Silence. Halètement. Chaleur. Tenter de garder le contrôle de soi. Se donner de plus en plus, pour pouvoir se sentir libre, mieux dans sa manière d'être. Depuis quelques mois, plus exactement depuis son départ de Montsimpa, Colleen s'était sentie mieux en découvrant le plaisir du sport. Assez régulièrement, parfois même tous les jours, elle courait, . Elle se plaisait à tenter d'être athlétique, de rester en forme. Elle se sentait complètement libérée, ne dépendant plus du tout de l'acceptation des autres dans leur société, dans leur monde, ce monde de la nuit qui lui plaisait tant. Jamais elle ne pourrait être contre ce monde, il lui plaisait, mais elle avait besoin d'une parenthèse au milieu de ça, de manière régulière. Alors, ce jour-là, elle était venue dans le gymnase de la ville pour s'entraîner, tenter de gagner en endurance, en souffle et en vitesse. Elle y tenait, c'était un but qui l'aidait à se sentir mieux, un plus qu'elle ajoutait à ce quotidien qu'elle reprenait peu à peu. Elle commença par s'échauffer, s'étirer. Elle fit une petite série d'abdos, histoire de se mettre en conditions. Ses cheveux blonds étaient attachés en une haute queue de cheval, lui permettant ainsi une nuque aérée. Son haut était un de ses débardeurs que l'on trouve fait spécialement pour le sport, auquel s'ajoutait un pantacourt. Il ne faisait certes pas très chaud en ce moment, mais elle ne comptait pas laisser le froid l'atteindre. Elle se dépenserait jusqu'à sentir la chaleur abattre la douceur hivernale, et l'entourer de ses bras comme une protection contre les douleurs. Elle se sentait déjà bien. Elle était elle-même, plus que jamais. Alors quand elle vit une silhouette féminine arriver, elle ne put s'empêcher de la regarder, voulant savoir qui entrait dans son domaine. Elle la regarda de haut en bas, et lui dit alors, d'un air fortement provocateur et méchant, d'un air colleenien quoi "- Vous aviez perdu le chemin pour venir ici ces derniers temps vous, non ?" La jeune femme face à elle n'avait pourtant rien qui pouvait laisser penser à un quelconque laisser aller, mais Colleen cherchait juste un point d'attaque pour rester seule dans la pièce et mieux se concentrer.

Je savais bien que je finirais bien, un jour, par utiliser ce magnifique haut et ce pantalon de survêtement incroyable. Je les ai acheté il y a deux mois, je les trouvais super beaux, et en plus, c’était en promotion, du Stella McCartney quand même ! Je ne pouvais pas laisser filer l’occasion. Lorsque la vendeuse me les a donné, ça ne m’a traversé l’esprit, que je ne faisais jamais de sport, à par du sport des doigts en tapant sur mon ordinateur, mais ça m’étonnerait que j’ai besoin d’une tenue spéciale pour ça, un pyjama me suffit. J’avais mis mes achats au fond de mon placard entre une raquette de tennis blanche à tomber à la renverse – encore dans son emballage – et une paire de chaussures dont un talon est cassé – un jour je m’étais dit que je la réparerais.

J’ai décidé de ressortir ces choses du placard, pour écouter, au moins une fois les conseils de ma mère, qui m’avait dit, l’autre jour – il y a six mois – que je devais me mettre au sport. Mais je crois que ce qui m’a réellement décidé c’est le coup de fil de ma sœur hier. Elle habite à Los Angeles avec son mari – oui elle a un mari, et moi je suis encore célibataire, pourquoi ? Quel monde cruel – qui est un chanteur ultra-célèbre dont je terrais le nom. Bonnie vit dans une maison de deux milles mètres carrés, dit bonjour à Angelina Jolie, Brad Pitt et leur quatre-vingt mille enfants comme moi je parle à la caissière du supermarché. Je suis quand même pas mal jalouse d’elle. Ma sœur a tout, en plus d’être jolie et sympa’, c’est la chouchoute des stars, son mari est juste le mec le plus parfait du monde – enfin je ne lui ai pas beaucoup parlé mais il a l’air super sympa et terriblement sexy – et moi je vis dans un appartement de deux mètres sur trois, je travaille au noir comme webmaster de sites pornos, histoire de me payer des fringues que je ne mettrais sans doute jamais, et j’ai un banquier que je préfère ne jamais rencontrer, sinon je pourrais me faire trucider sur place.

Du coup après cette conversation je me suis dit que j’allais me mettre au sport. Je me rend au gymnase de Montsimpa – autant faire sa bien et pas un jogging sur le trottoir. En arrivant je remarque que je ne suis pas la seule, une autre fille est là, en train de s’entraîner. Etre sociable n’est pas vraiment mon truc, mais bon, heureusement pas besoin de parler. Je n’ai rien dit qu’elle commence à me faire remarquer, avec un ton pas sympa du tout que je suis grosse ou en tout cas que la salle de sport ne doit pas être l’itinéraire favori de mon GPS. Mais elle se prend pour qui la blondasse, qu’elle commence pas à me chauffer sinon je vais lui fourrer sa queue de cheval dans la bouche, elle fera moins la maligne. Je ne fais peut être pas de sport, mais les magasins en période de solde, croyez-moi ça renforce les muscles ! « ferme-là, j’t’ai rien demandé alors va raconter ta merde ailleurs ! »


hj : désolé du retard

Le dépassement de soi-même constituait quelque chose d'essentiel à toute existence. Ne jamais essayer de dépasser ses propres limites menait à une défaite, à un abandon trop rapide. Se dépasser permettait des sensations nouvelles, une découverte de ce que nous semblions si bien connaître et amenait un nouveau goût à la vie. Colleen avait découvert tout cela dans le sport quelques semaines en arrière, tandis qu'elle avait quitté Montsimpa. Tandis qu'elle s'échauffait tranquillement dans cette salle spécialement aménagée pour les sportifs, autant ceux du travail que du plaisir, ses pensées s'éloignaient. Un brouillard tombait dans les quelques mètres qui entouraient son esprit. Enfoncée dans cet épais nuage, elle se perdait entre silence et réflexion sur ces actes passés. Il ne s'agissait aucunement de bilan, à retracer le bon et moins bon de ses actions, mais juste à se rappeler les moments qui avaient su rythmer sa vie et la rendre si savoureuse chaque jour. Elle aimait sa vie. Elle aimait ne pas savoir ce qui allait avoir lieu le lendemain, ne pas savoir ce qui pouvait l'attendre, ne pas savoir qui serait son prochain cavalier d'une nuit. Elle se plaisait dans cette vie qu'elle s'était bâtie au fil des années, au grand désespoir de ses parents. Chaque idée intégrant sa tête était une force qui s'ajoutait dans chacun de ses gestes. Elle revivait, elle sentait l'air qui envahissait ses poumons, parfois avec difficulté, lui faisant ressentir cette douleur si douce qu'était la vie. Puis le brouillard s'estompa, soudainement. Elle quittait cette zone d'obscurité pour retrouver la réalité et le décor qui l'entouraient. En effet, une jeune femme était rentrée dans la salle pour s'entraîner elle aussi. L'instinct de chasseuse se réveillait, cette proie semblait parfaite : une motivation assez moyenne, une ligne pas très parfaite. La pique était envoyée, mais la réponse n'était pas du tout sous le coup de l'humour, bien au contraire. Notre blonde s'arrêta quelques instants dans ses efforts pour mieux rire de la réaction que la jeune femme avait eu. "- C'est que j'ai touché le point faible apparemment... ça ne m'étonne même pas !" Elle rit encore quelques petites secondes avant de se remettre assidûment à ses étirements.

Je n’aime pas quand on me provoque sans raison, quand la violence verbale est gratuite. Alors oui, je peux passer pour une excitée qui n’accepte pas qu’on parle d’elle, mais je déteste surtout l’intolérance ! J’arrive, je ne lui ai rien demandé, je n’avais même pas prévu de lui parler, de la regarder ou d’avoir un quelconque contact avec elle, et voilà qu’elle me sort une phrase faisant allusion à mon poids, qui bien qu’il soit quelque peu supérieur à d’habitude ne dépasse pas non plus la normale. Cette fille doit être une chieuse, elle ne doit avoir que pour elle son physique, oui moi aussi quand je veux, je peux juger au premier regard même si je n’aime pas ça. Je n’aime pas quand les gens me jugent sans me connaître, alors je ne le fais pas avec les autres, à part quand on m’énerve, comme là. Je lui réplique donc de dégager ou d’arrêter sous peine de se voir infliger une belle bonne baffe ! Je suis du genre à démarrer au quart de tour lorsqu’on me provoque, je suis comme ça, pas spécialement calme quand on m’attaque, je suis un peu du genre excitée et excessive. Quand je regarde le sport, c’est à dire à peu près à chaque fois qu’il y en a la télé, je suis à fond dedans, je peux pleurer à la fin d’un match de hockey sur glace alors que je ne sais même pas qui sont les équipes qui se rencontrent ni qu’elles en sont les règles. Le sport est plus un passe temps qu’une passion, je le regarde, certes souvent, mais je n’en fais pas réellement . Un épisode de série, une programmation, un événement geek, les soldes ou la fashion week, passe avant le sport ! « C'est que j'ai touché le point faible apparemment... ça ne m'étonne même pas ! » un point faible ? Nan mais elle rigole là ! J’ai des tas de points faibles, je m’en rends compte : mon banquier, mes dettes, le shoping, le chocolat, les connards intellectuels, et j’en passe ! Mais alors le sport, il y a bien pire, il ne faut pas qu’elle croit que c’est parce qu’elle m’a sous entendu que j’étais grosse que je me suis énervée. Elle aurait très bien pu parler de mes cheveux ou encore de ma tenue qui date de la saison dernière ! « pas du tout, j’aime juste pas le violence gratuite, mais te foutre des gens n’a pas l’air de te perturber ! »

La provocation avait toujours été une des clés du comportement de Colleen. La provocation, la méchanceté gratuite, son côté bad girl. Tout cela était ce qui attiraient chaque homme dans son lit. Son côté femme indépendante, son côté forte et n'ayant pas besoin de tendresse mais d'être habitée par la passion d'une unique nuit. Ils l'aimaient pour ça. Et elle se sentait bien dans cette vie. Dans ce caractère. Dans cette habitude. Dans ce corps. Elle s'était formée au fil du temps une force incroyable que beaucoup lui enviait. Ou plutôt qui menait beaucoup à la détester. Tant pis, elle s'en fichait. Elle avait toujours aimé ce bon vieux dicton qui disait qu'il valait mieux être seule que mal accompagnée. Sa devise. La phrase qui lui correspondait le mieux. Ne jamais se sentir trahie passait par ne jamais faire confiance. Rares étaient ses amis, ceux pour qui elle pouvait être prête à faire des efforts dans l'idée de les aider. Cette fille-là qui venait de rentrer dans la salle ne lui inspirait qu'une envie de rire. Probablement la couleur de ses cheveux, certes, mais surtout sa démotivation. Il n'y avait rien de plus amusant que de détruire le dernier élan de motivation d'une personne qui vient en salle de sport pour soigner son apparence, là où cette dernière avait été négligée pendant longtemps. Une petite pique sur le poids avait mené à une réponse sanglante qui avait beaucoup amusé notre blonde qui n'en demandait pas tant. Elle avait ainsi continué sur sa lancée dans un rire spontané et bien moqueur qui avait trouvé comme réponse une bien gentille remarque reprenant Colleen sur sa mauvaise action. Cette dernière fit une petite moue. "- Oh pardon maman, je ne voulais pas être méchante, pardon. Je ne devrais pas utiliser une telle violence qu'est une simple petite phrase Un rire moqueur revint aussitôt envahir chacun de ses traits tandis qu'elle rajouta Ah non, ça ne me dérange absolument pas, j'aime bien même ! Et encore plus quand les gens réagissent aussi naïvement que toi !" Elle se lança alors dans une série d'abdos sans adresser un nouveau regard à sa proie. Elle ne quittait pas de son esprit l'idée d'une suite à ce petit épisode, imaginant comment bien la déranger. Cela semblait tellement simple de lui mettre les nerfs en pelote et de heurter sa petite sensibilité. Il ne fallait rien de plus pour animer l'esprit malveillant de notre blonde préférée.

Que faire ? Partir ? Non je ne suis pas lâche, je ne vais pas la laisser gagner, surtout pas, je ne veux pas qu’elle pense que je suis une faible qui à la première difficulté baisse les bras, je ne veux pas me faire persécuter comme autrefois. Je me souviens. A l’époque j’étais, comment dire, plus grosse, il faut être honnête, je m’empifrais de tas de bonbons, chips, gâteaux, je buvais du coca, enfin une américaine moyenne quoi. Je devais avoir douze ans, je n’étais pas une grande intellectuelle – je ne le suis toujours pas, loin de là – et Ryan Mallory, et sa sœur, la terrible Patty Mallory, m’ont pas « embêté », non, ils m’ont fait souffrir pendant deux ans, deux années durant lesquels ils étaient soutenus par tout le monde, bien que les autres ne m’aient jamais rien fait. Je me souviens de chaque chose qu’ils m’ont fait ! C’est pourquoi, après être partis dans une autre école, pendant les vacances, j’ai fait un régime drastique, très efficace moins trente kilos, bon j’en ai repris cinq mais bon. Je me suis teints les cheveux, j’ai commencé à me maquiller à mettre des robes, et je me suis faite appeler par mon second prénom : Pepper-Jane. Oui parce que avant c’était Madison-Joey, ce qui les faisaient beaucoup rire. Je les ai retrouvés l’année d’après, ils ne faisaient pas les fier, ils ne me reconnaissaient pas, j’ai réussi à retourner tout le monde contre eux, et maintenant ils ne sont que de petits fonctionnaires miteux ! Je ne suis pas peur fière de moi sur ce coup là. Alors je ne vais sûrement pas me laisser faire par une fille qui se croit supérieur et qui balance n’importe quelle insulte qui lui passe par la tête ! « naïvement ? Je réagis naïvement ? Tu peux bien penser c’que tu veux, c’est pas comme-ci ton avis m’importe, tu ne vaux pas mieux que les autres ! » elle vaut même moins, que ceux qui valent rien, c’est dire, elle est six pieds sous terre dans mon esprit, je n’ai plus envie de lui parler, plus envie de perdre avec des histoires de gamines blondes !

La querelle commençait souvent d'un rien. Quelques petites brindilles auxquelles on tentait de mettre le feu pour nous réchauffer un peu. Mais parfois, on ne contrôlait vite plus rien, on voyait les flammes grandir, et nous nous brûlions vainement pour avoir joué aux aventureux. Colleen aimait jouer avec le jeu. Il était assez rare qu'elle se brûlait, mais cela ne la dérangeait même pas. Elle aimait avoir des adversaires à sa taille, et si cela signifiait les laisser gagner grâce à leur repartie, grand bien leur fasse. Mais là, le feu semblait prendre mais par étincelle. Rien de bien grand, rien de bien brûlant, juste un petit feu bien tranquille auprès duquel on approche les mains pour ne plus avoir froid. Il n'y avait pour Colleen rien de mieux que l'agressivité et la méchanceté pour enlever l'ennui et le calme qui pouvaient parfois marquer l'atmosphère qui l'entourait. Elle s'était ouvertement moqué de cette jeune femme qui était arrivée, mais les réponses lui semblèrent banales. Vaine tentative de remettre à sa place la personne même qui ne manquait pas de confiance en elle. Essaye encore. Elle continuait de s'entraîner par intermittence pour faire comprendre que c'était elle qui dominait largement le débat. "- Que les autres ? Mais il n'y a personne ici !" petit silence marqué d'un regard appuyé qui signifiait que cette réplique n'avait été que moquerie et non pas réel manque de compréhension "- Ah, tu veux dire que je suis aussi mauvaise que l'humanité toute entière et que seule toi nous sauve du mal incarné ! Ohhhh, sauve-nous, oh mon dieu !" Elle ne se gênait aucunement pour blasphémer et se moquer encore davantage de cette jeune femme qui lui servait d'adversaire temporaire. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentait que malgré tout, la jeune femme ne se laisserait pas complètement faire. Impression ou réalité ? Elle se délectait, telle la journaliste spectatrice d'un navet, de voir à quel point la suite serait mauvaise pour pouvoir encore mieux le critiquer à coups de mots violents.

Je m’enfonce, je crois vraiment que je m’enfonce. A quoi bon discuter avec elle, elle voudra toujours avoir le dernier mot et moi aussi, cette embrouille d’adolescent pourrait durer des heures. Et je n’ai pas envie de me disputer avec une inconnue sur un sujet à la con alors que je pourrais faire des choses bien plus intéressantes, comme du shopping, ou aller sur internent, programmer. Ma mâchoire fait plus de sport que des jambes, ce n’est pas normal, pas normal du tout. J’étais venue ici pour me vider la tête, avoir bonne conscience parce que je prends soin de mon corps, au lieu de ça je m’embrouille avec une biatch ! Je n’aurais qu’à dire à Bonnie que je n’ai pas pu faire de sport parce que je me suis disputé avec quelqu’un à la salle de sport ? Mauvaise idée, soit elle va me répondre que j’invente tout – faut dire qu’elle est au courant que je raconte n’importe quoi à mon banquier pour ne pas payer mes dettes – soit elle va me dire que je ne suis pas obligée d’aller au gymnase pour faire du sport, je peux très bien en faire chez moi – même si je risque de péter quelques trucs vu comment c’est petit – ou dehors, au parc, enfin bref ailleurs, soit qu’elle va le dire à maman – l’argument que je déteste le plus. Même si c’est ma petite sœur j’ai l’impression parfois qu’elle est plus vieille que moi, elle est mature, mariée, sûrement enceinte, il faudrait que je lui demande, et moi je suis gamine, célibataire, et malgré mon petit ventre pas enceinte du tout ! « Que les autres ? Mais il n'y a personne ici ! » mais elle va pas la fermer celle-là, elle peut pas juste rien dire pendant genre, dix secondes ? Ça doit être trop dure pour elle, je plains ses amis, si seulement elle en a, ce qui n’est pas sure, les mecs doivent la draguer parce qu’elle est blonde, enfin remarquez, les hommes sont attirés par les connasses, elle doit avoir une horde de mecs à ses pieds, la salope ! « Ah, tu veux dire que je suis aussi mauvaise que l'humanité toute entière et que seule toi nous sauve du mal incarné ! Ohhhh, sauve-nous, oh mon dieu ! » comme ci j’étais du genre égocentrique, elle sûrement, mais moi non, enfin j’espère, sinon je crains vraiment le pâté ! « t’es conne naturellement ou tu prends des cours du soir ? Personnellement je penche pour la première possibilité, bien plus réaliste ! »

La patience était reine chez pas mal de gens. Dans cette société, beaucoup s'étaient habitués à tout chercher par eux-mêmes, à ne rien attendre des autres. La patience et la maîtrise de soi étaient vraiment importantes pour pouvoir affronter un quelconque adversaire, quelle que soit la situation. Il s'agissait de serrer les dents. Ou de répliquer plus fort. Ou d'habilement retourner l'attaque. Mais il y en avait qui ne réussissait pas. Beaucoup en réalité. Ceux qui n'avaient jamais eu l'habitude de se mesurer à quelqu'un. Ou ceux qui n'étaient pas en humeur de le faire. Colleen aimait jouer avec tous les types d'adversaire et se plaisait à tous les réduire en miette un par un. Cette jeune femme venue tout droit de nulle part pour faire du sport dans la même salle qu'elle était une adversaire idéale. En effet, celle-ci avait d'abord semblé rester plutôt calme, donnant encore plus de hargne à notre blonde qui voulait à tout prix prendre l'ascendant de cette bataille qu'elle avait entamé. Alors, elle avait enchaîné les piques, toutes plus violentes les unes que les autres, espérant atteindre cette femme qui semblait néanmoins assez vulnérable. Puis, alors qu'elle commençait presque à désespérer, la tempête sembla enfin s'amorcer, quelques insultes commençant à pimenter l'air. Le rire de Colleen éclata encore plus fortement que précédemment et elle mit quelques secondes avant de redevenir sérieuse. "- Non pas de cours du soir, tu ne me les as pas accordé, tu ne me jugeais pas assez douée pour ta matière, alors j'ai appris par moi-même !" Elle leva les yeux au ciel avant de continuer "- Non mais sérieusement, tu crois m'atteindre en me traitant de conne ? Ahlalala, y a sérieusement mieux comme réplique ma p'tite, mais bon, j'comprends, tu as appris à être une gentille fifille, qui est toujours calme, et qui même parfois s'empiffre. Bien sûr, cela se poursuit jusqu'à la réfléxion "pourquoi je suis seule ?" alors qu'au fond, on sait tous pourquoi !" Les remarques les plus mauvaises semblaient ne même pas encore avoir été lancées... Colleen s'échauffait seulement, et elle s'amusait déjà plutôt bien.

Je suis impulsive parfois, je me laisse souvent mener par le bout du nez dans une dispute, pour finalement céder et perdre, j’ai l’habitude. Mais là, il faut que je pense autrement, que je pense à quelque chose dans lesquelles je gagne : les jeux vidéos. Oui sûrement, mais ce n’est pas en lui disant que je suis mage de niveau quatre-vingt-quatre sur wow que je vais arriver à la battre. Pensons shopping ! Et surtout soldes, le moment où toutes les femmes sortent les griffes, moi y compris, pour obtenir cette superbe paire de bottes prada soldée à oins cinquante pour cent. Je dois penser comme une guerrière de la carte de crédit si je veux avoir une chance de ne pas me faire humilier. Bon ça va, il n’y a personne, donc à moins qu’elle n’appelle la presse locale pour lui dire qu’il y a eu une dispute ente elle et moi, personne ne sera jamais au courant ! « Non pas de cours du soir, tu ne me les as pas accordé, tu ne me jugeais pas assez douée pour ta matière, alors j'ai appris par moi-même ! » bon ok ma phrase n’était pas non plus la plus originale du monde, ni la plus intelligente, mais elle, là, elle frise la débilité digne de big brother ! Je pense qu’elle aurait bien sa place dans une télé réalité, elle serait la fouteuse de merde que tout le monde déteste mais pour qui on vote quand même parce qu’on aime bien quand ça se crêpe de le chignon pour une histoire de table non débarrassée ou de beurre orienté vers le sud. C’est vrai, je ne lui ai rien fait, j’arrive pour faire du sport, elle me balance des vacheries, elle voulait juste pimenter un peu sa journée parce qu’elle était en manque de disputes comme un pervers en manque de sexe. « Non mais sérieusement, tu crois m'atteindre en me traitant de conne ? Ahlalala, y a sérieusement mieux comme réplique ma p'tite, mais bon, j'comprends, tu as appris à être une gentille fifille, qui est toujours calme, et qui même parfois s'empiffre. Bien sûr, cela se poursuit jusqu'à la réflexion "pourquoi je suis seule ?" alors qu'au fond, on sait tous pourquoi ! » euh …ok… une chose est sure elle fera pas psy, où je plains ses clients ! Je lui lance un sourire amusé, histoire de lui prouve que je m’en bas les cocotiers de ce qu’elle dit et qu’elle non plus ce n’est pas en me critiquant qu’elle arrivera à quoi que ce soit ! Je commence à m’étirer sans me soucier d’elle, en espérant qu’elle me lâche la grappe sinon je serais obligée de mettre mes écouteurs pour ne plus entendre ses conneries.

Parfois, il fallait savoir se taire, battre en retraite, dire qu'une bataille était terminée, qu'on soit vaincu ou non, de manière à redémarrer une autre bataille plus tard. Ce n'était jamais fini en réalité. Jamais. Colleen ne laissait jamais tomber. Elle avait laissé MJ aller commencer ses exercices sans répondre. Etait-ce une preuve qu'elle avait gagné ? Elle n'en savait rien. Peut-être était-ce l'inverse. Tout ce qu'elle savait était qu'elle n'attaquerait pas à nouveau. Ou du moins pas tout de suite. Elle tentait de calculer son coup, pour mieux lui tendre un piège et la surprendre quand elle ne s'y attendait pas. Ce plan-là démarrait par créer une peur, une paranoïa chez la jeune femme. Elle lui jetait donc des regards mesquins, emplis d'idées machiavéliques. Quelque chose se prépara, la lueur dans ses yeux le montrait. La malice modelant son visage était également une preuve. Elle pondait son plan au fil des secondes et ne tentait aucunement de s'en cacher, tandis qu'elle préparait son corps pour les activités physiques qu'elle s’apprêtait à faire. Les fils commençaient à se connecter, l'idée devenait florissante, seulement elle allait encore laisser la jeune femme tranquille pour qu'elle ne s'attende à rien... ou qu'elle se demande tellement ce qu'il allait se passer qu'elle serait sur le qui vive. Elle se leva doucement et se mit alors à faire le tour de la salle en courant, commençant donc les choses sérieuses, la raison de sa venue avait été de venir faire du sport après tout. Elle regardait la jeune femme assez régulièrement, tandis qu'elle continuait de s'échauffer. Son plan était bien là, la jeune femme aussi. Ne restait que le moment crucial où tout se mettrait en place, tout était bien prêt dans sa tête. La seule fois où elle s'arrêta fut pour se saisir de la bouteille d'eau qu'elle avait déposé et en boire quelques gorgées avant de reprendre tranquillement sa route en rasant quasiment les murs de la salle, faisant ainsi les plus grands tours possibles.

Spoiler:

La pièce était redevenu à peu près calme, enfin on entendait plus les bruits de fond assez pénibles. Je n’aime pas me disputer avec les gens, enfin, comme tout le monde ça m’arrive, d’ailleurs plus souvent que je le voudrais, mais je n’aime pas déclencher une dispute pour rien, on est pas à la télé ! Je n’aime surtout pas me disputer avec des inconnus, car après tout je ne les connais pas et je n’aime pas juger au premier regard. Je n’aime pas les stéréo-types, car j’en suis un exemple concret. J’ai les cheveux bleus, ce n’est pas pour autant que je suis une fan de Lady Gaga ou une folle complètement givrée – même si je dois bien avouer je suis pas mal folle des fois, mais bon, pas de quoi m’enfermer dans un asile ! L’inconnue tournait autour de moi, une bouteille d’eau à la main, elle n’avait rien ajouté et je trouvais ça bizarre. Je sais comment sont les femmes, elles ne baissent pas les bras, alors soit c’est une exception – ou une transsexuelle – soit elle prépare quelque chose. En tout cas ce n’est pas très discret, je me doute qu’elle ne va pas abandonner mais que va-t-elle faire ? Je m’attends à tout, je suis prête à rétorquer et à appeler la police, on ne sait jamais. Bien que je ne sois plus très copine avec eux depuis les soldes, l’hiver dernier. J’ai été arrêtée parce que j’allais en venir aux mains avec une femme qui voulait le même jean que moi à moins soixante-dix pour cent. Bon j’ai été relâchée assez vite, je crois qu’il en avait marre de moi, je sais comment faire pour qu’on me laisse tranquille, je n’ai qu’à parler, raconter ma vie et je saoule tout le monde, l’un des avantages d’être énervante, on peut éliminer par les paroles ceux que l’on aime pas ! Je continuais mes étirements tout en regardant du coin de l’œil ce quelle pouvait mijoter.

Les fils de la pensée étaient tissés d'un or transparent. Ils se cousaient, se liaient, et se forgeait en une armure qui permettait de lutter contre les maux de la vie. Le tissu de la vie était parfois plein de trous. L'univers, bien au delà d'internet, était fait d'une immense toile. Chacun tissait les liens avec les autres, chacun connectait sa vie à celle des autres. Mais tout naissait d'idées, de petites étincelles qui éclairent votre esprit. A cet instant précis, Colleen faisait de toutes pièces le scénario de ce qu'il allait se passer. Rien de bien méchant bien sûr, elle était machiavélique mais pas à ce point. Elle aimait embêter, mais aucunement détruire. Toute la première étape de son plan se basait sur le stress qu'elle apporterait à cette jeune femme aux cheveux bleus qui s'adonnait à ses étirements. Vu les réponses qu'elle recevait à ses regards, celle-ci se demandait quoi et semblait même s'inquiéter. Ce n'était que le début. Après une dizaine de minutes à courir, elle s'arrêta à nouveau. L'arrêt se marqua à nouveau par quelques gorgées d'eau, mais surtout par un retour à sa place initiale, avec un visage dont les traits semblaient représenter le démon lui-même. Puis, en quelques secondes, cela se transforma en un visage enfantin, presque angélique, qu'elle tourna vers la jeune bleune (mélange de blonde et bleu, c'est original non ?). D'un ton qui se voulait très amical, peut-être même trop, elle lui demanda alors "- Dis-moi, c'est quelle teinte de bleu exactement tes cheveux, parce que j'aimerais bien voir pour faire des mèches de la même manière ?" Vous pensez qu'elle a réfléchi et qu'elle est devenue gentille ? Bien sûr que c'est le cas ! C'est évident ! Oui, en fait non. Il ne s'agissait que d'un jeu qui se voulait encore plus déstabilisant pour sa comparse. Rien de tel que de jouer la déséquilibrée pour effrayer les gens, c'était la chose la plus simple qu'il soit de faire.

Elle s’avançait vers moi, je ne savais pas ce qu’elle voulait, je continuais à m’échauffer, faisant mine de ne pas la voir. Je n’ai pas du tout envie de discuter avec elle, ni me disputer, ni faire quoi que ce soit d’autre, je préfère l’oublier et ne plus la revoir, mais bon, Montsimpa est petit, espérons que nous ne fréquentons pas les mêmes endroits. Il faut croire que non, je ne l’avais jamais vu avant, alors soit elle vient juste d’arriver, et risque de se faire pas mal d’ennemis avec un caractère pareil – tout comme moi j’en ai – soit nous sommes différentes au point de ne jamais nous avoir rencontrées. A mon avis, elle n’a pas décidé de se montrer amicale et de me sourire juste pour qu’on devienne amis et pour avoir la paix. Je suis peut être naïve, mais pas à ce point, et surtout pas dans une bataille comme celle-ci. Oui parce que c’est une bataille, enfin je le prends comme ça, je dois penser comme une guerrière et être aussi manipulatrice qu’elle, même si je n’aime pas ça et que, il faut le dire, je ne suis vraiment pas douée pour manipuler les gens. « Dis-moi, c'est quelle teinte de bleu exactement tes cheveux, parce que j'aimerais bien voir pour faire des mèches de la même manière ? » me dit-elle. Je ne peux m’empêcher de lui lâcher un sourire méprisant. De un, je ne dévoile pas mes secrets capillaires comme ça, et deux, des mèches bleues lui iraient absolument pas ! Je suis sure qu’elle a du style, comme toutes les femmes, alors ce n’est qu’une stratégie pour me faire plier, mais je ne céderais pas ! La guerre est lancée ! En plus, mon bleu est unique, je l’ai choisi, en parti crée, avec l’aide de mon fidèle coiffeur qui se fait un plaisir de coiffer mes cheveux, c’est vrai ce n’est pas tous les jours qu’on peut teindre les cheveux d’une fille de la même couleur que les Schtroumfs. Dans des situations comme celle-ci, je ne suis plus la fille gamine, inconsciente et complètement folle que je suis d’habitude, je deviens un peu plus sournoise, mature et sérieuse, et je déteste ça, ce n’est pas moi ! « tu devrais chercher sur internet, je suis sure que tu trouverais bien mieux que ce que je peux te dire. N’essaye pas de me la faire ! »

La méchanceté ne nécessitait pas toujours des actes. Supposer, laisser les choses implicites, les laisser flotter dans la sphère de la possibilité pouvait avoir un pouvoir tout aussi déstabilisant. La flamme était parfois suffisante pour faire reculer les gens craignant de se faire brûler. La jeune blonde venue faire du sport connaissait bien tout cela, elle savait en jouer et s'en amuser avec délectation, ayant choisi cette proie facile et lui tournant ainsi autour tandis qu'elle courrait. Dans une gentillesse qui n'était évidemment pas sans arrière-pensées, elle se tourna vers sa proie et commença à faire une parade faite pour l'avoir dans ses filets. Le filet était lancé, mais sa proie semblait en envie de se débattre. Aucun souci, elles allaient donc jouer encore plus longtemps. Elle s'était ainsi penchée sur la couleur de cheveux assez originale de la jeune femme aux cheveux bleus. La question avait été douce, sympathique et bien évidemment, cela sonnait faux, et c'est pour cette même raison que la jeune blonde l'avait fait. Elle ne voulait pas sembler complètement gentille. Un immense sourire se glissa sur son visage après la question, montrant ainsi une sympathie et, il faut l'avouer, une niaiserie immense. La réponse se fit d'abord physiquement par ce sourire qui nourrit en une seconde cette envie de malice qui l'entretenait depuis l'arrivée de sa nouvelle ennemie, de sa proie, de celle qu'elle allait tout faire pour décontenancer jusqu'au bout, peut-être pas quelle que soit la méthode, mais presque. Entendant la réponse de sa collègue, Colleen esquissa une moue boudeuse, son regard s'imprégnant d'une fausse tristesse avant qu'elle ne réponde "- Mais j'ai déjà essayé via internet de me faire une couleur originale, et ça n'a pas marché. Je te montrerai bien la photo, mais je ne voudrais pas te déranger." La sincérité se montrait sur son visage, et cela pour une raison simple, elle avait vraiment essayé une fois de se teindre les cheveux en bleus. Cependant, elle n'avait pas gardé la couleur très longtemps, que ce soit à cause de la couleur finale, mais aussi parce que cela était plutôt un délire, un coup de folie que réellement une envie.

Je n’ai pas envie de rester ici plus longtemps, pas envie de la voir plus longtemps, de savoir qu’elle est prêt de moi plus longtemps, je veux redevenir moi-même. Là j’ai l’impression d’être une sorte de monstre ignoble et ce n’est pas moi, même si je conçois que je suis quand même très énervante, et que j’ai pas mal de défaut –un bon paquet si vous voulez savoir. Elle s’attaque à un sujet sur lequel je semble plus expérimentée qu’elle, et je doute que ce soit une erreur de sa part, elle n’aurait pas aussi longtemps calculé son coup si c’était pour le louper. Enfin, je préfère l’écouter, lui répondre simplement, ne pas m’emporter, rester calme, du moins autant que je le peux et vite sortir d’ici. Je pense qu’aller courir dans le parc sera beaucoup mieux, même s’il doit cailler dehors, je veux bien prendre le risque de tousser deux jours et de boire vingt-six tasses de thé si c’est pour ne plus la revoir. « Mais j'ai déjà essayé via internet de me faire une couleur originale, et ça n'a pas marché. Je te montrerai bien la photo, mais je ne voudrais pas te déranger. » dit-elle. Oh mais oui, elle ne veut pas me déranger c’est pas comme-ci elle venait de m’insulter et de me balancer des vacheries à la figure. Quelle hypocrite ! Enfin, je doute que ce soit son cas, elle est juste ironique à mon avis et son jeu de comédienne n’est pas assez bon pour me convaincre. « oui oui, et moi non plus je ne veux pas te déranger, donc j’vais sortir et te laisser tranquille. » Qu’importe ce qu’elle pourra penser de moi, sans doute que je suis lâche, faible, etc., tout ce que je souhaite c’est rentrer chez moi.

Il n'y a qu'un moyen de sortir de la spirale du jeu, c'est d'y mettre fin. Éteindre la flamme avant qu'elle ne vous brûle entièrement. Les brûlures ne faisaient aucunement peur à la tempête blonde. Elle aimait le risque, elle aimait la haine qui tourmentait les estomacs et les rendait capables de l'impossible. Elle se sentait alors vivante. Elle était rarement méchante pour un sou, mais ce jour-là, elle en avait besoin. Elle ne l'était plus, ou du moins, elle concoctait les apparences. La réponse que fit la jeune femme aux cheveux bleus lui plut. Elle ne voulait pas s'amuser puisqu'elle n'était pas reine de la situation. Elle voulait fuir, éviter les difficultés. C'était une manière de se soumettre, d'admettre qu'elle ne pourrait déjouer ses plans. Une moue boudeuse s'afficha sur son visage. Son regard s'éteignit, laissant la tristesse l'envahir. Elle ne voulait pas perdre cette jeune femme qui rendait après tout son moment sportif un peu plus divertissant qu'il ne l'était au départ. Elle ne répondit pas tout de suite, laissant ce silence montrer une sincérité qui n'existait pourtant pas. "- Non, reste, s'il te plaît. Il n'y a personne d'autres, reste. Le sport c'est plus cool quand on n'est pas seuls, tu ne crois pas ?" La voix qu'elle employa pour exprimer ces mots fut celle d'une enfant, elle ne voulait pas se retrouver seule. En même temps, ce changement de comportement était fait pour déstabiliser davantage. Quelle serait la réaction de son adversaire ? Finirait-elle par croire en ce revirement de pensées ? Aurait-elle encore plus envie de se méfier ? Colleen avait hâte de le savoir.

Je vais m’en aller, je vais partir, c’est décidé, quoi qu’elle dise, quoi qu’elle fasse ! Quelque part c’est peut être un message pour me dire qu’il ne faut pas que je fasse du sport car ça m’attire des problèmes. C’est vrai, j’avais décidé de prendre une bonne résolution, perdre quelques kilo, devenir un peu sportive, et voilà que je tombe sur elle. Pourquoi fallait-il qu’elle vienne aujourd’hui ? A quelques heures prêts, nous ne nous serions jamais rencontrées, et ça aurait été bien mieux. Chacune de nous deux aurait fait sa petite vie de son côté, tout aurait été plus simple. « Non, reste, s'il te plaît. Il n'y a personne d'autres, reste. Le sport c'est plus cool quand on n'est pas seuls, tu ne crois pas ? » je ne veux pas de sa gentillesse, qui d’après moi est de la pure hypocrisie. Je crois qu’en fait je préférais lorsqu’elle était méchante avec moi, au moins elle était honnête. L’honnêteté est une qualité que j’apprécie chez les gens, au moins on peut leur faire confiance, ils diront toujours le fond de leur pensée. Je pense être assez honnête, peut être même un peu trop, mais qu’importe. Je ne voulais plus lui parler, plus lui dire un mot, alors, c’est sans rien dire que je tournais les baskets, et que je me dirigeais vers la sortie, ignorant son appel faussement amical.

Colleen n'aimait pas comment la situation tournait, ou du moins c'est ce qu'elle laissait croire. Elle se contentait de faire semblant de s'attrister du départ de la jeune femme aux cheveux bleus, mais en réalité, elle savait que celle-ci ne pourrait pas sortir. La porte de sortie était assez ancienne et il fallait connaître l'astuce pour réussir à sortir, et il était très rare, voire même impossible, de trouver du premier coup comment l'ouvrir. Colleen elle-même ne réussissait pas toujours tout de suite à ouvrir le sésame, alors même qu'elle était habituée à venir. Elle garda donc sa moue triste au maximum. Un petit éclair de sadisme arriva cependant dans son regard, de manière quasiment indécelable. Elle n'ajouta rien, dire quoi que ce soit aurait cassé la surprise que risquait de ressentir MJ, et cela ferait également trop, elle le savait. Elle ne la regardait pas, restant figée sur le sol sans réellement bouger. Un bruit sembla la réveiller, celui d'une poignée qu'on tente d'activer mais qui ne réussit pas. Un rictus se posa immédiatement sur son visage, évinçant assez toute la fausse tristesse qu'elle y avait accumulé. "- Là, c'est plutôt bête. Parce que moi, je sais comment ouvrir cette bonne vieille porte, mais tu as peur... À toi de voir si tu préfères me faire confiance ou si tu préfères t'acharner en vain contre cette porte en entendant mes moqueries. C'est risqué hein ?" Colleen menait la danse, et cette idée la mettait de très bonne humeur.