Cinq heures du matin, et déjà, j’étais debout. Il faut dire que je dormais peu, ces temps-ci. Au moindre bruit, je me réveillais. Un chat faisant tomber un pot de fleur au sol, c’était largement suffisant pour me tirer des bras de Morphée. Mais bon, je ne pouvais pas en vouloir à mes petites bêtes poilues, je les aimais trop pour ça. J’avais donc ramassé le gâchis sans rouspéter, puis je m’étais préparé afin d’aller courser un peu. J’avais amplement le temps de le faire : il était à peine six heures quand je sortis de la maison, et je n’avais pas à me rendre au bureau avant huit heures. Je pris donc la direction du parc, sans réellement me presser.

Je courais depuis un moment lorsque j’aperçu, au détour d’une courbe, un homme derrière moi, qui semblait aussi faire sa course matinale. Sans trop savoir pourquoi, dès qu’il accélérait le pas, j’adaptais ma vitesse à la sienne. Peut-être étais-je trop orgueilleuse pour me laisser dépasser, qui sait. J'avais la compétition dans le sang, ce désir d'être toujours première... ça devait être ça. Cependant, quand je vis qu’il cherchait à se rapprocher de moi, je ralentis légèrement l’allure. Il sembla apprécié la chose car il m’offrit un sourire en guise de salutation en arrivant à ma hauteur. « Cela vous dérange si je cours à côté de vous ? » me demanda-t-il, et j’haussais les épaules. J’avais pris l’habitude de courir seule, je le faisais depuis des années sans regret, sans désir de me joindre à quelqu’un d’autre. Est-ce que cela changerait ce matin? Hum, peut-être. Disons que j’étais peu encline à refuser ma compagnie à quelqu’un qui me l’avait demandé d’une si gentille façon. Et puis, je n’allais pas le chasser comme un malotru. « Ça serait stupide de refuser maintenant que vous êtes là. » lui répondis-je finalement, affichant un léger sourire au coin de mes lèvres.

Nous continuâmes de courir un certain moment, en silence. Il faut dire que discuter durant une course, à moins d’avoir une cardio d’enfer, ça restait une activité plutôt complexe. Et trois fois plus fatigante que la course en elle-même. Je ne possédait pas ce talent, malheureusement. M’arrêtant un moment près d’un croissement de sentier, j’attrapais la bouteille d’eau à ma taille et en but quelques gorgées, avant de me tourner vers mon compagnon d’infortune. « Je m’appelle Harper. » fis-je, en lui tendant la main. S’il voulait courir en ma compagnie, je voulais au moins connaître son prénom. Il me devait au moins ça.