C'est pas le genre de soirée où j'irai spontanément. C'est pas le genre d'endroit où je ramènerai habituellement mon petit cul trop précieux. Mais on m'a trainée. On dirait un squat. Si j'arrive toujours à trouver à n'importe quel tableau vivant un aspect artistique, mon agacement m'en rend ce soir incapable. Les gens sont complètement stone et j'ai la sensation d'arriver en fin de soirée alors que celle-ci n'est censée que seulement commencer. Bordel pourquoi je suis ici déjà ? J'enjambe le corps d'une blonde complètement perdue, mes pupilles s'attardent sur elle le temps d'effleurer son reflet et je la vois en train de verser sa bière dans la gamelle du chien du proprio de l'appartement. Dingue. Je ne prête plus attention aux autres invités et traverse la pièce d'un air fatigué, mais décidé. A côté, tout est plus agité. « Ah j'ai compris faut d'abord passer le couloir de la mort avant de pouvoir accéder à la vraie soirée, c'est ça. » je lâche à la foule d'inconnus occupés en laissant tomber désinvoltement mon sac par terre en un bruit sourd. Mes yeux se lèvent au ciel tandis que je m'affale dans un canapé. Besoin de respirer. La tête me tourne alors que je n'ai encore pas bu. Si Bamba était là, j'aurais déjà un mojito entre les mains. Mais ma partie manquante n'est pas là, elle manque à moi. Je fronce les sourcils afin de tenter d'apercevoir les invités, et éventuellement déceler des visages que mes yeux reconnaitraient. Presque six mois qu'on a bougé ici, une durée non négligeable mais pas suffisante pour connaître les énergumènes de Sunset Valley à merveille. Je décide finalement d'abandonner mon sac et mon manteau sur le canapé défoncé, pour aller me jeter à l'assaut du premier truc possiblement buvable, avant d'aller danser un peu. J'sais pas, je comprends pas l'intérêt d'aller en soirée si ce n'est pour bouger son corps et s'affranchir de toutes les tensions accumulées dans la semaine. Je laisse mes hanches se balancer au rythme de la musique, ah ouais, ça aussi, je comprendrai jamais les gens qui dansent pas en rythme, c'est pourtant pas bien compliqué. Un long moment je laisse mon corps à la merci des notes qui s'égarent, comme si j'étais seule ici, un peu, mais pas trop non plus. Quelque chose me retient mais j'ignore quoi. Je me rends finalement compte que mes talons me font un mal de chien, et retourne m'affaler à nouveau sur le canapé où un nouvel occupant a pris place, ou plutôt ma place. « Ah, c'était ma place ! Mais t'as gardé mes affaires, c'est sympa. » je me penche par-dessus lui pour choper mon sac puis je m'asseois en style indien comme Bamba et moi on aime bien faire au restau pour agacer les gens bien élevés. Je sors à demi mon téléphone pour consulter si j'ai des amis, puis tournant la tête vers le type à ma droite, je lâche finalement « C'est la soirée la plus nulle à laquelle il m'ait été donné d'assister. » d'un ton si stoïque qu'il est impossible à vrai dire de déceler si je le pense vraiment ou si une ironie dissimulée teinte mes pensées.
