« brouuuuuuu, brouuuu » Le bruit de ma vespa était une chose que j'appréciais particulièrement. Acquise il y a quelques semaines à peine, en pleine période de crise d'ailleurs, je vivais une histoire d'amour qu'on pourrait décrire comme passionnelle. Chaque matin en me levant, j'avais cette subite envie de la regarder, de la toucher. Je m'étais même mis à la dessiner sous toutes ses coutures. Certaines personnes auraient clairement pu me traiter de jeune fou, mais au fond de moi, je l'assumai totalement. Et puis bon, qui était au courant, franchement ? Excepté ma nymphomane de colocataire blonde qui devait subir les dessins éparpillés dans tout l'appartement. Mais elle, c'était plutôt easy de la soudoyer pour qu'elle se taise. Si vous voyez ce que je veux dire. -si ce n'est pas le cas, on s'en fou, c'est quelque chose de pas très catholique.- Aujourd'hui, après un travail acharné sur la plomberie de Madame Montaigne qui habitait à quelques kilomètres de Montsimpa, me voilà coincé dans les embouteillages de l'heure de pointe. Se faufiler parmi les voitures est chose facile quand nous sommes l'heureux propriétaire d'une vespa. Malheureusement, aujourd'hui, les voitures s'étaient mises d'accord pour boucher tout passage qui menait à notre chère ville. Bloquée dans les deux sens, la route était un piège à elle toute seule. Les coudes posés sur l'avant de mon scooter, j'avance au pas, comme la plupart des personnes autours de moi. Jusqu'à arriver aux côtés d'une brunette qui avance lentement. De dos, aucun signe n'aurait pu me faire comprendre que la jeune femme qui était tranquillement entrain de rentrer à pied chez elle -et me demandez pas pourquoi- était en fait Amaryllis. Un sourire étire mes lèvres alors que ma main vient se déposer sur son épaule. Je la regarde, dépose un court baiser sur sa joue et me retire pour la regarder. « salut toi ! » je lui fais un nouveau sourire avant de continuer. « qu'est-ce que tu fais là ? » puis j'ajoute. « tu veux monter ? Quoique, j'avance aussi vite que toi, ça servirait à rien » Je laisse échapper un rire et la regarde.

A la seconde même où mes lèvres s'étaient déposées sur la joue d'Amaryllis, j'avais regretté. Je connaissais la jeune femme depuis quelques temps maintenant, et je savais pertinemment que les gestes d'affections et tout ce qui allait avec la répugnait. De sorte qu'avec elle, je faisais de mon mieux pour garder au fond de moi ces petites marques de tendresses qui me caractérisait si bien. Une petite grimace me traverse et je décide de passer outre. D'un air enjoué, je lui propose de monter sur ma super vespa rouge, mais finis bien par me rendre compte que la vitesse à laquelle je suis, approche clairement de sa vitesse de marche. « Et puis la proximité qu'apporte ce genre d'engin … très peu pour moi. » Ah bah oui. Évidemment. Je laisse échapper un sourire et la regarde. « je sais que je me suis pas lavé depuis quelques semaines, mais ça devrait aller, je t'assure ! » un léger rire m'échappe alors que je lui donne un léger coup sur l'épaule, l'air de dire « je te taquine, voyons ! » Avec la brunette, j'ai cette perpétuelle peur de faire un geste qui la déplaise. Je ne suis pas quelqu'un de mal attentionné, au contraire, nombreux sont ceux qui me traitent de cœur d'artichaut mais avec elle, c'est différent. Je dois lui prouver mon affection d'une autre manière, par des paroles gentilles, par exemple. Je crois d'ailleurs que c'est ce qui lui plait le plus dans ma personnalité. Une chance pour moi qui suit souvent blâmé pour mon romantisme et ma gentillesse à la con. De nos jours, les filles aiment les bad boys, c'est bien connus. Moi je m'y fais pas et reste de la « ]vieille école » comme disent certains. Tout en la regardant, je laisse ce perpétuel sourire sur mes lèvres et lui demande. « bon, dis moi, pourquoi tu te retrouves à pied, sur la route la plus empruntée des alentours à une heure de pointe comme celle-ci ? » J'hausse un sourcil en sa direction.

Un léger rire m'échappe alors que j'écoute le plus sagement possible la petite brunette. De nos jours, qui peut bien faire encore parti d'une chorale ? Moi qui pensais que c'était tout simplement impossible, Amaryllis venait de me prouver le contraire. C'était sûrement une des choses que j'appréciais le plus chez la jeune femme. Elle était tout, sauf ordinaire. Et croyez moi, de nos jours, les hommes adorent ça. En tout cas moi. Une chose était pourtant sûre, elle n'avait carrément pas de chance. Tomber en panne à de telles kilomètres de Montsimpa était infernal et je le savais mieux que personne. Les vespas sont de beaux engins, personne ne peut dire le contraire. Mais j'étais tombé un nombre de fois incalculables en panne. Moi-même bricoleur, j'avais été incapable d'en trouver la raison. Enfin bref. « j'avais zappé que tu faisais parti d'une chorale ! Tu me pousseras la chansonnette un de ces quatre ? » Un énorme sourire me traverse alors que je laisse échapper un léger rire. Rire qui est rapidement coupé par des coups de klaxons incessants. Je laisse échapper une grimace et me tourne vers Ama'. Le trafic est désormais fluide et ma belle vespa rouge est désormais à la traîne. Et bien sûr il est hors de question que je laisse la jeune femme toute seul sur le bord de la route, ça jamais. Alors que je m'apprête à lui proposer une nouvelle fois de monter sur mon scooter, je suis coupé par une petite voix fluette qui m'annonce qu'elle est prête à monter. J'écarquille quelques minutes les yeux. Pour un honneur, c'est un honneur. Je m'y attendais carrément pas. Je m'arrête donc de marcher et laisse la jeune femme monter sur l'engin. Rapidement je met la vespa sur le pied pour aller chercher mon deuxième casque. Hors de question qu'elle monte sans avoir de casque, je le lui tend, un sourire aux lèvres et remonte sur le scooter. Je fais du mieux possible pour être le plus proche de l'extrémité de la selle pour éviter tout contacte avec la brunette. Avec le temps, j'ai bien vite découvert que mademoiselle et les contactes avec le sexe opposé étaient difficiles. En homme galant que j'étais, je n'allais pas l'obliger à se coller à moi, au contraire. Je fais démarrer les gaz et me tourne vers elle. « Prête ? » Je n'attend pas de réponse et commence tranquillement à rouler. Nous avons une bonne quinzaine de minutes avant d'arriver en ville. Je jette un coup d'œil à ma jauge d'essence et une grimace me traverse. La jolie petite aiguille est dans le rouge. Espérons qu'une station d'essence va se présenter à nous. Sinon, nous allons vite nous retrouver tous les deux à pieds.