« MAMAAAAN ! » Mon cri retentissait dans toute la maison, et j'avais sûrement ainsi réveillé tout les lèves-tard de la famille, ceux qui avaient passé une bonne partie de la nuit à s'amuser, tandis que moi j'avais été obligée de rentrer à minuit. Pourtant la soirée à laquelle je m'étais rendue avait été vraiment géniale, jusqu'à ce que mon portable sonne pour me rappeler qu'il me restait à peine une demi heure pour rentrer chez moi. J'avais eu l'impression d'être Cendrillon, vraiment. J'entendis un grognement provenant de la chambre de l'un de mes frères aînés, je venais sûrement de le réveiller. Mais il avait l'habitude, on avait tous l'habitude d'être réveillé par des cris le matin. C'est ça les familles nombreuses, jamais un moment de tranquillité. Mais, personnellement, j'aimais cette vie où nous étions tous soudés, toujours à se serrer les coudes quand il le fallait. Il y avait bien sûr quelques disputes de temps en temps, notamment dues à nos caractères différents, mais ça ne durait jamais bien longtemps. J'étais l'une des plus jeunes de la famille, et pourtant j'avais déjà un caractère bien trempé, et je ne me laissais pas faire par mes aînés. J'étais plutôt la surexcitée et l'enquiquineuse de service, celle qui était toujours en train de faire la folle pour faire rire la galerie. Le genre de fille qui ne fermait jamais sa bouche, et celle qu'on aimerait parfois assommer pour avoir quelques minutes de calme. Mais n'allez pas croire que je suis une fille invivable, il peut m'arriver aussi d'être gentille, attentionnée et tout. Quoi qu'il en soit je dévalais les escaliers, à la recherche de ma mère dans l'une des pièces du rez-de-chaussée de la maison. Elle était dans la cuisine, en train de déjeuner avec l'un de mes frères. « M'man, il vient de se passer quelque chose d'épouvantable ! Mon lisseur, il est tombé en panne !» Ma mère me dévisageait, encore mal réveillée, mais je savais pertinemment qu'elle allait me faire une réflexion du genre "Et tu hurle dans la maison pour ça ?" Sauf que c'est mon frère, qui me regardais avec un sourire amusé dessiné au coin des lèvres, qui prit la parole le premier. « Tu sais, que tu ais les cheveux lisses ou en bataille comme maintenant, tu es toujours aussi moche. » Je lui jetais un regard on ne peut plus noir, et je m'apprêtais à lui envoyer une réponse cinglante, mais ma mère nous stoppa avant, d'un simple geste de la main. Elle savait s'y prendre maman pour couper nette les disputes et chamailleries, d'un autre côté elle avait l'habitude, car avec un tas d'adolescents et de jeunes adultes à la maison elle n'avait pas vraiment le choix. Elle finit par me promettre d'aller en racheter un dès que possible, surtout pour que j'arrête de me plaindre, et que mon frère arrête de me chercher. Ça c'était un moment banal, dans la vie banale de la famille Dickens.

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

On m'avait pourtant prévenu : Ne jamais s'attacher aux gens, encore moins quand il s'agit d'un mec. Et pourtant j'avais été assez naïve pour tomber amoureuse de lui. Quelle conne j'ai été ! Ça m'apprendra à être aussi naïve tien. J'avais pleuré une bonne partie de l'après-midi dans les toilettes du lycée, si bien que j'avais séché le cours de sciences, où nous devions normalement disséquer de pauvres grenouilles innocentes. D'un côté ça m'arrange un peu d'avoir loupé ça, sauf que le prof, qui ne doit pas beaucoup s'y connaître en chagrin d'amour, n'avait pas eu l'air ravi que je loupe son cours et m'avait invité un samedi matin en colle. Génial ! Je savais que j'allai devoir me justifier devant ma mère lorsqu'elle brandirait le billet de colle devant mon nez. Et il était hors de question de lui parler de mes histoires d'amour qui ne regardaient que moi, et éventuellement quelques uns de mes amis les plus proches. Le problème c'est qu'il allait falloir que je trouve une excuse bidon pour ne pas me faire tuer. Comme l'excuse du plat périmé à la cantine qui m'aurait fait passer deux heures aux toilettes, par exemple. Ça me paraissait pas mal du tout. J'étais rentrée chez moi dépitée ce jour là, je n'avais même pas goûté, c'est pour vous dire ! J'étais directement montée dans ma chambre, sans rien dire à personne. Heureusement pour moi ma mère était au travail et ne devait pas rentrer avant deux bonnes heures. J'avais tout le temps de me lamenter un peu sur mon sort avant qu'elle ne rentre et qu'elle s'aperçoive de quelque chose. J'aurais pu pleurer seule, tranquillement dans ma chambre, mais c'était sans compter sur l'une de mes grandes soeurs qui s'était aperçue de quelque chose. C'est que d'habitude je ne leur laissais pas beaucoup de biscuits, et là le plateau devait être encore à moitié plein. Elle entrait dans ma chambre, sans faire de bruit et refermait la porte derrière elle. Elle vînt s'installer sur mon lit, contre moi et me pris délicatement dans ses bras. « Qu'est ce que tu as Leyna ? » me demanda t-elle de sa voix douce. De temps en temps elle me faisait penser à maman, en tout cas elle pourrait faire une excellente mère. Je secouais doucement ma tête, aussi bien pour signifier que je ne voulais pas en parler, que pour chasser les larmes qui me coulaient le long des joues. « Tu sais, quoi que ce soit, je suis sûre que ça finira par s'arranger, tu verras. » Je n'en étais pas si sûre, mais je ne dis rien. Nous restâmes là, un long moment, elle me berçait, tandis que j'essayais de faire cesser les innombrables larmes qui coulaient sur mes joues.

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le dimanche midi, c'est apéro party chez les Dickens. Enfin quand je dis ça c'est plutôt repas en famille qui dure des heures. Mais il y a tellement d'ambiance dans ces moments là qu'on pourrait parler d'une fête quand même. Tout les frangins les plus âgés, ceux qui ne vivent plus avec nous depuis quelques temps déjà, reviennent à la maison pour l'occasion. Ça me permet aussi de voir mes neveux et mes nièces chéris que je ne vois que trop peu souvent à mon goût. Je les aime bien les mini Dickens, ils sont tellement amusant, et puis après tout j'ai quasi la même différence d'âge avec certains d'entre eux qu'avec mes frères et soeurs les plus âgés. C'est la bizarrerie de la famille. Tout le monde n'était pas encore arrivé, mais il y avait déjà de l'ambiance, comme toujours, quelques chamailleries et amabilités à droite à gauche, bref rien de bien étrange. Aujourd'hui j'attendais en particulier l'un de mes frères, Adam, qui était, comme toujours, le dernier à arriver. Il m'avait promis de me ramener un autographe de sa nouvelle copine, la célèbre Beebel Losange. Je l'attendais derrière la porte, impatiemment, le maudissant parfois d'être aussi long à arriver. Quand on frappa à la porte, je me ruais pour l'ouvrir, et je tombais nez à nez avec le petit Nathan, son fils, un bout de choux adorable, mon neveu. Je me baissais pour le prendre dans mes bras et le couvrir de baisers, ce qui le fit rire. Mais il me fut enlever par quelqu'un d'autre. Impossible d'avoir ce gosse plus de cinq secondes dans les bras tant il était réclamé par tout le monde. Du coup, je décidais de prendre sa soeur, ma jolie petite nièce, calait dans sa poussette jusqu'à ce que je la prenne contre moi, délicatement. Elle était tellement adorable avec ses joues joufflues et ses grands yeux curieux. Je levais ensuite les yeux vers le dernier à entrer, celui que j'attendais, Adam. « Dis-moi que tu as pensé à mon autographe, sinon je ne te rends pas ta fille. » Il passait une main dans ses cheveux, signe qu'il avait oublié, je le connaissais par coeur. « Désolé, elle n'a pas eu le temps de te le signer. » Je fis la moue, en faite j'étais sûre qu'il avait tout simplement oublié de lui demander tant il était occupé lorsqu'il était avec elle. Mais quand même, il aurait pu penser à sa petite soeur chérie, non ? « T'es vraiment trop nul. » Il passa son bras autour de mes épaules en me promettant, une nouvelle fois, qu'il y penserait la prochaine fois. Il avait intérêt. Puis la journée "rassemblement des Dickens" pouvait enfin commencer.