le quotidien : je rends visite à ma mère atteinte d'Alzheimer trois ou quatre fois par semaine dans l'établissement spécialisé où elle est placée, mais c'est pas pour autant qu'elle se souvient de moi. - j'ai essayé d'arrêter de fumer une trentaine de fois, mon record c'est 3 jours. On me reproche souvent d'enfumer tout le monde et de vivre/bosser dans un environnement irrespirable. Mais je me lave les dents, beaucoup, et je mâche des chewing-gums, beaucoup, pour éviter l’haleine pas fraîche du fumeur. - je suis censé porter des lunettes mais ça me fait replonger dans mon enfance traumatisante alors j'évite de les mettre au maximum. Le truc emmerdant c'est que je me rends pas bien compte tout de suite si le mec que je mate a plutôt 70 que 30 ans. - ma mère nous a élevé dans la tradition chrétienne et mon oncle est un prêtre très apprécié. Je vais à la messe régulièrement, je prie, j'aime mon prochain et j'essaie de respecter le dogme. Bon je suce des bites, mais on n'peut pas être parfait non plus. - j'ai développé une passion pour les plantes et les jardins vers l'âge de onze ans. Mon rêve ce serait de faire gagner un concours à sunset valley dans ce domaine et c'est d'ailleurs pour ça que j'entretiens les jardins de la ville, mais il faudrait probablement que je tue la moitié des habitants pour préserver les pelouses si je compte rafler le trophée. Alors à la place je mets tout mon coeur dans mon propre espace vert, même si des imbéciles s'amusent à le saccager pendant la nuit. J'ai installé une caméra dirigée vers mes plantations depuis une semaine et j'attends avec la ferme intention de les démasquer, les faire arrêter, les euthanasier. - j'adore aller voir des films d'horreur au cinéma et me recroqueviller de trouille sur mon siège en bouffant du pop-corn. - j'appelle toujours les gens plutôt que leur envoyer des sms. Je suis incapable d'écrire correctement avec ces trucs tactiles et ça m'agace profondément. La dernière fois que j'ai tenté le coup le téléphone a fini dans les toilettes. - perdre mon sang-froid c'est un truc qui ne m'arrive pas souvent, mais alors quand ça se manifeste je suis le portrait craché d'un gamin capricieux qui a eu le camion bleu alors qu'il voulait le rouge. - ma soeur m'organise régulièrement des rendez-vous avec ses collègues et ses amies dans l'espoir que je plante ma graine avant d'être trop vieux. Faire fuir les femmes qu'elle me présente est donc devenu l'une de mes activités mensuelles les plus prenantes, mais ça n'a pas l'air de la décourager. - et quand quelqu'un ne m'intéresse pas ou que je m'ennuie, je tiens un discours digne d'un échappé d'asile pour faire passer le temps. La moitié de la ville s'imagine que je me prends pour un chasseur de fantômes et l'autre moitié croit que je dissèque des souris pour leur manger le cerveau. - c'est vrai que je n'ai pas particulièrement besoin d'en rajouter pour avoir l'air complètement timbré, il paraît que même naturellement je suis "chelou" (comme dirait le morveux du voisin). Apparemment c'est principalement dû au fait que je dis à voix haute tout ce qui me passe par la tête, et à mon habitude de faire écouter de la musique à mes plantes. Mais c'est prouvé que ça leur fait du bien, c'est juste que les gens ne comprennent rien. J'ai toujours été le vilain petit canard de toute façon, j'imagine que je perpétue inconsciemment la tradition. - je suis allergique au latex, et c'est bien emmerdant. Les médecins ont failli m'achever au lieu de me sauver avec leurs gants et leurs perfusions. - je suis un tel danger public sur la route qu'on se demande souvent si je n'ai pas soudoyé, emballé ou menacé mon examinateur le jour où j'ai passé le permis de conduire. En fait, c'était mon cousin. Ma liste d'accidents est aussi longue que le casier judiciaire d'un multirécidiviste compulsif, d'ailleurs je roule sans assurance depuis trois mois puisque personne ne veut prendre le risque de me couvrir. - les enfants m'adorent et je n'ai jamais vraiment su pourquoi. - il est presque impossible de me réveiller quand je n'ai pas décidé que c'est l'heure. le travail : - quand quelque chose me fait chier (à savoir les trois-quart des sujets que me donne à traiter le reporter principal), je ne fais aucun effort ou strictement n'importe quoi. Mais étrangement mon supérieur ne perçoit pas la note caustique de mes articles et me félicite souvent pour mes efforts. - j'ai souvent du temps libre, et je le passe généralement à mettre mon nez dans des sujets plus sérieux pour essayer de dénicher un scandale digne d'un prix journalistique. - je cherche toujours à tout savoir des gens, déformation professionnelle. - je suis responsable de la rubrique hebdomadaire "un jour un métier", et je dois donc passer une journée par semaine à découvrir le job de quelqu'un d'autre. Je tente de dégoter des trucs un minimum originaux, parce que les banquiers ça emmerde tout le monde. l'amour - je suis du genre à tomber amoureux aussi rapidement qu'un homme manuel change une ampoule (je ne dis pas moi, il me faut à peu près deux semaines et demi). C'est peut-être plus de l'obsession à vrai dire, mais quand je tiens ma proie je suis plus obstiné et inventif qu'un môme affamé qui voit un bonbon sur une étagère inaccessible. J'enquête même sur le type, parfois, juste pour savoir ce qu'il aime, où je peux le trouver et ce qu'il cache. Je sais, ça fait très adolescente en fleur déglinguée par ses hormones ou psychopathe à la dangerosité avérée, mais au moins j'en suis conscient et c'est déjà pas mal non ? Evidemment plus il me rejette plus je m'incruste, et ça ne me suffit pas de tirer mon coup. Non, moi je veux le rendre accroc, sentir qu'il a besoin de moi, que je suis indispensable, et c'est là que je commence à devenir très con, à me comporter comme un abruti jusqu'à ce qu'il décide enfin de me larguer. Et après je m'fais passer pour une victime de l'injustice de l'amour en larmoyant et j'ai vraiment le coeur brisé, même si plus personne ne me croit quand je prétends être innocent dans l'histoire. Et puis je retombe amoureux, et c'est le cercle infernal qui recommence. Je vous rassure j'ai consulté des tas de psychologues, ce qui est moins rassurant c'est que ça n'a rien changé à cet aspect de ma vie. Certains de mes potes disent que c'est parce que j'estime ne pas mériter le bonheur, d'autres que j'ai contracté un syndrome de persécution, et d'autres encore que ma mère devait se droguer quand elle était enceinte. - je suis encore au placard pour ma famille et mes relations professionnelles.