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Le regard perdu sur les trousseaux de clés qui trône dans une boîte, j’écoute sans grand intérêt la voix qui parle dans le téléphone. Ne pourrait-elle pas se contenter d’accepter, sans se sentir obligée de me raconter sa vie ? La contrepartie dès qu’on demande un simple service me déplait fortement. Alors me voilà au téléphone avec une de mes sœurs, à l’écouter parler de sa journée alors que je souhaite seulement qu’elle garde Nathan ce soir. Le plaisir de passer une soirée en compagnie de son plus beau neveu – et le seul aussi mais bref – devrait lui suffire à la rendre heureuse. J’acquiesce de temps en temps à ses paroles et retiens une envie de soupirer. Et finalement, au bout de ce qui me semble être une éternité, j’ouvre la bouche. « Donc tu viens le chercher vers 19h ? » Que je dis alors qu’elle parlait de son travail. Elle marque une pause, réalisant que je viens de lui couper la parole. Elle pourra toujours raconter tout ça à mon fils si elle veut l’endormir. Moi j’ai assez donné de mon temps pour aujourd’hui. On finit rapidement la conversation et elle raccroche enfin. Je constate avec surprise que le coup de téléphone n’a duré que dix minutes. Moi qui pensais l’écouter depuis des heures. Bien sûr que j’aime ma sœur, ne vous méprenez pas. Mais à petites doses, c’est toujours mieux. Au moins, je n’aurais pas à m’occuper de Nathan ce soir. Car ce soir, j’ai autre chose à faire que de le surveiller. Surtout que celle qui sera en ma compagnie ce soir a déjà fait office de baby-sitter pour lui. Mais maintenant, ce n’est plus pour mon fils qu’elle vient mais pour moi.

J’ouvre la porte et souris en découvrant Nevaeh juste derrière. Sûr que cette soirée sera une réussite, je lui fais signe d’entrer et je referme la porte derrière elle. Maintenant qu’elle est là, on est au complet et la fête peut commencer. « Ne me dis pas que tu t’es faite pour moi Emerson. J’suis presque flatté. » Bien sûr qu’elle s’est habillée et maquillée pour moi. Peut-être même a-t-elle fait un tour chez le coiffeur en prévision de cette soirée. Il faut bien ça quand on va rendre visite à Adam Dickens. Et Nevaeh se fait toujours belle, qui qu’elle aille voir. Encore plus quand c’est moi, ça va de soi. Je prends le manteau qu’elle me tend, en vrai gentleman. Pourtant, je n’ai pas de raison spéciale de faire ça. Elle ne couchera pas avec moi ce soir. Aussi surprenant que ça puisse paraître, notre relation est strictement amicale. Sans aucun accroc jusqu’à maintenant. « Alors que veux-tu ? J’ai du château machin ou bien du domaine de la chose, comme tu veux. Les deux m’ont coûté beaucoup d’argent en tout cas, ils ont intérêt à les valoir. » Très peu connaisseur en vin, je sais quand même que les bouteilles qui coûtent le plus sont aussi les meilleures. Principe de base, ce qui est bon est cher. Heureusement que je gagne bien ma vie. « Par contre, je n’ai pas eu le temps de cuisiner pour toi et puis je n’en avais pas vraiment envie. Donc on commandera à manger si jamais tu as faim. Et j’impose le chinois. » Déposant deux verres à pied sur la table de mon salon, je lui souris. Si on m’avait dit il y a quelques mois que je serais là, à boire et à rire avec une femme sans l’intention qu’elle finisse dans mon lit, je ne l’aurais sûrement pas cru. Mais Nevaeh est spéciale. « Quels sont les derniers ragots qu’on entend dehors alors ? Dis-moi tout. »

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Sac à main Chloé sur le bras, lunette Chanel sur le nez, robe prada sur le corps, j'avais tout l'apparat de la fashionista d'excellence. Mon regard hautain se voyait même à travers les verres de mes lunettes, et je n'avais absolument aucun scrupule à agir de la sorte. Du plus loin que mes souvenirs me le permettaient - soit quatre ans - j'avais toujours eu la tendance à regarder les gens de haut, ne m'accommoder de la crème de la crème, et de ne pas m'encombrer de n'importe quoi ou n'importe qui. J'avais un certain standing à tenir, et je n'acceptais pas que quoi que ce soit vienne le perturber. Poussant les portes du magasin, je m'avançais, telle une reine découvrant ses sujets et les regardant d'un air dédaigneux. Aussi arrivée, les vendeuses s'empressèrent de me proposer un verre de champagne, et surtout de savoir qu'elle était la nature de ma venue. J'étais une habituée des lieux, connue pour ses achats compulsifs mais pour ses coups de gueules majestueux. Il était rare que je reparte de cet endroit avec le sourire, ou que je leur offre un sourire. Ce n'était guère dans mes cordes, et je n'avais aucune envie de leur faire ce plaisir. Mon sourire, je ne l'offrais qu'aux personnes que j'appréciais réellement, et autant dire qu'elles se comptaient sur les doigts d'une main. « Je suis à la recherche d'une robe casual mais élégante, raffinée mais pas sans rentrer dans l'excès. » Pas de s'il vous plait, pas de merci, pas de merde, rien. Un envol de vêtement en tout genre se fit autour de moi, et je m'installais confortablement dans un fauteuil, attendant patiemment qu'on me dégotte LA robe parfaite. Une vendeuse s'avança vers moi, un grand sourire aux lèvres, fière de sa trouvaille, une robe portefeuille Chanel. Baissant mes lunettes de soleil, le regard que je lui lançais suffit à la faire repartir au galop avec sa robe et en quête d'un autre modèle. Et c'est ainsi que pendant près d'une demi-heure, j'eus le droit à un défilé de robes, toutes aussi hideuses les unes que les autres. J'étais connue pour être difficile et ne marcher qu'au coup de cœur, aujourd'hui ne faisant pas exception. Mais la première vendeuse revint vers moi, l'air craintive, ne sachant trop si elle devait me présenter ce modèle ou non. D'un geste de la main, je l'incitais à venir vers moi et c'est ainsi qu'elle trouva LA robe, celle qui serait parfaite pour mon rendez-vous de ce soir. Une robe bustier, bleu pale, rehaussé par un petit nœud au niveau de la ceinture, griffée Prada, j'étais conquise. « Je la veux. » Déclarai-je d'un ton sec, avant d'ingurgiter une gorgée de ma coupe de champagne hors de prix. Un soupir de soulagement s'échappa de toutes les bouches, et la vendeuse tenant entre ses mains le précieux vêtement, s'empressa de l'emballer dans un beau paquet, avant d'attendre patiemment à la caisse que je daigne payer. Aussi, délicatement et gracieusement, je me levais et m'avançais. Je dégainais ma carte bancaire, et quelques instants plus tard j'étais dehors, où j'esquissais un léger sourire.

Frappant d'un coup sec à la porte, j'attendis quelques secondes que la porte s'ouvre. Adam me laissa passer, pendant que je déposais rapidement un baiser sur sa joue. « Dickens, tu crois vraiment que je sortirais habiller comme un sac? Peut importe qui j'irai voir? Non soyons honnête! Mais je reconnais volontiers avoir fait un effort plus que particulier pour toi! » Déclarai-je d'un ton taquin avant de prendre place sur le canapé du jeune homme, et de faire face à des bouteilles de vins, au nom plus qu'exotique, bien que très européens. Apparemment, Adam ne connait strictement rien au vin, hormis le fait que ces bouteilles lui avaient coûtées extrêmement chères. Pas très étonnant, il s'agissait uniquement de grand cru bordelais, et quiconque avait un minimum de culture savait qu'il s'agissait des meilleurs vins du monde. « Château Ausone, année 2003… Et bien il y en a qui ne s'embêtent pas dis moi! » Déclarai-je, sans vraiment savoir comment je savais que ce château et cette année étaient excellents. Parfois, certains flash, certains souvenirs me remontaient en mémoire, sans que je sache réellement d'où ils venaient. Cette fois encore, je savais que je connaissais ce vin là, mais sans savoir comment. « Du Chinois avec le vin… Dickens, dois-je vraiment tout t'apprendre? Mais enfin soit, allons pour le chinois, ça restera un bon plat quand même et surtout en excellente compagnie. » Rigolai-je avant de me servir un verre du fameux château. Je portais le verre à ma bouche, et me délectais du délicieux breuvage. Fermant les yeux, j'appréciais grandement cet excellent vin. « Tu es animateur et c'est à moi que tu viens quémander les ragots? Tu sais bien que je me fiche des autres. Tant que ça ne touche pas à toi, à moi ou aux quelques autres, je me fiche totalement tu le sais! Mais enfin, je ne suis pas contre que tu me racontes les dernières rumeurs que tu as entendu, ça peut toujours servir! » Répliquai-je tout en souriant.

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Et la voilà qui entre, habillée comme si elle était sur un tapis rouge, entouré des plus grandes stars. Sauf qu’elle ne va pas recevoir un oscar, elle vient seulement dîner avec moi. Mais Nevaeh ne fait jamais les choses à moitié. Un de nos nombreux points communs. Sauf que moi, je ne porte pas de tenues de grands couturiers, juste des vêtements toujours soigneusement choisis et préparés. Parce qu’il est clair qu’on ne peut pas avoir l’air beau quand on porte un jogging ou des vêtements sales. Le style, c’est quelque chose d’inné, on ne peut pas le forcer. C’est sûrement pour ça qu’on nous confond rarement Zade et moi, malgré nos visages identiques. Les traits que nous partageons, c’est la seule et unique chose qui nous relie. Et je ne doute pas que si Nevaeh tombait sur mon jumeau dans la rue, elle le critiquerait comme elle le fait si bien. « Tu sais bien que tu es belle dans n’importe quelle tenue mais j’apprécie l’effort, ne t’inquiète pas. J’ai changé de chemise pour toi, elle te plait ? » J’écarte les bras pour qu’elle puisse apprécier la vue et souris. Lorsqu’elle vient embrasser ma joue, je la serre contre moi, juste assez, juste une seconde. Je ne suis pas connu pour montrer mon affection aux gens, elle me connait. Et elle est pareille. Ça ne nous empêche pas de nous apprécier, beaucoup même. Parce que, mine de rien, elle s’est imposée dans ma vie et elle y prend une grande place. Difficile d’y croire quand on me connait. Mais pour le comprendre, il suffit de connaître Nevaeh aussi. Cette fille ne pouvait qu’être mon amie, c’était écrit. « Il faut croire que je suis doué pour choisir finalement. Mais un vin français et cher est toujours bon non ? » Je me fie à mon expérience puisque tous les vins français que j’ai pu goûter étaient délicieux. A croire que les habitants de la France sont doués pour ça. Et pour couronner le tout, ils nous envoient leurs meilleurs. Parfait pour une soirée en compagnie d’une amie proche. Et comme nous avons des goûts de luxe avec la belle Emerson, nous ne nous privons jamais de mets coûteux. Ça ne risque pas de ruiner de toute façon, elle avec son héritage et moi avec mon salaire. Alors on ne se prive pas et on dépense des centaines d’euros pour un simple vin. « Désolé si je n’ai pas tes connaissances en repas luxueux, je ne demande qu’à m’améliorer. Que proposes-tu pour accompagner ce vin ? » Bien sûr que non, je n’ai pas besoin de m’améliorer puisque tout est déjà parfait chez moi. Mais si elle connait un moyen de nous faire apprécier encore plus ce vin, autant qu’elle fasse partager. Je ne doute pas un instant que la demoiselle ait bon goût. « Si tu veux, tu peux même me montrer tes talents de cuisinière, mes placards sont pleins de choses à cuisiner. » J’ignore si la blonde est bonne cuisinière à vrai dire, peut-être vais-je le découvrir ce soir ? Dans le pire des cas, on peut toujours se contenter de notre bouteille de vin et nous amuser toute la soirée, sans manger. Par contre, le réveil demain matin risque d’être douloureux dans ce cas. Les gueules de bois, très peu pour moi. Et je suppose que Nevaeh pense pareil que moi sur ce point. Mais pour le moment, on se contente de s’assoir dans le salon, en commençant à boire ce vin réputé délicieux. Et, sans grande surprise, il l’est réellement. Si bon que le premier verre est vide bien rapidement. Mais peu importe, la bouteille est encore presque pleine. « Et moi qui te pensais une grande commère, me voilà déçu. Il faut croire que je t’ai appris tout ce que tu sais. » Faux air vexé bien entendu, je suis fier d’être sa seule source d’information sur tout ce qui est critiques et ragots. Surtout qu’elle n’a pas choisi le bas de gamme. Non, je ne me lance pas encore des fleurs mais c’est vrai que choisir le grand Adam Dickens, animateur d’une émission people, on peut difficilement faire meilleur choix. Je nous ressers un verre chacun avant de m’installer confortablement dans le canapé. « Tu en as sûrement entendu parler si tu regardes mon émission mais je te raconte quand même. Il parait que sur le plateau du dernier Spiderman, c’est une vraie orgie, il y a des histoires entre tous les acteurs. Les histoires de tournage sont toujours plus intéressantes que le film d’après moi. » Je n’ai jamais eu aucun remord par rapport à mon métier. D’après moi, quand on est célèbre par choix, on est prêt à dépasser toutes les rumeurs et les critiques. Si on ne le peut pas, on retombe vite dans l’anonymat de toute façon. « Tu devrais faire actrice tu sais. Tu pourrais rencontrer tous les acteurs et me donner des informations internes. Et bien sûr, je ne parlerais de toi qu’en bien à la télé. » Je ne doute pas que Nevaeh serait parfaite comme actrice. Sûrement bien plus que Paris Hilton dans le genre héritière qui fait du cinéma. Aucun doute qu’elle ferait les caprices les plus énormes de l’histoire du cinéma dès que quelque chose irait mal. Elle n’aurait aucun mal à faire parler d’elle. Une carrière est si facile à monter quand on a de l’argent et des relations comme elle.

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» ♬ Time to dance.

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