Le trou noir. Après m'être fait brisé le cou par ce monstre qu'est devenue Blaine, je ne me souviens de rien. Comme si j'étais réellement mort, sauf que non. Ouvrant les paupières peu à peu, mon corps est envahi par une sensation peu agréable. Celle de la soif. Enragé, haineux, en colère, mes sentiments sont décuplés. Allongé sur du parquet dans ce qui ressemble à une maison, je tente peu à peu de reprendre mes forces et de me lever. Les premières secondes sont difficiles et je ne comprends rien. Que m'est-il arrivé ? Que suis-je ? Car il y a une certitude, je ne suis plus humain. Me sentant différant, plus fort, mais aussi plus dangereux, je déteste cette sensation. Le visage crispé par la colère qui m'anime, je tente de comprendre ce qui m'arrive. Pleurnichard il y a quelques heures, l'homme que j'étais n'est plus de ce monde. Je ressens tout de même de la peur face à ses changements. La peur d'être devenu un monstre. N'ayant pas encore assimilé ce fait, j'entends un grincement. Automatiquement mes sens sont aux aguets. Je perçois d'où le bruit provient et me tiens prêt à agir. Entendant les pas s'approcher, je ne réfléchis pas une seule seconde et fonce sur ma proie. Je suis surpris de ma rapidité et de la force que je dégage. Effrayé aussi, la peur se mêle à la colère. Plaquant au mur l'individu, je reconnais Blaine. Mon regard est noir. Je la déteste. Je sais que c'est par sa faute si je me retrouve dans un tel état brûler par la soif. Mon visage proche du sien, je ne relâche en rien la pression. « Que m'as-tu fais ? ». D'une voix calme, je reprends, mais cette fois-ci d'un ton beaucoup plus élevé et haineux. « Que m'as-tu fais ? Répond sale .. ». à quoi bon l'insulter de monstre, c'est ce qu'à présent je suis devenu, n'est-ce pas ? Tiraillé entre la haine et la douleur, je lutte pour la maintenir plaquée contre le mur.

J’avais une nouvelle fois, fait parler de moi en transformant un nouvel humain en vampire. A croire que je prenais presque un malin plaisir à toucher à la vie des êtres humains. J’étais moi-même décédée comme ça, par simple désespoir de ma misérable vie. Je décidais cette nuit, de changer la vie de Floyd en lui offrant ce qui semblait pour moi être un don venu du ciel. L’immortalité. La force, la vitesse. Personne ne pouvait mieux lui expliquer que moi. Avant ma transformation, j’étais pire que lui. Aujourd’hui, je transformais des humains en vampires pour repeupler la civilisation. Devenir le vampire alpha ? Bien sûr, c’était un but que j’aspirais tout particulièrement. Après lui avoir brisé le cou, j’emmenais Floyd chez moi dans mon nouveau manoir. Bridgeport me semblait bien plus « potable » pour un vampire comme moi. L’argent, ce n’était pas ce qui me manquait. Un nouveau manoir, beaucoup plus sombre que le précédent, était construit en quelques heures. Oui, quand on a des ouvriers vampires, la tâche est beaucoup plus facile. Installant Floyd sur le lit, je m’en allais vers la cuisine pour prendre un plasmafruit. Bon sang, j’avais du mal à me faire à ce régime sanguinaire. Moi qui adorait sucer le sang des êtres humains. Refermant le frigo d’un revers de la main, je remontais dans la chambre mon plasmafruit en main. Celui-ci tombait au sol, me retrouvant ainsi plaquée contre le mur par un Floyd qui semblait bel et bien réveillé et surtout au sommet de ses capacités vampiriques. Fort heureusement, j’étais plus ancienne que lui. Il allait devoir s’adapter à sa nouvelle vie. Je le repoussais sans la moindre difficulté contre le lit, regardant si mes beaux habits n’étaient pas abîmés par la violence du choc. Mon mur était tout détruit. « Tu paieras les réparations. » disais-je, pour l’agacer encore plus. J’observais en coin mon plasmafruit. Il était foutu, tant pis. J’espérais aussi qu’il n’avait pas réveillé ma fille avec son fracas. « Bienvenue dans le monde merveilleux des vampires, Floyd. » disais-je, presque satisfaite d’avoir fait ce beau jeune homme ma seconde progéniture.

« Bienvenue dans le monde merveilleux des vampires, Floyd. » . Sale .. , les mots me manquent, ou plutôt sont bien trop faibles, vis à vis de ce qu'est cette personne. Elle ne peut pas s'imaginer à quel point ma haine est dense en cet instant précis. Elle a fait de moi un monstre. J'aurais préféré y rester. Ma vie n'était qu'un échec, je n'étais qu'une épave, mais en quoi devenir un suceur de sang va arranger les choses ? Elle n'a rien comprit à mes attentes, mes désirs d'en finir. Elle est égoïste, sans coeur et surtout, complètement timbrée. Énervé, je peine à contrôle ma rage. Celle-ci se lit d'ailleurs sur mon visage déformé par la colère qui m'anime. Poussant des grognements pour l'extérioriser, l'envie de lui arracher la tête est présente. Sauf que je ne peux m'y tenter étant donné que cette biatch est bien trop forte. Du coup, pour éviter de faire une connerie, je retransmets ma haine en un coup de poing face au mur. N'ayant encore aucune mesure de ma force, je suis surpris de voir le soit disant mur, s'effondrer sous mes yeux et faire apparaître un énorme trou. Je suis éberlué et reste muet. Sauf que des pleurs d'enfant jaillissant d'une pièce voisine interpelle mon attention. Un bébé ? Elle a un gosse ? Je me retourne systématiquement vers Blaine. « Un gosse ? Comment peux-tu .. ? ... tu es pourtant si .. » j'en perds mes mots. Je ne peux pas comprendre comment un tel monstre peut vivre avec une enfant sous le même toit. C'est ... irresponsable. Totalement perdu, bouleversé par ces changements, j'en viens à m'effondrer. Sur mes genoux, je plonge ma tête entre mes mains. J'ai pour espoir que ceci n'est qu'un cauchemar et que je vais vite me réveiller. Sauf que ce n'est pas le cas.

La transformation de Floyd me rappelait presque la mienne. Un coup de lapin sur la nuque, le réveil difficile dans le lit et surtout cette sensation d’être une autre personne. Floyd n’avait pas lutté pour devenir ce que j’étais, il n’avait pas dit un non franc et massif. Même s’il me disait non, j’aurai quand même transformé cet homme. C’était son destin, de devenir ma progéniture. Il allait devenir le plus grand prédateur, mais aussi un autre homme. Fini la fiotte, bonjour l’immortel froid qui n’a peur de rien. Un vampire n’a peur de rien, même pas de la mort ultime. J’étais déjà morte au fond de moi, alors mourir une seconde fois… Ma seule hantise était le soleil. Il fallait que je trouve un moyen pour déplacer dehors sans me mettre à brûler. J’observais Floyd mettre un coup de poing dans le mur. Encore un autre trou, encore d’autres réparations à payer. J’étais prête à le dépouiller de tout son argent s’il continue. J’en étais capable après tout. Depuis ma transformation, beaucoup de choses avaient changées en moi. Je n’étais plus la même. Peut-être qu’un jour mon côté humain me rattraperait. Ce n’était pas encore le cas. J’entendais les pleurs de ma fille, réveillée sous les impacts de cet abruti. Je grognais. Il avait réveillé. Sous le coup de la colère, j’utilisais mon hyper vitesse puis retenait Floyd par le cou. « Encore un seul geste de travers, et je te brise les deux bras. Est-ce que c’est clair ? » disais-je d’une voix dure. Il allait devoir apprendre à vivre comme moi, maintenant qu’il faisait partie de ma famille. Je le relâchais, en espérant qu’il se calme un peu. Comment calmer un nouveau vampire transformé contre sa volonté ? Il n’avait pas le choix de toute façon. « A moins que tu préfères la mort ultime. » disais-je, en soutenant son regard. « Ne bouges pas. » Je reculais puis utilisais mon hyper vitesse pour aller chercher Bonnie qui continuait à pleurer. Je l’a ramenais dans ma chambre, la berçant doucement. J’observais ensuite Floyd. « Ce n’est pas parce que je bois du sang, que je n’en oublie pas mes responsabilités humaines. » J’avais fait ça pour ma fille justement. Bonnie restera humaine tant qu’elle le voudra. C’était la seule personne que je ne pouvais transformer contre son gré.

Avant de croiser ce monstre dans la rue, je n'étais même pas au courant de l'existence de cette espèce. Je n'étais qu'un pauvre ignorant revenu de la guerre des cauchemars pleins la tête. Aujourd'hui je suis un vampire coléreux et complètement perdu. Quoi que ... je l'étais déjà bien avant. N'ayant plus de repère depuis mon retour à la vie normale, cette transformation ne fait qu'aggraver mon cas. Je vais ainsi devoir gérer en plus mes nouvelles capacités, cette soif qui me brûle l'estomac et l'envie de meurtre envers Blaine. Que vais-je annoncer à Pink ? Comment va-t-elle le prendre ? Déjà qu'elle projetait de me jeter avant, mais dorénavant, je lui offre une raison supplémentaire de me larguer. De toute façon j'avais perdu son estime bien avant. Je n'osais plus la regarder dans les yeux, la toucher, lui parler. Nous n'étions plus un couple. J'étais plutôt son boulet. Mes pensées s'embrouillent. Je m'en fous de ces fichues menaces. Auparavant je serais resté muet. « Ne me donne pas d'ordre et si tu voulais m'achever, tu l'aurais fait au lieu de me transformer en sangsue ! ». Je me retiens de l'insulter en prime. Celle-ci s'éclipse alors quelques secondes avant de revenir avec son gosse. Pauvre gamine. J'en viendrais même à avoir pitié d'elle. Qui voudrait d'une mère vampire ? Elle peut lui arracher le cou dans un excès de colère. C'est de la folie et c'est insensé. Sauf que je peux comprendre. C'est sa gosse. Mais sur le moment, je m'en balance. Je m'en balance de cette gamine, de Blaine, de ce qui a bien pu la détruire. Je ne désire qu'une chose, boire. Et l'odeur de sang ne tarde pas à me chatouiller les papilles. Cette gosse, sa veine, ... . Mon visage se transforme sous l'envie de me jeter sur elle. Sauf que c'est immorale, mais je n'arrive pas à contrôler ce désir de sang humain. J'émets alors d'autres grognements mêlant colère et torture. Ainsi je force à ne pas bouger, à ne pas égorger cette gamine. « Enlève-là ! Il faut qu'elle dégage sinon .. je .. ». Un autre cri. Mais la soif est trop forte. Tel un prédateur, je me prépare à me jeter sur elle malgré qu'elle soit dans les bras de Blaine. C'est une torture et c'est incontrôlable.

Je savais que j’attisais la faim et la soif de sang de Floyd en amenant ma fille, qui était encore humaine. J’étais en train de la mettre en danger, mais cela faisait partie du « système » que j’étais en train de mettre en place. Floyd ne pouvait pas s’attaquer à un enfant, il le savait au fond de lui. Même moi, je n’en étais pas capable et pourtant j’avais tué pas mal d’humains depuis que j’étais devenue une créature immortelle. « Et te priver de l’immortalité ? Voyons réfléchis deux secondes Floyd. Tu ne crois pas que tu as besoin d’une seconde chance ? D’une seconde vie probablement meilleure ? » disais-je, en ajoutant une touche de sincérité. Floyd était une ancienne connaissance et je savais qu’il n’était pas vraiment lui-même. Il était marié, et ne faisait plus trop attention à son couple. Dommage d’avoir gâché une aussi belle vie à cause d’un métier qui lui coutait son existence. Je l’écoutais grogner et se retenir de foncer sur ma fille. Il savait ce qu’il lui attendait si jamais il osait toucher d’un seul croc ou d’un seul doigt ma seule raison de ne pas me donner la mort ultime. « Tu ne lui feras pas de mal. » disais-je, durement. Il n’était pas vraiment prêt à aller à la chasse aux humains. Je devais probablement lui donner un de ces bric de jus de plasma que je gardais précieusement dans mon frigo. C’était au moins un premier pas dans sa nouvelle vie. Après avoir calmé ma fille, j’utilsais à nouveau mon hypervitesse pour la mettre au lit mais aussi pour chercher cette boisson. Je revenais aussitôt dans ma chambre. « Tiens, bois ça. » disais-je, en lui tendant. Un emballage rouge, une paille. C’était clair comme l’eau pour Floyd. Il n’allait bientôt penser qu’à une seule chose : se nourrir et planter ses crocs dans une gorge. A ce moment-là, je pouvais l’amener chasser. Pour le moment, il fallait qu’il digère le fait qu’il n’était pas seulement mort. Il venait de commencer une nouvelle vie.

Tu te sens bouillir de l'intérieur. Pour ta gorge, c'est pire. C'est comme si on y collait un fer chaud dessus. La soif te rend dingue et t'obsède. La gamine que porte Blaine dans les bras, te donne terriblement envie. Tu sens son petit coeur battre, le sang couler dans ses veines. Mais tu ne peux pas, ce n'est pas toi. Tu as déjà tant tué que depuis, tu t'es promis de ne plus recommencer. La guerre t'a fait faire des choses horribles. Alors, même si tu es devenu un monstre, tu te promets de ne pas redevenir le barbare que tu étais en Afghanistan. Car exemplaire, tu l'étais. Meilleur de ta section, tu as même reçue une médaille en récompense de tes actions. Sauf que tu n'en es pas fier. Pour l'obtenir, tu as dû abattre des familles entières. Tu te raccroches donc à ces affreux souvenirs pour te retenir de vider la jeune enfant. En contre-partie, tu souffres. « Tu ne lui feras pas de mal. » . Tu ne comptes pas la toucher. Mais tu as besoin de te nourrir. « Tiens, bois ça. » . Dis-elle en te tendant une poche d'un jus étrange, qui pourtant à la même couleur que le sang. Tu fixes l'emballage, sceptique, tu hésites, mais comme si tu avais le choix. Finalement tu poses tes lèvres sur la paille et bois. Tu grimaces dégoûté, mais tu te forces tout de même à finir. Mais ce n'est pas parce que tu es rassasié, que ta colère et haine s'est désemplie. Tu ne comprends toujours pas le geste de Blaine, pourquoi a-t-elle fait ça ? Pourquoi est-elle si aigrie ? Tant de questions sans réponses. Mais avec tes sentiments amplifiés, tu ne peux les contenir. Utilisant la super vitesse dont tu es aujourd'hui doté, tu t'approches dangereusement d'elle. Tu sais que tu n'as aucune chance si tu te frottes à elle, sauf que tu n'en as pas envie. Tu te contentes de la prendre fermement par les bras, la fixer de tes yeux incompris et de lui balancer à la figure. « Pourquoi ? Qu'attends-tu de moi ? Tu voulais me donner une vie meilleure ? Foutaise ! Tu viens de me détruire un peu plus et ça, tu n'en as pas conscience. Où est passé la femme que j'ai connue il y a quelques années ? La femme douce, attentionnée, forte ? Regarde toi ! Tu es un monstre, un monstre et tu le fais subir à ta fille. Regarde l'exemple qu'elle a ? A qui elle voudra ressembler plus tard ? Quelle honte de lui offrir une telle image de ta personne alors que tu vaux bien mieux que ça ... ». Tel une avalanche de paroles, tu te rends compte de la leçon que tu lui donnes alors que tu ne vaux pas mieux. Honteux, tu baisses la tête.

Floyd allait me haïr pour le restant de sa vie de nouvel immortel. Enfin bien sûr qu’il allait mourir mais plus lentement que les humains normaux. Je ne comprenais pas pourquoi il ne comprenait pas que devenir un vampire, c’était presque comme une renaissance. Je n’avais pas la même perception que lui de cette vie vampirique. A l’inverse de Floyd, j’avais désiré cette nouvelle vie. Je désirais cette vie pour me venger des êtres humains d’avoir gâché la mienne. C’était donnant donnant. Ils me prenaient mon Dexter, je prenais le reste. J’allais les regarder souffrir. Les voir souffrir comme je m’étais retrouvée il y a quelques mois. N’étant plus que l’ombre de moi-même, me demandant ce que je faisais encore pour être en vie. Finalement, Floyd acceptait le jus de plasma sans broncher. Il faut dire qu’il n’avait pas le choix. Je n’étais pas plus brutale que certains vampires qui mettaient leurs progénitures immédiatement à la chasse. Peut-être que c’était le peu d’humanité qu’il me restait finalement. Je le regardais s’approcher de moi, utilisant son hyper vitesse. Je ne bougeais pas d’un centimètre, le laissant se défouler tant qu’il pouvait. Il pouvait me maudire, m’insulter de tous les noms… Rien ne me touchait en plein cœur. Je n’en avais plus. Mis à part cette humanité qu’il me restait, d’avoir laissé Floyd vivre sa nouvelle vie plutôt que de le laisser crever au bord de la route. Ça, c’était mon humanité. Je le repoussais gentiment, le regard sombre. J’allais lui expliquer le pourquoi du comment. Floyd était le premier à entendre cela depuis ma transformation. Seul mon créateur Dimitry était au courant. « La femme que tu as connue est morte… morte avec lui. » disais-je, d’une voix grave. Presque émue. Mon dieu, je me donnais presque envie de vomir de paraître encore aussi vulnérable qu’avant. Mon visage se durcissait par la douleur, et la peine que je ressentais encore. La peine que me provoquait le décès de Dexter ne semblait pas se refermer au contraire. Tous les êtres humains payaient pour sa mort. C’était une façon de le faire vivre encore à mes côtés. « La femme que tu as connue, Floyd, n’était qu’une petite merde innocente et vulnérable. » disais-je, en le regardant dans les yeux. « Bonnie, elle est la seule chose qui me restait. Je n’avais pas envie de la perdre, comme je l’ai perdu lui. » disais-je, sincèrement. « Je peux la protéger, maintenant. Je suis plus forte que tous ces enfoirés. Ils paieront tous. Tous autant qu’ils sont. » disais-je, le ton rempli de haine. « Et t’avoir transformé en vampire, ça c’est mon humanité. C’est la fille qui a pitié qui a parlé. Le monstre lui, te laisserait crever au bord d’une route te vidant de ton propre sang. » disais-je, en le repoussant doucement. Je sentais que je m’étais trop livrée cette fois-ci. Je me retournais, ravalant les larmes qui s’apprêtaient à me monter aux yeux. Je ne pensais pas être encore capable de pleurer, alors que j’étais depuis quelques mois, la créature la plus cruelle au monde.

J'avais cette sensation de ne pas mériter cette « seconde chance » comme le qualifiait Blaine. Pour elle, c'était une renaissance. Pour moi, une malédiction. Je ne me sentais pas digne de pouvoir vivre encore et éternellement. J'ai répandu tant de terreur et de sang, actes qui ont fait de moi l'être que j'étais, c'est-à dire une pauvre larve sans défense à ce blâmer et à s'en vouloir pour les crimes commis. La mort ultime aurait rendu justices à mes actions aussi atroce et horrible qu'elles soient. Et je me serais senti libérer d'un poids qui me pèse depuis mon retour en ville. Je vis avec le fardeau d'avoir ôté la vie à tant de personnes innocentes et à présent je vais devoir vivre avec celui-ci indéfiniment. Ce n'est donc pas une seconde vie qu'elle vient de m'offrir, mais un enfer perpétuel. Et histoire d'en rajouter davantage, elle a fait de moi un monstre buveur de sang et tueur. Tout ce que je déteste. Elle a peut-être perdue son âme et son humanité en se faisant transformer, mais pour ma part, les choses s'annoncent tout autrement. « La femme que tu as connue est morte... morte avec lui. » . Elle ne fait que confirmer mes pensées. Mais je grimace lorsque j'entends le « lui ». À qui fait-elle allusion ? Est-ce la cause d'un tel changement ? Je ne comprends pas et ce ne sont pas mes affaires. Même si au fond, cela m'intrigue. Car je perçois sur son visage une légère grimace, signe de contrariété, mais également de peine. Avant d'en arriver là, elle a dû vivre une épreuve difficile. « La femme que tu as connue, Floyd, n'était qu'une petite merde innocente et vulnérable. ». Au départ, je pensais la laisser s'exprimer sans l'interrompre, mais je ne peux m'empêcher de m'interposer et de la contredire. « J'ai connu cette femme et sache qu'elle était aux antipodes de la description que tu viens de me faire. Mais de ça, tu t'en fous. Car tu es devenue une femme forte, indestructible, immortelle ... » dis-je sous une pointe d'ironie. Je me moque, mais au fond je suis peiné de la retrouver après tant d'années dans un tel état, qui pour elle est tout à fait normal. Elle continue de parler et je me tais. Je la laisse faire son spitch et me montrer à quel point elle se sent bien aujourd'hui.« Et t'avoir transformé en vampire, ça c'est mon humanité. C'est la fille qui a pitié qui a parlé. Le monstre lui, te laisserait crever au bord d'une route te vidant de ton propre sang. » « Quel chanceux je suis dit donc ... » Encore de l'ironie. Le vampirisme me rend fin et drôle. « Je me moque, mais j'espère au fond ne pas devenir comme toi. Ne pas changer autant au point de ne pas me reconnaître, mais je suis personne pour te juger, donc je vais fermer ma gueule ... ».