Il était vingt-trois heure et je courrais encore les rues. La nuit était tombée depuis bien longtemps et le froid avait encore gagné le dessus et moi, j'étais là, seul en train de me balader. En réalité, je revenais seulement d'une petite soirée chez des amis. Et le top, c'est que je n'étais même pas bourré, même pas défoncé. Cette nuit-là, j'avais dis que je ne boirais pas, et c'est en parti ce que j'ai fais. Oui bon, on ne peut pas refuser une ou deux petite bières. D'ailleurs, j'en avais un à peine entamée que je tenais fermement de la main gauche. C'était "la dernière pour la route", je rentrais chez moi, à pieds. Il fallait bien que quelqu'un me tienne compagnie et c'était cette bière, celle-ci, qui allait écouter ma vie tout au long du chemin. C'est vrai que c'était assez bizarre, mais j'aimais bien parler à des objets, j'étais sûr qu'au moins, ils m'écouteraient et que surtout, ils garderaient tout pour eux et ils ne répéteraient rien. C'est fou, ouais je le sais mais tant pis, j'en ai rien à foutre de ce les gens pensent de moi, ils peuvent dire autant de conneries, de méchancetés même des compliments, ça me rentre par une oreille et ça sort de l'autre. Mais voilà, je marchais, une bière à la main. Il ne manquait plus qu'une petite musique de fond pour donner du style à tout ça.

D'un coup, je sentis une légère brise me frôler. Je ne savais pas où j'étais, j'étais dans mes pensées depuis plusieurs minutes et je marchais encore, encore. Puis d'un coup, mes jambes me dirent d'arrêter, comme si elles avaient interpellé quelque chose, qu'elles avaient vu un truc. Je m'arrêtais, et me retournais. J'étais face à une grande étendue sombre, on y voyait même le reflet de la lune, qui était à son apogée cette nuit là. C'était la mer, la plage. Pourtant, je ne passais jamais devant la plage pour rentrer chez moi, j'avais dû prendre un chemin au hasard et me retrouver ici. Tant pis, ça faisait un bout de temps que je n'étais pas venu ici. Je sautais alors la barrière qui séparait la route de la plage, et me retrouvait sur le sable. D'ailleurs, je ne manquai pas de tomber à cause de celui-ci. J'avançais avant de m'arrêter net devant la mer. J'étais droit comme un piquet, sans bouger, en train d'écouter le va-et-vient des vagues. J'adorais ce bruit, ça me reposait, ça me détendait. Après avoir passé une ou deux minutes sans rien faire, je décidai d'avancer vers l'eau, sans doute froide. Sur le chemin, entre mon point de pause et la mer, je me pris les pieds dans ce que je croyais être au début des algues. Enfin, d'étranges algues. J'en attrapai une et remarquai que ce n'était que des vêtements. Qu'est-ce que viennent foutre des fringues sur une plage, un soir d'hiver, où il n'y a personne ? C'était des vêtements de fille à première vue, ou peut-être de mec fortement efféminé. Je les jetais au sol, avant de sentir sur mes chaussures, l'eau monter. Merde, j'avais les pieds trempés et j'enlevais alors mes chaussures ainsi que mes chaussettes. Au contact de l'eau, je sortais un putain tellement l'eau était froide. C'est à ce moment là que, je vis au loin une silhouette noire, une silhouette de femme. Des fous, il y a vraiment des fous pour se baigner dans une eau si froide. Le corps de bougeait pas, c'était comment dire..? Chelou, ouais et ça commençait réellement à me faire flipper. Fallait que je fasse quelque chose, imaginez la situation : un corps retrouvé sur la plage de Montsimpa et je m'en voudrais alors toute ma vie. J'suis un fou aussi, alors je pris mon courage à deux mains, je me déshabillais et jetais mes fringues le plus loin possible sur le sable. Je me retrouvai en caleçon, en pleine nuit, seul et prêt à sauter dans l'eau. C'était du n'importe quoi, mais fallait que je le fasse. Un pas, deux pas, trois pas. L'eau était glaciale et le froid venait de parcourir tout mon corps. Mes dents claquaient et je tremblais déjà. Je n'étais pas rendu, mais moi, j'suis un fou, j'suis un boss, j'suis un héros. Alors j'ai fermé les yeux, et j'avançais. Bon, j'avoue que j'ai un peu bloqué au niveau de la zigounette, d'ailleurs à ce moment-là, elle devait faire cinq centimètre de moins. L'eau m'arrivait enfin à la taille et j'avançais jusqu'au corps encore inconnu. C'était une fille, elle était mignonne d'ailleurs, enfin elle en avait l'air. Elle ne bougeait vraiment pas, « Oh putain, c'est quoi cette merde ». Et puis là, franchement c'était digne d'une scène de cinéma, je me suis toujours dis que j'aurais dû être un acteur. Je pris l'inconnue dans mes bras avant de la trainée jusque sur la plage. « PUTAIN, meuf réveille toi, c'est pas sérieux. Si t'as voulu te suicider, c'est raté. » j'essayais de la réveiller, en la secouant, en lui foutant des baffes. C'était pas glamour du tout, non. J'aurais vraiment dû aller à ce stage de secourisme, pourquoi j'y suis pas aller, pourquoi.

Peut-être ne voulait-elle pas se suicider, peut-être voulait-elle seulement s'amuser, peut-être voulait-elle simplement ressentir des sensations qu'elle recherchait depuis longtemps. Il est vrai qu'il y en a qui saute bien d'un pont accroché à un élastique, d'autres qui se droguent. Il faut s'attendre à tout dans la vie. Si elle aurait réellement voulu se suicider, elle ne se serait pas déshabillée et elle serait partie bien plus loin. Et sans me vanter, elle a eu juste de la chance que je sois là, que je tombe là au bon moment. Je ne sais pas ce qu'elle serait devenue, on ne l'aurait jamais retrouvée, elle serait partie au large sans jamais revenir ou alors on l'aurait retrouvée sur la plage, inerte. M'enfin à quoi bon penser au pire alors qu'il ne se passera pas. Dans cette situation-là, il valait mieux optimiser que partir défaitiste. Je regardais une dernière fois autour de moi, pour voir si quelqu'un d'autre aurait pu venir m'aider. Personne, seul ma bière au loin qui m'attendait, nos habits sur le sable froid. On était seul dans la nuit noire, que tous les deux ou carrément seul, vu que l'inconnue n'était pas présente avec moi. Je continuais encore à lui foutre des baffes. J'avais l'impression de la battre et que je l'avais tuée, c'était comment dire, étrange mais je continuais quand même, jusqu'à temps qu'elle me donne un signe de vie. Je lui parlais aussi, je lui demandais si elle était avec moi, je savais qu'elle m'entendait mais elle ne pouvait juste pas répondre. Elle était allongée sur mes jambes et moi j'étais assis. J'avais eu le temps de la regarder, elle devait être bien plus âgée que moi, elle était mignonne aussi, ouais. Il faisait froid, le vent n'arrangeait en rien la situation. On était glacés, mon corps tremblait de haut en bas et les gouttes d'eau continuaient à couler sur moi. Je regardai une dernière fois devant moi. Il n'y avait rien, le néant, une grande étendue noire qui avait l'air d'être agitée mais sinon, rien. D'un coup, en une fraction de seconde, je sentis le corps de la blonde bouger sur le mien et je jeta mon regard sur elle. Elle commençait à se réveiller et à tousser, l'eau qu'elle avait avalée ressortait enfin. Ses yeux s'ouvrirent enfin, avec peine. Elle n'avait pas l'air de m'avoir vu, jusqu'au moment où elle parvint à sortir quelques mots de sa bouche. « J-Je... J'ai fr-froid.. » tu m'étonnes, c'était la seule phrase qui me parvinrent dans mes pensées. Je devais forcément faire quelque chose, je ne pouvais pas la laisser comme ça. Certes je n'étais pas superman sinon elle serait déjà dans une pièce avec dix chauffages autour d'elle pour la réchauffer « Attends ! » et je me levais, en prenant soin de poser sa tête blonde sur le sable, délicatement et allai chercher les habits qui se trouvaient à quelques mètres de là. Je revins les bras chargés des vêtements, et la recouvrit avec ma veste que je portais il y avait encore un bon quart d'heure. « ça va ?! j'fais c'que je peux pour t'aider. »

On était maintenant assis là, elle et moi, après qu'elle ait reprit connaissance. Dans tout cela, c'est se dire que l'on a sauvé une vie qui est le plus fou. Avant ça, tout le monde pense, sans se mentir, que ces histoires là, ce n'est écrit que dans les livres, jouées dans ces séries abrutissantes avec des acteurs pourris ou alors dans nos rêves. Je regardais encore l'horizon, du moins ce que j'en voyais. Les gouttes d'eau continuaient à tomber de mon corps, je passais une main sur mon torse en guise de serviette de fortune pour essayer d'en faire disparaître une grande partie, sans succès. Je commençais à trembler, une réaction qui me paraissait normale vu la situation dans laquelle je me trouvais ou plutôt où nous nous trouvions. Encore, elle avait de quoi se réchauffer, j'avais été gentlemen pour une fois, oui parce que ce n'est pas du tout mon genre. J'suis pas du genre à être aux petits soins à tout le monde, j'suis plutôt du genre à penser que l'on peut tous se débrouiller comme on peut. Non je ne suis pas radin, non je ne pense pas qu'à moi, c'est juste que j'ai simplement des règles à suivre, c'est comme ça. En fait, c'est comme ça depuis la mort de mes grands-parents, j'étais aimé, bichonné, cajolé par eux. Lorqu'ils sont décédés, j'ai tout perdu de tout cela, j'étais seul. Je ne dis pas que mes parents ne s'occupaient pas de moi, bien sûr que non. Mes grands-parents étaient mes parents de substitution, des paternels que j'aurais préféré avoir à la place de mes vrais. Une vraie leçon à retenir. Mais cette fois c'était bien différent, elle aurait pu mourir, cette fille inconnue, là. Elle me remerciait plusieurs fois, là voix tremblante et calme. Elle me faisait de la peine, sans déconner. Je ne répondais pas, c'était simplement normal, je n'avais rien à dire sur ça. Elle devait le savoir. « Je.. Que s'est-il passé.. Je.. » non, elle ne devait pas le savoir. « J'étais là, par hasard et toi, tu étais dans l'eau, inconsciente. Je ne peux pas t'en dire plus. » car moi non plus, je ne savais pas ce qu'il s'était passé, je ne savais pas ce qu'elle voulait faire. J'étais juste là au dernier moment, au bon.