DANS LES TOILETTES DU MÉTRO DE BRIDGEPORT (1 JANVIER 1987)

« Tu me fais bander ma belle... » grogna un homme dans le cou de sa compagne qui serra un peu plus ses fesses dans ses mains en guise de réponse. Tous les jours, des hommes comme lui venaient dans ces toilettes pour baiser. Parfois avec des inconnues, parfois avec leurs amantes. Certains, pudiques, prenaient la peine de le faire dans une des stalles qui se trouvaient dans la pièce, alors que les autres, plus pressés, plus sauvages, se contentaient de prendre leurs partenaires contre le mur ou contre le lavabo, exposant ainsi leurs ébats à la vue de tous qui oseraient entrer pour soulager leurs vessies pleines de vodka et autres boissons alcoolisées. « Baise-moi. » murmura la femme entre ses halètements de plaisir. Son amant grogna de nouveau en entendant cette demande, anticipant déjà les sensations qui allaient parcourir son corps dans quelques minutes, et lui arracha son string avant de le jeter derrière lui. Ce fut à ce moment que le plus improbables des perturbateurs se manifesta. Des pleurs retentirent soudainement dans la pièce, éteignant brutalement le désir des deux amants. « Bordel. » marmonna le mec en se retirant des cuisses de sa compagne, aussi frustré que choqué. Doucement, il repoussa la porte d'une des stalles et fit de même pour la seconde en n'y trouvant rien. A la troisième, son cœur se serra douloureusement dans sa poitrine. Un nourrisson était étendu là, à même le sol. Son petit corps était recouvert de papier toilette, comme si sa mère avait voulu le dissimuler du reste du monde avant de partir, le laissant seul et sans défense dans cet endroit sordide. Avec une infinie douceur, l'homme prit le bébé dans ses bras et essuya les dernières traces de liquide amniotique qui souillaient encore son visage avec le mouchoir que venait de lui tendre sa compagne. « Que comptes-tu en faire ? » murmura-t-elle dans un souffle, ébranlée par la cruauté de cet abandon. Le type se tourna vers elle et demeura parfaitement silencieux, le regard fixé sur le nouveau-né qui dormait paisiblement dans la chaleur de son costume Armani.

RUBRIQUE « FAITS DIVERS » DU JOURNAL QUOTIDIEN (2011)

« ce matin, une violente fusillade aurait causé la mort de deux personnes au palais de justice de la ville de bridgeport. Selon les différents témoignages que nous avons pu recueillir auprès des témoins, le médecin légiste Hannibal S-J Curtis, la première victime de cette fusillade, serait intervenu en affirmant avoir de nouvelles preuves contre David Keller, principal accusé de cette affaire et seconde victime, pour le meurtre de sa femme, Sarah Keller, retrouvée morte à son domicile jeudi dernier. Keller aurait alors sorti une arme à feu de son costume et aurait tiré sur le jeune homme, le touchant en pleine poitrine, avant d'être finalement abattu par les gardes. La question que nous nous posons en observant les faits est celle-ci : comment l'accusé a-t-il pu avoir accès à une telle arme ? Personne n'a pu répondre à cette question. Ce que nous pouvons vous affirmer, en revanche, est que le père de la jeune victime ne compte pas en rester là et compte bien poursuivre les gardes en justice pour négligence. Une cérémonie de recueillement sera organisée pour le jeune homme, dont le corps et les organes seront offerts à la science et aux personnes en attente de greffe, comme telle avait été sa volonté. »

MORGUE DE BRIDGEPORT (2011)

« Nous sommes le premier novembre... Docteur Ian Beaumond... Sujet de cette autopsie : Hannibal Shiloh-James Curtis... sexe masculin... race blanche... vingt-cinq ans... » la voix est froide, sans la moindre émotion. Simple relecture de dossier, rien de plus, rien de moins. « Je vais commencer par la bouche... » Avec douceur, on attrape la mâchoire et on tire vers le bas avant de glisser un index entre les dents. « Les dents ne présentent aucune anomalie mais leur couleur indique une grande exposition au tabac... Nous allons devoir examiner les poumons afin de fixer leur viabilité... Les mâchoires se sont ouvertes sans opposer de résistance... La rigidité cadavérique est donc probablement dépassée maintenant... » [...] « Nous allons maintenant ouvrir le défunt... Je prends le scalpel et commence à inciser le pectoral gauche... » froncement de sourcils. Quelque chose cloche. La voix est maintenant fébrile, tremblante. « Le sujet saigne sous le scalpel... Je continue... » La lame court sur la peau et atteint le sternum du cadavre. Toujours aucune réaction mais une petite ligne de sang est maintenant visible sur la peau blafarde du défunt. Nouvelle entaille, qui part du pectoral droit cette fois. Le scalpel court, court, brillant sous la lumière du projecteur, puis soudain un cri emplit la pièce. Le corps sursaute alors que le patient reprend conscience sous les yeux effrayés du médecin. Il était vivant ! Il avait autopsié une personne vivante !

gaspard + swann = :cooper: bon retour à la maison toi. c'est un plaisir de t'y retrouver, vraiment. si tu as la moindre question, tu sais où on est