Journée de repos aujourd’hui, bien méritée. En effet, le Petit Corse dut couvrir un évènement d’entreprise assez important qui se prolongea toute la semaine. Des coups de feu intensifs en cuisine, un patron bien plus que tendu. Ce n’était pas la joie habituellement à cause de nos disputes habituelles mais cette semaine fut encore pire. Nous n’avions pas vraiment le temps de « vraiment » nous engueuler comme d’habitude. Pas avec les entrepreneurs présents. La bonne image du Petit Corse en dépendait. Le weekend plus que mérité arriva donc avec une lenteur infinie. J’avais un besoin immense de recharger mes batteries et je savais où je le faisais habituellement. La plage de la vieille jetée était mon lieu de prédilection, mon lieu de détente absolu avant le SPA. J’avais besoin d’un rapprochement avec la nature. Un besoin de sentir le vent fouetter mes longs cheveux bouclés. Et de sentir le soleil me bruler la peau, juste pour parfaire mon bronzage. Je débarquais donc aux heures dites de fort ensoleillement sur la plage pratiquement déserte, avec pour seul accompagnant une serviette ainsi qu’un tube de crème solaire à faible indice et mes lunettes de soleil sur le nez. En arrivant sur le sable, je m’arrêtais en plein milieu de la plage en fermant les yeux. Je sentais l’iode à plein nez et bon sang, ça faisait un bien fou. Ce coin était parfait. J’installais ma serviette, puis j’enlevais mes vêtements pour exposer mon dernier bikini blanc. Je n’avais pas vraiment eu l’occasion de le mettre ces derniers temps, mais c’est fou ce qu’il faisait ressortir mon bronzage. Il était parfait. Je m’allongeais à moitié sur la serviette, prenant appui sur mes coudes pour admirer la vue qui s’offrait devant moi. Une journée parfaite.

Je sentais que la journée pouvait se passer mieux que prévu. Je finissais par me laisser bercer par le son des vagues. C’était tellement reposant. J’avais presque oublié pourquoi je préférais le SPA plutôt que la plage finalement. C’est vrai que la météo n’était pas si terrible que ça, pourtant je ne résistais jamais à l’envie de poser mes orteils sur le sable à peine tiède de la plage. Les beaux jours arrivaient, je comptais bien en profiter un peu plus maintenant que le soleil décidait de faire un peu plus d’apparition que d’habitude. Plongée dans mes pensées, je fus néanmoins perturbée par une voix qui ne m’était vraiment pas inconnue. Une voix que j’entendais déjà assez en semaine, mais une voix qui me mettait toujours les tripes à l’envers. Mon patron décidait de me tenir compagnie aujourd’hui. Et sa remarque me fit presque décrocher un large sourire sur les lèvres. Je me tenais quand même à garder mon sang froid. Il restait mon patron, même si c’était en dehors de mes heures de travail. Il restait également celui dont je rêvais d’arracher les vêtements, juste pour voir s’il était aussi autoritaire au lit qu’au travail. « Je n’enfreins pas toujours les règles comme vous le voyez Robb… » disais-je, sur un ton sarcastique. C’est vrai que je ne respectais pas toujours le code vestimentaire. Je supposais que ma tenue vestimentaire n’altérait en rien mes capacités en cuisine. Le patron ne le voyait pas de cette manière, mais je finissais toujours à me plier à ses exigences au bout de quelques heures de bagarre verbale et petites piques en tout genre. « Je dois bien avouer que votre jogging change complètement votre physique. Vous n’en avez pas marre du smoking ? » disais-je, en le regardant du coin de l’œil. Puisqu’il décidait de passer un peu de temps avec moi, autant engager un semblant de conversation civilisée sans s’envoyer des piques à tout bout de champ.  

Intérieurement, j’étais contente de le voir en dehors du travail. Et surtout en dehors de toutes ces disputes quotidiennes concernant la plupart du temps à mes tenues de travail qui ne lui convenaient pas vraiment. Je ne voulais pas me vanter mais j’étais surement la meilleure cuisinière de son petit bistro. Et j’aimais bien respecter mes propres règles. II était tombé sur l’employée la plus rebelle qu’il avait embauché dans toute sa carrière. Je ne manquais d’ailleurs pas d’audace de lui faire remarquer que je n’étais pas vraiment prête à changer ma façon de voir les choses. « Est-ce que le fait d’être en jean altère ma façon de cuisiner ? Je ne pense pas. » disais-je, calmement. Un sourire se dessinait sur mes lèvres. Je savais que je ne lui étais pas indifférente. Mais comme tout patron décent, il ne devait pas sortir ni même envisager quelque chose avec ses salariés. « De plus, votre uniforme ne me va pas. Il ne me met pas à mon avantage pour être présentable devant la clientèle. » Je savais que la petite pique que je lui lançais n’allait pas le faire rire. En même temps, je ne pouvais pas m’en empêcher. C’était presque devenu un automatisme de mettre à l’épreuve cet homme. « Effectivement, ce serait embêtant de trouer votre smoking et de venir en jogging au travail le lendemain. Vous qui ne supportez pas quand on sort des codes vestimentaires. » disais-je, en levant les yeux au ciel. Finalement, il s’installait auprès de moi. Notre proximité me donnait presque la chair de poule. Je m’efforçais de ne pas paraitre gênée ou déstabilisée par ce regard perçant. « La plage est mon endroit favori pour décompresser. Qu’il fasse beau ou mauvais, j’aime être ici et me vider la tête. » Une tête bien remplie par des pensées obscènes vous concernant. Ouf, heureusement que je me disais ça juste dans un coin de ma tête. « De plus, il ne fait pas si mauvais que ça. » disais-je, en lui tendant mon tube de crème solaire. Oui, j’avais bien ma petite idée derrière la tête.