Pas de carton d’invitation, pas de soirée. Telle était la loi dictée par ce monde pourri dit mondain. Il l’avait lui, il là tenait entre ses mains la clé qui lui permettrait de se foutre en l’air encore un peu plus ce soir-là. Il s’en foutait des têtes qu’il pourrait rencontrer. Ces anciennes têtes qu’il avait côtoyées, il y a encore de cela six ou sept mois. Ce soir-là, il y a croiserait peut-être quelques new faces répugnantes, d’anciens copains de la même agence que lui, peut-être son ancien agent se trouvait-il aussi là. Qu’importe ce n’était que des détails. Il ne savait guère pourquoi il avait pu être convié à cette soirée. Il n’était plus rien, il était devenu un mec banal sans nom comme toi, comme vous, comme eux. Il n’avait plus de nom, plus de notoriété. Il était devenu rien. Il était devenu personne. Alors installé dans un coin de la salle, tout près du bar, là où personne ne pense aller. Le point stratégique. Tu es bien là, personne ne te dérange. Il observait longuement la salle, les personnes, la décoration. Il observait silencieusement, sirotant son verre. Il n’avait pas sa place, ici. Il ne l’avait pas et cela, il le savait. Il était sûrement de trop. Un homme d’un certain âge vint à sa hauteur. Ce n’était que son ancien agent. Il venait de lui dire qu’il était ravi de le revoir, que ça faisait étrange de ne plus avoir à travailler avec lui, qu’il lui manquait. Etrange discours. Puis il lui demanda ce qu’il faisait à présent. Rien, il ne faisait rien. Mais il se voyait mal lui dire cela : « je suis devenu rien ». Alors il préféra lui dire que la routine s’était éprise de son faible esprit. Ce n’était pas un mensonge cela, c’était la vérité. Une vérité quelque peu tronquée. Ce n’était qu’un détail que son ancien agent ne se doutait guère. Son ancien agent. Celui qui était devenu son pire ennemi et se métamorphosa en second père pour lui. Sans son aide, il n’aurait pas arrivé là où il en serait arrivé. Sans lui, il ne se foutrait pas en l’air. Merci d’avoir foutu en l’air mon existence.

Après quelques verres d’échangés, l’homme disparu. Laissant Hansel seul. Les minutes, peut-être les heures, défilèrent à une vitesse digne de celle de la lumière. Alors il décida de se lever. Il fit quelques pas, avant que sa marche se stoppa nette. Sa coupe de champagne dans la main. Il fixa longuement en face de lui, sans ciller. C’était elle. Il n’y avait pas à se demander ce qu’elle faisait là, elle aussi était de la partie. Elle aussi, malheureusement. Hansel soupira longuement. Cette jeune fille semblait aussi l’avoir remarqué puisqu’aussitôt, elle s’avança vers lui d’un pas rapide. Pas rapide, sûrement pas assez pour le rattraper. En effet dés qu’il remarqua qu’elle s’approchait de plus en plus, il tourna rapidement et se trouva sur le balcon encore vide de monde. Sûrement n’avait-elle pas eu le temps de voir le chemin qu’il venait d’emprunter. Il posa sa coupe sur le bord du balcon, prenant le temps de sortir une cigarette qui allait se pendre fièrement entre ses lèvres. Il s’appuya contre le rebord, regardant le paysage nocturne qui s’offrait à lui. Le bruit inaudible de la soirée avait laissé place au silence. Les jolies filles très découvertes avaient laissé place à un joli panorama quasi-urbain. Là, il était seul. Seul jusqu’à ce qu’une voix retentit. « Ah ! Tu es là ! ». La voix s’engouffra dans le creux de ses oreilles, il l’avait reconnu. Il l’avait reconnu cette voix. C’était elle. Elle, encore elle. Il ne se tourna pas vers elle, il resta dans cette même position telle une statue fraichement façonnée par son artiste. Elle était à côté de lui. Elle était là et pourtant, il voulait l’oublier.