ma vie, que je suis tellement nuisible que mon mari en est mort, que je suis qu'une fille à papa qui a réussi uniquement grâce à lui, que je suis une femme vénale qui ne veut pas se mélanger au reste du monde? Vas-y dis moi, je serais fixée au moins... »

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« Alors peut être qu'ils ont choisi la plus belle, ou la plus gracieuse, ou la plus jeune! De toute façon ça change quoi? Ce qui est fait est fait, alors arrêtes avec ta jalousie maladive ça te va mal au teint. » Evidemment, Amanda avait toujours un plan de secours, avait toujours quelque chose à redire sur un sujet dont on avait déjà fait le tour des milliers de fois. Et pourtant, au fond je devais bien admettre qu'une part de ce qu'elle disait était sans doute vrai. Ou à défaut de l'être, l'était au moins pour moi. Depuis ce jour où j'avais vu ma vie s'écrouler j'avais toujours pensé que ça avait été pour quelque chose que je n'aurais pas pu changer. Parce que j'aurais pu m'entraîner des heures et des heures, jour et nuit s'il l'aurait fallu, ça n'aurait rien changé : Amanda aurait toujours été celle qui avait été choisir et j'aurais toujours été celle qu'on avait laissé de côté. Je pensais que c'était pour des caractéristiques que je n'aurais pas pu changer : la beauté, la grâce, la jeunesse. Pourtant à l'évocation de ce sujet, les larmes menaçaient et je tentais tant bien que mal de cacher mon expression déstabilisée. La dernière chose que je voulais c'était de me mettre à pleurer devant elle, parce qu'elle aurait alors tout gagné. « Tu veux quoi Andie? Que j'avoue que j'ai raté ma vie, que je suis tellement nuisible que mon mari en est mort, que je suis qu'une fille à papa qui a réussi uniquement grâce à lui, que je suis une femme vénale qui ne veut pas se mélanger au reste du monde? Vas-y dis moi, je serais fixée au moins... » C'était un début. Et même si Amanda semblait tout aussi agacée que moi, ça ne me suffisait pas. J'ignorais pourquoi elle avait choisi Montsimpa plutôt qu'une autre ville, alors qu'à l'évidence elle avait l'embarras du choix. Mais il avait fallu qu'elle pose ses bagages ici, dans cette ville, dans ma ville. Il avait fallu que je m'habitue à la croiser de temps à autres, alors que j'avais justement quitté l'Australie pour m'éloigner d'elle, de mes parents, de tout. Mais il fallait croire que l'autre bout de la planète n'était toujours pas assez loin pour les Sawyer-Hawkes. Ils étaient capable de retourner ciel et terre pour obtenir ce qu'ils voulaient, si en l’occurrence, ce qu'ils voulaient était me pourrir la vie. « Depuis quand tu te soucies de ce que je pense ? T'as passé toute ta vie à m'ignorer, à faire en sorte que tout le monde t'admire, à n'importe quel prix, je ne vois pas pourquoi ça changerait aujourd'hui. D'ailleurs, tu t'es plutôt bien débrouillée, à t'installer dans la seule ville au monde où je ne voulais pas que tu sois, pour me foutre à nouveau ton succès à la gueule. Et bien voilà, Amanda, tu as gagné. Tu peux retourner à tes occupations et me laisser tranquille maintenant. » Blasée et vidée de toute l'énergie qui me restait, je décidais de descendre du métro pour finir le trajet à pied. Tout était bon à prendre pour ne plus voir le visage rayonnant de succès et de réussite d'Amanda, de toute façon.

❝ ANDIE & AMANDA ❞

© Loon

Andie commençait sérieusement à taper sur le système d"Amanda. Entre le fait qu'elle insinuait que c'est à son père qu'Amanda devait toute sa réussite et le fait qu'elle mette le sujet de son mari sur le tapis, Amanda s'imaginait l'étrangler. Seulement elles étaient dans un métro bondé et si elle se mettait à étrangler sa soeur cela ne le ferait vraiment pas. Parce que 1 les gens allaient la prendre pour une folle, 2 il y aurait bien quelqu'un pour l'interrompre et 3 si jamais quelqu'un prenait une photo ça allait faire les choux gras des magazines à scandales. C'est ça quand on est une célébrité, on est sans cesse obligé de se contrôler pour éviter de se faire prendre en photo en mauvaise posture. Amanda réussissait plutôt bien dans la matière mais elle en avait parfois mal de devoir toujours se contrôler. Parfois elle aimerait pouvoir totalement se lâcher pendant une journée. Elle ne sait pas ce qu'elle ferait si elle en avait l'occasion mais elle mourrait d'envie de savoir ce que ça faisait... « Depuis quand tu te soucies de ce que je pense ? T'as passé toute ta vie à m'ignorer, à faire en sorte que tout le monde t'admire, à n'importe quel prix, je ne vois pas pourquoi ça changerait aujourd'hui. D'ailleurs, tu t'es plutôt bien débrouillée, à t'installer dans la seule ville au monde où je ne voulais pas que tu sois, pour me foutre à nouveau ton succès à la gueule. Et bien voilà, Amanda, tu as gagné. Tu peux retourner à tes occupations et me laisser tranquille maintenant. » A ces mots, Amanda comprit que sa soeur avait bien plu souffert qu'elle n'avait pu l'imaginer. Elle avait dû se sentir totalement abandonnée et délaissée. Je me rendais compte que pendant que moi je vivais la vie dont elle avait toujours rêvé, elle restait sur le côté et se retrouvait seule. Alors que je prenais enfin confiance du mal que j'avais pu lui faire, le métro arriva à la station suivante et Andie descendit sans un au revoir ou quelque chose du genre. Après une seconde d'hésitation je lui emboîtais le pas et alors qu'elle commençait à marcher en direction de l'escalier pour sortir de la station de métro, je me stoppais et parlais assez fort pour qu'elle m'entende de là où elle était. « Non, j'ai pas gagné Andie! J'ai peut être une carrière de rêve mais après j'ai rien. Je n'ai presque pas d'amis, mon mari est mort, quand je rentre chez moi personne ne m'attend. Et surtout j'ai perdu ma soeur dans toute cette histoire... » J'espérais au moins qu'elle se retournerait pour me répondre quelque chose même si c'était pour encore cracher du venin je préférais ça plutôt que son indifférence.

amandie; the perfect family tree

A peine sortie du métro, il fallait que je m'occupe, que je fasse quelque chose. N'importe quoi. Cette rencontre avec Amanda m'avait atteinte et j'allais passer le reste de la soirée nerveuse, agitée, à retourner le problème dans tous les sens. Le problème, d'ailleurs, était toujours le même. Il n'avait pas changé depuis que j'avais quitté le domicile familial, depuis que j'avais croisé Amanda un beau matin dans Montsimpa. Et pourtant il m'atteignait à chaque fois de la même façon. A force, je ne savais même plus qui était le véritable problème de nous deux. C'était peut-être moi, incapable de me remettre de cette audition même s'il semblait qu'une vie était passée entre temps. C'était peut-être elle, elle qui n'avait pas changé depuis tout ce temps, qui revenait me hanter pour son plus grand plaisir. Peut-être que c'était simplement nous, nous et notre relation dysfonctionnelle, nous, incapables de s'entendre. Mais quelque chose n'était pas normal, ce même quelque chose qui m'empêchait à chaque fois de passer au-dessus de tout ça, d'oublier. De pardonner. C'était tellement plus simple de la détester, de l'accuser de tout ce qui n'allait pas dans ma vie. Alors qu'elle n'avait peut-être pas tous les tords. Cette histoire était si vieille maintenant, ça me semblait stupide de rester coincée dans le passé, de ne pas pouvoir avancer. Et pourtant, j'avais l'impression de ne rien savoir faire d'autre, d'être condamnée à ressasser encore et encore. Il fallait dire que la présence d'Amanda dans cette ville, qui semblait être là partout où j'allais, n'aidait pas beaucoup à oublier. Et son attitude, ce même comportement hautain et provocateur qu'elle gardait depuis petite déjà faisait ressortir ces vieilles pulsions meurtrières. Et pourtant quand je pense en avoir terminé une bonne fois pour toute, quand je m'apprête à faire une croix définitive sur ce qu'était notre famille, j'entends la voix d'Amanda qui m'interpelle dans les couloirs du métro déserts. « Non, j'ai pas gagné Andie! J'ai peut être une carrière de rêve mais après j'ai rien. Je n'ai presque pas d'amis, mon mari est mort, quand je rentre chez moi personne ne m'attend. Et surtout j'ai perdu ma soeur dans toute cette histoire... » Je stoppe ma course et finis par me retourner vers elle. Est-ce qu'elle a encore besoin de se justifier après tout ce temps ? Pourtant je réalise qu'elle a raison. A la fin de la journée, elle est seule. Elle a ce que je n'ai pas, et inversement. Elle a une carrière. J'ai Cooper, Olive, et tout le monde. Et pourtant il semblerait qu'on ait encore quelque chose en commun après tout. Elle a perdu sa soeur, j'ai perdu la mienne aussi. Et qu'est-ce qu'on fait maintenant ? « J'ai perdu la mienne aussi, Amanda. » Alors tant pis si je suis à deux doigts de pleurer, tant pis si pour elle ce n'est qu'un jeu. Parce qu'encore une fois, elle touche là où ça fait mal, là où on ne veut plus s'aventurer parce qu'on ne sait pas ce qui nous y attend. Je ne veux plus me battre.