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Mars 1991
« Але якщо бабуся! Запевняю вас, папа сказав! Вони говорятьна радіо!»
« Mais si mamie ! Je t’assure papa l’a dit ! Ils en parlent à la radio ! »
Au téléphone depuis plus d’une demi-heure déjà, la toute jeune Filippia, haute de ses quatre ans, racontait à sa grand-mère ce que son père, employé de banque, avait entendu à la radio le matin même. Un referendum, pour savoir si l’URSS devait être une république avec des droits pour tous ou quelque chose du genre, était à l’instant même en train de se produire. Cela faisait quelques temps déjà que ça bougeait dans les pays d’Europe de l’Est, depuis que le mur de Berlin était tombé à vrai dire. Et depuis chaque satellite de l’URSS savait que l’heure de leur libération était plus proche que la veille. Alors lorsque la nouvelle du referendum se répandit, l’espoir s’accru dans l’esprit de chacun.
Personne n’y croit, l’Ukraine est libre. Il y a dans toutes les têtes ce mélange de bonheur incomparable et de peur. Certes, nous sommes libérés de l’emprise russe et de ce collectivisme poussé à l’extrême, de cette pauvreté et de cette sois disant protection rapprochée d’un peu trop près, cette surveillance, tout est terminé. Mais qu’allons-nous avoir au pouvoir ensuite ?..
Fevrier 1993
« Filippia! Ти повернешся! Ви простудитесь! »
« Ні, я хочу взяти все і відправиться досліджувати! »
« Filippia! Veux-tu revenir ! Tu vas prendre froid ! »
« Non ! Je veux profiter et partir tout explorer ! »
Il faisait terriblement froid, la pays tout entier était recouvert de neige et simplement vêtue d'une cape, la petite Filippia alors âgée de six ans partait à travers champs sur son cheval. Elle aimait depuis toujours les longues ballades en forêt à espérer tomber sur un trésor ou son prince charmant, elle était de nature romantique et guerrière à la fois, et au plus grand désespoir de sa famille, elle préférait partir en exploration et se tâcher de boue plutôt que de jouer les princesses au cottage.
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Juillet 2005
« Тато, я хочу від США ... »
« Ну, гаразд. Але в даному випадку я забуваю. »
« Papa, j'aimerais partir aux Etats-Unis... »
« Eh bien va. Mais dans ce cas oublie moi. »
A tout juste 18 ans, Filippia quittait sa famille vivant en Ukraine pour débarquer sans aucune aide au pays où tous les rêves sont réalisables. Elle savait que son pays, sa famille, ses amis allaient lui manquer, mais son ambition et sa détermination étaient beaucoup plus forts. Elle n'avait comme argent que ses petites économies, pas de quoi se payer des études ni même un quatre étoile pour la nuit... C'est ainsi que débuta son périple dans la ville qui ne dors jamais. Arpentant les rues de New-York avec quatre sous en poche et pour seul bagage un petit sac à dos, la jeune ukrainienne était émerveillée par tant de grandeur et de lumière. Elle qui n'avait jamais quitté son petit village près de Mykolaiv, tout lui semblait mieux ici. Mais après plusieurs heures de marche, ses pieds étaient endoloris et chaque partie de son corps lui faisait mal. Finalement, elle trouva un motel situé dans le Bronx où elle pu se reposer de son voyage et passer la nuit...
Quelques semaines après son arrivée, Filippia travaillait comme serveuse dans un café de 6 heures du matin jusqu'à 22 heures le soir. Ses journées étaient épuisantes, les clients exacerbant, et le salaire pitoyable... Sa connaissance de la langue était des moindres, sa mère lui avait enseigné quelques bases et l'école avait fait le reste, mais en vrai, les gens parlaient beaucoup plus vite, et l'accent était bien plus difficile à comprendre. Un soir, alors qu'elle rentrait à son motel, elle se fit interpeller par un homme fort bien vêtu qui lui expliqua qu'elle pouvait travailler beaucoup moins et gagner beaucoup plus si elle acceptait de bosser pour lui. Naïve et innocente, Filippia ne chercha pas à comprendre plus loin et accepta. Au début, le travail lui plaisait bien. Elle devait prendre la pose en tenue légère, sois-disant pour une publicité de lingerie. Puis, après quelques mois, on lui expliqua qu'elle pouvait gagner davantage si elle acceptait de poser nue pour un "artiste". Filippia accepta. Elle n'avait pas honte de son corps et n'était pas pudique. Les gens avec qui elle travaillait étaient gentils avec elle, elle gagnait suffisamment pour s'acheter à manger des choses saines, pour s'offrir les vêtements qu'elle souhaitait et pour payer ses nuits au motel. Et un soir, son employeur l'invita à une soirée en boite de nuit. Cette nuit changea sa vie. Filippia avait l'impression d'être au paradis, les hommes la dévorait du regard, on lui offrait des consommations gratuites et même des petits extras comme disait son patron, sur des plateaux dans les carrés VIP... Ainsi s'engouffra t-elle dans un réseau de prostitution, d'alcool et de drogue dure pendant trois ans avant d'enfin s'en sortir...
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Le seul moyen pour sortir de cet enfer était de fuir, d'abandonner New-York et ce rêve transformé en cauchemar et de tout recommencer. Longuement, Filippia pensa retourner en Ukraine, mais la dernière phrase de son père avait été clair, il ne voulait plus entendre parler d'elle... Et pourquoi revenir, quelle excuse servirait-elle après toutes ces années sans la moindre nouvelle ? Au lieu de ça, Filippia prit l'avion, un allé simple pour l'Alaska, loin, très loin de tout ça. Elle entra alors à 21 ans à l'université pour prendre des cours d'art et d'anglais afin d'améliorer ses connaissances de la langue. Après deux ans d'études en Alaska, Filippia choisit d'utiliser son nom américain et devint Rachel en arrivant à Montsimpa pour vivre sa vie comme elle l'entend...