Un regard braqué sur une œuvre. Quelques secondes à essayer de comprendre, puis soudain le déclic. Réussir à entrevoir ce que l'artiste voyait. Avoir ce pouvoir d'être un artiste juste en regardant une œuvre. Colleen allait parfois dans les galeries d'art pour trouver ce sentiment là. Mais ne soyons pas fous, elle y allait surtout pour se foutre sans la moindre discrétion de la bizarrerie des visions d'artiste. Mais certaines photographies, certaines peintures, ou même parfois certaines musiques, avaient parfois cette force exceptionnelle de vous emmener dans un autre monde et de vous toucher comme si leur message était une flèche qu'on pointait vers votre cœur. Ce jour-là, Colleen sortait de cette galerie d'arts avec une expression assez mixte. Elle était entre la bonne humeur et l'incompréhension. Une oeuvre l'avait touché, elle ne le niait pas, mais en fait, c'était la difficulté à trouver le message qui la torturait. Elle ne réussissait pas à trouver le message, même si elle le trouvait tout de même poignant. Cette force de l'art l'empêchait de traiter tous les artistes de stupidités qui ne devraient même pas voir le jour. Pourtant, elle en avait souvent eu envie. Alors, sortant une clope tandis qu'elle ouvrait la porte, elle avait trop l'esprit ailleurs pour réagir à la personne qui de l'autre côté la tirait pour entrer. Alors, lorsqu'elle envoya la porte dans le visage de cette personne, elle entendit un BOUM qui la fit enfin réagir. Elle regarda la personne, et mit sa main devant la bouche, dans un OUPS qui semblait cependant un peu faux, ce qui était le cas.

L'art touchait. L'art pouvait vous empoigner et sembler vous emmener dans son univers. C'était incroyable. Il ne fallait pas sous-estimer cette force, qui plus haut que les hommes et peut-être que les dieux, fondait un monde entier autour. Elle comptait échapper de cette folie, de tout cela, cette immensité qu'elle ne connaissait pas et qui était trop puissant pour ne pas susciter une sorte de peur. Alors qu'elle allait se tourner pour se diriger vers la porte, elle entendit une voix juste derrière elle. Trop troublée par la toile qu'elle venait de voir et qu'elle ne réussissait pas à déchiffrer malgré ses efforts, carrément vains, elle ne réagit pas tout de suite. Au lieu de se tourner vers la porte, elle finit par se tourner vers le jeune homme à qui elle sourit quelques secondes plus tard. Ce sourire, en coin, montrait qu'elle était amusée par cette petite phrase de drague qui était si peu originale, il fallait l'avouer. Cependant, il était assez charmant pour que cette petite phrase ne semble être qu'un détail. Elle le regarda de bas en haut, à la fois pour voir ce qu'il voyait en entier, pas juste son visage, et en plus, pour lui montrer qu'il était assez intéressant pour elle pour qu'il ait le droit de la draguer. Au bout de quelques secondes, elle dit donc d'un air tranquille et pourtant un peu sensuel "- Merci, mais je ne saurais prétendre être une oeuvre d'art vous savez." Bon, il y avait désormais deux solutions, soit il continuait à la draguer, soit il se montrait lourd et se mettait à se la péter avec des références artistiques en pensant l'attirer ainsi. C'était la question quitte ou double, et c'était donc la question parfaite. Elle aimait pouvoir différencier le gars charmant qui irait dans son lit par rapport au lourd qui risquait dans le pire des cas un coup de genou bien placé.