Pearl n'était pas pressée de retourner en cours, elle avait passé quatre heures ce matin à courir dans le stade, son entraineur n'avait rien trouvé de mieux à leur faire faire. Jack était un professeur assez spécial dans son genre, il pouvait faire des choses géniales à ses élèves mais quand il était déprimé c'était tout le contraire. Et ces derniers temps, il était on peut le dire souvent triste...

Regardant ses carottes dans son assiette, elle hésitait à aller les mettre à la poubelle ou à encore attendre quelques minutes par flemmardise. Sa table était vide et c'était temps mieux ! Beaucoup de ses copines étaient parties déjeuner à l'extérieur, mais elles n'avaient pas pris une option "physique", elles.

Pearl regrettait parfois son choix, les maths c'était son truc, certes mais bon quelques heures de cours en moins lui auraient fais le plus grand bien. Surtout que ces derniers temps, elle était particulièrement fatiguée.

Regardant sa montre avec découragement, elle se rendit compte qu'elle devait se rendre dans l'amphi' si elle ne voulait pas arriver en retard. Se levant gracieusement, elle jeta entièrement son plateau avant de passer la porte de la cafétéria.

Cours de merde. Pearl n'avait pas lâché sa montre du regard pendant tout le cours. Ça la tenait éveillée en quelque sorte. Elle ne pensait pas à grand chose, si ce n'était que la chemise du prof était particulièrement hideuse cet aprem et que les auréoles sous ses bras étaient plus étendues que d'habitudes.

La sonnerie retenti, Pearl fût la première à se lever. Elle avait attendu ce moment bien trop longtemps. Ramassant son sac et son cahier, elle pressa le pas. Tellement vite qu'elle rentra en collision avec un garçon, mais pas n'importe lequel.

"Tu pourrais faire attention !" Pearl leva sa tête et reconnu le jeune homme en moins d'une seconde. Damien, son voisin.

"Ah c'est toi..." Ça c'est un début de conversation ! Pearl avait toujours eu du mal avec le jeune homme, ils ne s'aimaient pas pourtant il y avait une sorte d'attraction entre eux.

Prenez une journée de merde, mais pas la petite merde qui est souvent accompagnée de la petite frousse télévisée, vous savez, le genre de peur qui vous tétanise alors que vous savez pertinemment que vous vous faites du soucis pour rien, vous savez très bien qu'il s'agit simplement d'une peur irréaliste et que cela ne se passe que dans les films, à la télévision.

Prenez la vraie merde, celle qui vous fait sentir le chien écrasé toute la journée, vous savez la merde qui vous ordonne de rester coucher tellement la journée qui va se dérouler sous vos yeux impuissants sera merdique et chiante à vivre. Il faudrait rester couché dans ces moments de solitude extrême, le néant vous bouffe jusqu'à l'os, vous vous sentez mal, très mal, mais la nature vous empêche de passer une journée à dormir.

Après tout, se réveiller le lendemain matin, pour démarrer ce que l'on qualifie journée de bonheur et de réussite à toutes épreuves même par balle, c'est trop simple. On veut que vous prenez le temps de souffrir un peu, sinon, c'pas drôle. Mais revenons à ces journées ne sont que parsemées entre les moments de souffrances ultimes. Vous n'avez pas eu le dernier iPhone en vogue dans les bars parisiens ? Pas de soucis, attendez le lundi trente et un du mois, et vous trouverez cet objet dans la poche d'une robe Dior à votre taille, là quelque part, entre un toast au caviar et une flûte de champagne accompagnée de feuilles d'or.

Aujourd'hui, Damien vivait une journée de grosse merde. Il avait complètement loupé son examen de mathématiques, lui qui était si bon ne pensait pas même arriver à grappiller un dix sept sur vingt, grave erreur au parcours, il se devait d'être le meilleur, le futur Gates. En revanche, cours banal d'OS, bonne participation, il s'était offert le luxe de partir deux heures avant la fin du cours pour aller se détendre comme il adorait : Dans un parc, genoux croisés, ordinateur à côté et musique dans les esgourdes. Il se livrait à ce genre de pratiques deux fois par semaines, pas plus, les graphismes de l'extérieur ne valait quand même pas ceux d'un bon Skyrim. Il passait le plus clair de son temps de la sorte : sa chambre, chauffante à cause des quatre ordinateurs, deux Mac, un Linux et un Windows tournants à pleine puissance, deux écrans plats, l'un sur les informations, l'autre relié à deux consoles, ainsi qu'un frigo et un microonde. La chambre du véritable NERD par excellence, aux frais de papa-maman, enfin, de la case études. Ayant obtenu le maximum possible à son test d'entrée, il avait pu prendre l'argent de côté pour s'acheter ce qu'il voulait, et ça avait tourné autour de ces centres d'intérêts.

Cours de physique vraiment chiant, mais obligé de rester jusqu'au bout parce qu'il était en RAID sur WOW et tout joueur digne savait qu'il n'était pas correct de quitter un RAID en plein milieu d'un combat effréné. Il avait donc subi cette hérésie , écouter un professeur craché des histoires d'octets. Ca énervait profondément Damien, il était meilleur que tous les élèves et ce prof. Leurs Q.I n'avaient même pas la moitié des neurones dont il avait, dans la partie supérieure de sa tête.
Alors qu'il rangeait son laptop, il cogna contre un débris, un âmas d'os entrelacés.

Sa voisine, quoi de mieux que cette... Cette...

-Oh putain, t'es ici toi ? Tu te demande comment on encode un cerveau pour te rendre lus intelligente ? Commence par manger un peu, ça fera moins mal quand tu bousculeras les gens sans t'excuser.

Comme quoi quand une journée commence mal, elle le reste jusqu'au bout. Pearl s'était levée à à la bourre, ayant oublié de mettre son réveil. Forcement elle était arrivée un peu en retard à son premier cours, ce qui lui avait valu vingt pompes de plus que les autres.

Elle avait passé une matinée de merde à faire des tours de terrain. Le déjeuner ce n'était pas mieux passé, elle n'avait pas touché à son assiette. Les "cuisiniers" se donnaient très peu de mal ces temps-ci.

Après deux heures du cours le plus horrible qu'il puisse exister, alors qu'elle pensait enfin en avoir fini avec cette journée, elle avait réussit à percuter quelqu'un.

" Oh putain, t'es ici toi ? Tu te demande comment on encode un cerveau pour te rendre lus intelligente ? Commence par manger un peu, ça fera moins mal quand tu bousculeras les gens sans t'excuser." Scotchée sur place, Pearl était tellement étonnée des paroles du jeune homme qu'elle avait du mal à réagir. "D'abord c'est toi qui m'a foncé dedans. Et ensuite, désolée si je ne passe pas mes journée assise devant mon ordi à bouffer des curly, MOI"

Pearl avait horreur qu'on la traite d’anorexique ou de maigrichonne. Elle avait beau manger tout ce qu'elle voulait, elle ne prenait pas de poids. Et le fait qu'on le lui reproche, l'énervait au plus haut point.

D'autant plus que cette remarque venait de Damien, le nerd par excellence qui ne foutait rien de sa vie à part battre son record sur Call Of Duty. Cela faisait à peine quelques mois qu'ils étaient voisins, mais Pearl avait pris l'habitude de l'observer par la fenêtre. Elle donnait directement sur la chaise de bureau du jeune homme, et il ne baissait jamais ses volets. Lorsque la jeune femme se penchait un peu, elle arrivait même à apercevoir son écran de télévision.

Damien était en pleine crise comportementale, il n'avait aucune habitude qu'on le brusque ainsi. A vraiment dire depuis l'âge de dix ans et demi, il n'avait plus du tout, mais du tout l'habitude du contact humain, il ne se rappelait même pas ce qu'était se toucher, se faire un calin entre membre d'une même famille. Les traces d'amour quelconques étaient pour lui, comme des couteaux profonds enfoncés dans des organes soit disants, capables de ressentir une douleur mentale, celle qui touchait le cerveau et que l'on nommait "cœur" alors que l'on savait très bien que l'anatomie humaine empêchait cet organe de souffrir de la défaillance sentimentale.

On avait eu dit que le "cœur saignait" pour justifier cette douleur dans la poitrine qu'on nommait parfois stress tantôt angoisse et qui prenait toujours la même forme, une lame profonde, comme lorsqu'on se brisait le doigt à coup de couteau d'une violence inouïe, mais avec la joie et la bonne humeur de vous laisser sur le carreau pendant des secondes, des minutes, des heures, des jours, des nuits, des semaines, des mois et des années. Parfois, vous soufriez pour toujours, et les autres rigolaient bien de vous voir douiller ainsi, quel plaisir de se marrer en vous voyant crever sous les yeux d'une population qui écrit son histoire à l'encre.

On peut tout effacer, on écrit au crayon à papier, notre vie n'est qu'une trace dans le livre d'or du site géant de la vie. Quant à Damien, il haïssait ce genre de comportement, c'était elle, cette jeune blonde qui venait de le percuter osait prétendre que la situation fut inversée. Si il y avait bien quelque chose qu'il détestait, c'était ça. Le fait, la manière qu'ils avaient tous à détourner la façon de se comporter, l'art et la manière auraient été de s'excuser, même si la personne en face était un sale con que l'on ne pouvait pas supporter. Mais les gens étaient complètement con, et demander ne serait qu'un petit "excuser moi" aurait été une insulte à sa propre religion, celle du culte de la connerie.
Damien la fixa.

-Déjà, si tu avais un tant soit peu de la culture, c'est pas des Curly, c'est des Belin. Et deuxièmement, mieux vaut être seul que mal accompagné. Actuellement, j'suis aux enfers de l'accompagnement. Ouais, c'est le damne, et toi, tu fail.

Pearl n'en revenait pas, personne n'osait lui parler ainsi. D'habitude ils étaient tous à ses pieds, à espérer le moindre de ses sourires, prêt à exploser de rire à la moindre de ses blagues complètement nulles. Elle était une reine sur le campus et ce mec devait avoir un sérieux problème.

Ou alors il était le seul à trouver la "popularité" sans intérêt. Ce que Pearl trouverait...totalement sensé. La jeune femme avait beau faire partie de ce système, elle le trouvait quand même débile. Elle n'avait pas demandé à être reconnu dans l'université comme la salope populaire, mais elle l'avait été dès son arrivée. Pearl n'était pas comme ça pourtant, mais elle s'était prise au jeu. En étant célèbre vous obtenez beaucoup plus facilement ce que vous désirez.

"Déjà, si tu avais un tant soit peu de la culture, c'est pas des Curly, c'est des Belin. Et deuxièmement, mieux vaut être seul que mal accompagné. Actuellement, j'suis aux enfers de l'accompagnement. Ouais, c'est le damne, et toi, tu fail." D'abord Pearl observait Damien de bien trop loin pour connaître exactement la marque avec laquelle il s'empiffrait. Ça n'était absolument pas un problème de culture !

Et deuxièmement sa dernière expression lui était bien trop familière. "C'est le damne et toi tu fail", expression de geek certes mais elle n'avait entendu qu'une personne la dire, jusqu'ici.

Pearl ne passait pas sa vie à jouer à la PS3, mais elle aimait se détendre de temps en temps. Sa soeur l'avait initié à beaucoup de jeux. Amelia était une asociale depuis sa naissance, et son premier petit copain était un geek, du coup elle avait pris l'habitude de jouer pour pouvoir lui parler.

La jolie blonde lança un regard interrogateur pendant quelques secondes. "Epic cette expression !" Sourire charmeur, il y avait très peut de chance que Damien soir le joueur à qui elle parlait très souvent quand elle avait le temps de jouer. "Et ouais, je peux même comprendre ton language"

Pearl avait horreur du mot "Epic" mais à force d'entendre RedDragon le répéter à longueur de temps, elle s'y était mise elle aussi.

Epic ? Pour qui se prenait-elle ? Etait-elle dans la petite sphère très privée des Nerd, avait-elle, comme Damien, deux jours auparavant, foutu le site d'une grande marque de vidéos à la demande à l'arrêt grace aux injonctions SQL ? Avait-elle déjà eu la bonne idée de s'introduire sur les serveurs privés d'une agence gouvernementale pour effacer des actes de piratage sur son casier judiciaire ? Avait-elle déjà connu l'ivresse des informaticiens ? Des soirées, des nuits blanches à boire des RedBull et à se doper aux cafés Nespresso extra-forts pour pouvoir tenir dans une intrusion dans les bases de données privées afin d'y soutirer de l'argent ?

Très peu de gens avaient eu cette occasion, Damien faisait partir des BlackHat, ceux qui, étaient du côté obscur de la force et dont le seul but était de détruire pour le plaisir et d'y voir des intérêts, on ne piratait pas pour prévenir les entreprises des failles béantes de sécurité sur les systèmes mais plutôt pour devenir millionnaire, pour se faire du profit sur le cul des innocents. Un jour, Damien avait bossé pour Probésys, société d'informatique libre pour sécuriser leurs softs, et il l'avait réalisé avec plaisir. Anticonformiste dans l'âme, il avait pu offrir ses services en l'échange de rien du tout, et l'expérience avait été concluante, il avait adoré endossé la peau du sauveteur, à tester toutes les failles, à sécuriser le logiciel, même si ce dernier, étant sous licence Creative Commons ne rapportait que les frais d'entretien et de mises à jours des serveurs.

Mais, le soir, seul dans sa piaule, il avait d'autres chats à fouetter que d'aider. Le profit engendrant l'appel du profit avait raison de lui, et il passait des putain de nuits à mettre des services hors d'état de nuire, à récupérer des points fidélités pour acheter des DVDs et chose ultime, il avait même pu créer son propre serveur privé sur WoW, le truc ne servait qu'à des gens en qui il avait confiance et quelques relations de ces derniers. Il avait ainsi pu se voir régner, maitre d'Andromeda, serveur privé concurrent de Millenium. Ca l'éclatait de faire ça, il pouvait ainsi bannir et débannir qui il voulait. Chat IRC et TS privés en prime, sans abonnement, juste pour le fun.

Il ne s'attaquait qu'aux grosses firmes lorsqu'il s'agissait de détourner de l'argent. Il ne planterait pas un site communautaire mais ne se gênerait pas pour faire du mal à Sony ou Youtube. Être membre des Anonymous avait été sa récompense la plus grandiose à ses yeux. Il avait eu la chance de recevoir un masque et de participer aux grandes soirées privées : devant un ordi, vodka à gogo, et défis de fous.

-Epic ? Tu connais ce mot, toi ?

Il la fixa, sourire aux lèvres :

-T'as du même joué à Minecraft, nan ? Tu sais le truc en 2D tellement fat où les prébubères s'éclatent. Et t'as un facebook, je parie ?

Il haissait la communauté et les sites pour rester entre bons vieux potes alors qu'on se détestait mais ça faisait bien d'avoir six cent trois amis.

-Attends, WoW, nan ? Et en nom de personnage, BlondePlatineTropDarkPourToiPoupée ?

Les gens croient beaucoup trop aux stéréotypes. Barbie doit aller avec Ken, un obèse adorer le McDo, un intello aimer les maths... Ça ne se finissait jamais.

Pourtant la société est peuplée de gens tous différents des autres, même si beaucoup d'entre eux n'osent pas s'affirmer comme tel. Pearl, elle, n'avait jamais contredit ce qu'on pouvait dire sur elle, elle n'en avait rien à faire. Généralement elle était prise pour la pétasse en mini jupe trop cool du campus. Mais qui pouvait imaginer qu'elle aimait passer du temps sur la PS3 ou sur son Mac ?

Tout le monde croyait la connaître, mais en vérité il n'y avait que son ours en pluche Stich qui pouvait y prétendre. Au moins, lui l'avait vu pleurer, l'avait vu sourire. En dehors des murs de sa chambre, elle cachait au maximum ses émotions et sa vraie nature. Une sorte de protection sûrement, elle avait peur qu'on ne l'aime pas pour ce qu'elle est vraiment. Et n'avait pas encore trouvé la personne qui lui prouverait qu'elle était parfaite comme elle était.

Toujours sourire et le regard fier, voilà comment la jolie blonde traversait ces murs. Et c'était le même cinéma chaque jour.

"Attends, WoW, nan ? Et en nom de personnage, BlondePlatineTropDarkPourToiPoupée ?" Ouh nerd et devin ! Ça existe ça ? Damien en était la preuve...à quelques mots près.

"Non mais presque ! BlackHole je trouve ça mieux quand même." Oui parce qu'en plus de ne pas écouter que des musiques techno comme les populaires le doivent, elle adorait Muse, et ce pseudo en était directement inspiré.

La jeune femme fît quelques pas en avant, histoire d'enfin sortir de l'auditorium. Ne lâchant pas le jeune homme, elle était pressée de savoir ce qu'il avait encore à lui prédire.

BlackHole ? Non, mais c'était une blague ou quoi ? On se foutait royalement de sa gueule après s'être introduit par effraction dans l'un des ordinateurs les plus protégés de la planète. Oui, sans vouloir se vanter, Damien avait développé des sécurités ultimes pour son ordinateur et le pirater relever du défi intersidéral, le risque était comparable au fait qu'une mouche se coince l'aile en sortant de sa voiture Moucho-Mobile après avoir fait ses courses au G20 en compagnie du président Sarkozy et Merkel, eux mêmes en couple et ayant trois enfants, Adolf, Joseph et Moïse. En gros, c'était plus qu'impossible. Mais alors... Comment est-ce possible qu'on sache qu'il conversait avec une certaine BlackHole ? Il n'en avait jamais parlé à personne, elle était son jardin d'Eden, il se confiait à elle sans prendre la peine de savoir qui elle était, il avait une confiance absolue en cette fille;

Mais il n'avait jamais donné son prénom, par pure raison de sécurité, il parait que dévoiler son identité sur le web pouvait être dangereux, et il avait peur pour ses fesses. C'était véritablement une relation spéciale qui s'était installée entre les deux individus, Damien adorait ça, et n'attendait qu'une chose, que le personnage, cet Elfe de Sang se connecte afin qu'il parle sur le canal 2. Il aimait ces conversations, et parfois, il parlait pendant qu'une page truquée balancait des virus sur les ordinateurs de pauvres victimes innocentes.

Il s'était juré de faire quelque chose d'affreux, de capturer toutes les photos d'un ordinateur au hasard, de mettre les photos en ligne et surtout de donner toutes les coordonnées de cette personne, juste pour s'amuser et étudier ainsi les comportements des victimes et des bourreaux. Il fallait le faire, comme la Lutz Security avait osé faire. Putain, ils auraient aimé les rejoindre, mais le leader avait été arrêté avant que Dam' puisse faire quelque chose, c'était la merde.

-Attends, tu vas me faire croire que tu joues un Elfe de Sang sur Andromeda ?

Il la fixa de nouveau, un air grave, et plus du tout armé de cynisme mais interrogateur, laptop à l'épaule gauche, chemise à carreaux, jogging et sandales aux pieds.

-Parce que si c'est le cas, tu joues sur mon serveur et je suis RedDragon.

"Parce que si c'est le cas, tu joues sur mon serveur et je suis RedDragon." Oh mon Dieu ! C'était complètement dingue, ça ne pouvait pas être lui, c'était impossible ! Comment Damien pourrait être ce garçon si gentil avec qui elle adorait discuter.

"J'aurais préféré que ça ne soit pas le cas, mais pourtant, si" Comment les gens pouvaient ils être si différents derrière un écran que dans la vrai vie ? "Il y a donc un garçon sympa qui se cachent derrière ces bouclettes alors !"

Pearl n'avait jamais vraiment discuté avec lui dans la vie réelle, ils se détestaient depuis l'emménagement de la jeune femme au 4 Rue des Lapins Blancs. Elle avait appris à le connaître seulement à force de l'observer à travers la fenêtre. Pearl lui trouvait un côté mystérieux, ce qui le rendait plutôt sexy.

Elle avait pris l'habitude de lui lancer un regard hautin quand elle le croisait sur le campus, peut-être parce qu'il n'en avait rien à faire d'elle. Il s'en fichait complètement de sa popularité, de sa beauté. La jeune femme n'en avait pas l'habitude et en quelque sorte, ça l’intriguait. Et ça l’embêtait aussi, on est toujours attiré parce qu'on ne peut avoir.

Et à cet instant même tout ce qu'elle pensait de Damien venait de s’effondrer. Il était bien différent de ce qu'il essayait de faire croire. Pleins de question se bousculaient dans sa petite tête blonde. Pourquoi se haïssaient ils ici, alors quand un univers tel que Wow, ils s'adoraient ?

Pearl avait découvert en RedDragon, un confident et une personne qui ne croyait pas au système de vie actuelle; un rebelle chou en gros. Il passait son temps à critiquer notre mode de vie et ça amusait beaucoup la jolie blonde.

Le monde est parfois tordu, non ? Vous ne trouvez pas ? Vous ne pensez pas qu'on se pose des questions durant une vie et que lorsque que nos pieds touchent le froid du pavé glissant de la mort, on ne connait toujours pas la réponse à la chose qui nous aura emmerdé une vie entière. Pour certains, la question est "Comment je serais, après ?" pour d'autres encore "est-ce qu'un jour je serais quelqu'un de reconnu ?" La plupart du temps, on obtient jamais ses réponses, comment ça pourrait être sans ce facteur ? Et avec un autre ?

Il n'y avait aucun moyen de tout savoir, aucun moyen d'être certain de son avenir, on appelait ça, en anglais le plus littéral possible "randomness". Le facteur X qui décidait de vous, de votre façon de vivre puis de mourir, le hasard, ce facteur si destiné et obstiné. Ce facteur qui poussait votre destin à s'effacer et parfois, le hasard prenait de bonnes formes, aux limites de la jouissance ultime. Aujourd'hui, il avait pris une forme très spéciale, le hasard avait fais que deux êtres qui se haïssaient au possible aient enfaite plusieurs points en commun dont celui de partager la passion d'un MMorpg de tonnerre.

Si... Mais si elle jouait sur son serveur, elle devait connaitre quelqu'un qui eu un jour, un compte sur le privé et qui sache exactement comment installer ce truc, parce que c'était complexe, très complexe de modifier les fichiers qu'il fallait modifier. Le serveur de Damien ne marchait pas comme Milenium, cette connerie pour débutants, tous les espaces étaient encodés et devaient être débridés pour trouver hosts et fichiers de config. Il fallait avoir un mot de passe, envoyés pour la première fois dans une mail-list. Ca voulait donc dire qu'elle connaissait du monde, mais qui ?

Et si... Non impossible. Personne ne connaissait... Non, personne ne connaissait son frère, sauf les grosses pétasses blondes... A mais attends ! En fait, si c'était bien possible. (attention, l'auteur décline toutes pensées de son personnage, hein).
Damien avait une soudaine envie de bouffer, ça lui arrivait, qu'il ait envie de manger juste après un cours chiant où il "raider" sur son jeu favori. Et si...

-Ca te dis de bouffer un truc chez moi ? Ca sera Curly en apéro, promis. Parce que j'ai la dalle et ça me ferait pas de mal de bouffer en compagnie, comme ça, je te montrerais ce que vaut vraiment un WoWAddict.

Et voilà qu'il l’invitait chez lui ! Pearl avait beaucoup de mal à le suivre. Vingt minutes avant, il l'insultait et maintenant il voulait partager un paquet de Curly avec elle.

Elle ne savait pas trop quoi répondre, ça faisait un moment qu'elle espérait se rapprocher de lui. Et oui, car dernière ses airs de rebelle et de geek profond, elle lui avait toujours trouvé du charme. Ça ne s'expliquait pas vraiment. En tout cas, depuis quelques mois, il lui arrivait de s'amuser à observer Damien à travers sa fenêtre. Ses plissements d'yeux, ses pincements de lèvres quand il était concentré, tout ça la faisait complètement fondre. Pourtant, elle ne supportait pas son attitude.

Le fait qu'il rejetait totalement Pearl, amplifiait son attirance, on veut souvent ce qu'on ne peut avoir...

Maintenant qu'elle savait qu'il n'était autre que RedDragon, elle allait apprendre à le connaître autrement. Mais il n'en serait pas moins sexy !

"Allez je te suis ! Et pas uniquement parce que tu m'as parlé de Curly."

Pearl avait toujours rêvé rentrer dans l'entre secrète de Damien J. Westerfield et voilà qu'elle allait pouvoir réaliser ce souhait. Généralement quand elle allait dans la chambre d'un garçon ça n'était pas pour le voir jouer à Wow, mais il y a une première fois à tout, non ?

En fait en y repensant, Pearl se rappelait de Tristan, un de ses meilleurs amis d'enfance. Il passait leurs après-midi ensemble, à jouer. Elle adorait construire des ponts, des autoroutes, des maisons avec ses nombreux Lego. Il fallait dire que Tristan venait d'une famille assez aisée, il possédait même sa propre salle de jeu qui faisait la taille de trois chambres d'une maison de famille moyenne.
Mais c'était il y a bien longtemps, quand Pearl était encore une gentille petite fille sage.

L'antre, la grotte. Appelez ça comme vous voulez après tout. Mais comment est-ce que Damien qualifiait son lieu de résidence ? A vraiment dire, il n'en savait rien, c'était une réserve de produits geeks purs sangs, et en même temps, un endroit chaleureux où l'on aimait se trouver si l'on aimait les figurines Star-Wars, les dragons, les tueurs de dragons, le RedBull et le codage informatique.

C'était un endroit sombre, jamais éclairé, seulement quelques heures par jour, grâce à une fenêtre qu'il ne fermait jamais, parce qu'un peu de lumière ne faisait pas spécialement du mal, depuis qu'il avait basculé dans des crises d'épilepsie à répétions, il s'assurait de suivre quelques conseils de démarrage des jeux-videos, il fallait jouer dans un espace suffisamment éclairé et des bla-bla de grands mères et de bonnes sœurs bien pensantes.

Les crises, y'avait pas grand chose de mieux. On avait l'impression d'être dans cet état que vous adorez par dessus tout, celui qui vous fait oublier votre vie, et en même temps, vous n'êtes conscient de rien, vous bougez, votre langue se tord seule, dans une valse endiablée de la folie, et vous avez l'impression de perdre pied avant de rayonner de nouveau, la futile maladie s'est en allée, comme elle est venue, sans laisser de traces de son passage, juste un mal de crâne terrible. Obsède, lubrique, telle était cette maladie néfaste. Damien avait eu son compte lorsque la nouvelle Mise à Jour de WoW était sortie, il y avait passé des jours, sans dormir, crackers et RedBull comme présents dans ce monde où monter un Paladin niveau 80 représentait l'absolue nécessité. Être l'un des premiers à être niveau 80 était une joie que Damien avait pu vivre. Il avait eu une envie de prier, de louer Jésus de lui avoir permis d'être aussi doué, fort et grandiose.

Il était un type phat, ou fat, selon votre préférence et le langage que vous vous complaisez à utiliser; Le jeune homme trouvait les relations sociales au centre de toutes les stupidités mondiales, comment voulez vous qu'on s'entende dans un monde où se passer de ses amis cinq minutes est devenu un crime ? Comment un troupeau peut s'entendre en vivant ensemble au quotidien, sans aucun moment de pause, sans aucun moment pour se retrouver seul avec son âme, et pour faire le vide des conneries des uns, des saloperies des autres.

Il n'était pas dans la nature humaine de pouvoir vivre l'un sur l'autre, même si l'instinct grégaire faisait parfois des siens, il était tout simplement impossible qu'on vive en communauté parfaite durant des siècles, il fallait qu'on se casse la gueule à un moment ou à un autre. La vie c'était comme ça. Damien était bien content d'avoir une charmante invité pour son quatre heures. Elle allait avoir le privilège de voir sa collection privée de figurines, de produits collecteurs et le clou de sa collection, sa reproduction maison du Christ Piss, cette magnifique statue de Jésus plongé dans un bol d'urine chaude et agréable au goût.

-J'ai un lit moelleux, pour baiser, c'est parfait.

Il se mit à rire.