Milieu des années 80’s, une femme pulpeuse et aguicheuse accosta au cours d’une soirée privée un homme de dix ans son aîné. Elle avait 19 ans, il en avait 29. Marié et un projet d’enfant en vue, l’homme au charme princier s’enticha de cette jeune étudiante le temps d’une nuit. Le souvenir de cet écart fut oublié et ramené au stade de secret tabou dès le week-end suivant. Il ne comptait pas dévoiler un jour à son épouse ce qu’il fit cette nuit là par pure lâcheté et amour-propre. Il avait de plus travaillé si dur tant d’années pour pouvoir s’offrir cette vie typiquement américaine et confortable qu’il ne souhaitait pas tout mettre en danger par soucis de sincérité. Malhonnête ? Oui, et qui ne l’est pas ? Il avait pris du bon temps car il pensait le méritait et comme le disait si bien le proverbe : « Pas vu, pas pris. »
Cependant, un mois plus tard, des appels répétés dérangèrent les nuits déjà agitées de Mrs Conrad. Enceinte de trois mois, le téléphone de la maison ne cessait de sonner dans les quatre coins de la maison alors que son époux était en voyage d’affaire à l’autre bout du pays. Étonnamment, l’interlocuteur raccrochait dès que la femme émettait un « Allô » exténuée par ces dérangements répétitifs. Au bout d’une semaine, les appels cessèrent et Mr Conrad rentra. Lorsque sa femme lui parla des appels, il ne sembla pas surpris mais plutôt fiévreux. Il avait reçu des appels à son bureau également et son collègue lui avait donné l’identité de la personne qui appelait. L’étudiante était enceinte. D’un mois, de lui. Lidiya, elle s’appelait Lidiya Polovnikova et était une jeune fille au pair qui devait retourner en Russie dans les deux mois qui suivirent. Elle ne demandait pas la reconnaissance du père bien qu’elle fut totalement paniquée et désemparée par la situation. Elle ne comptait pas briser le couple de son amant d’un soir. Tout ce qu’elle demandait, c’était de l’argent pour élever le gosse. Car oui, elle comptait le garder. Question de foi.
Mr Conrad, ayant la garantie que l’envoi régulier d’argent cèlerai à jamais leur secret, accepta à contre cœur. Ainsi, Lidiya Polovnikova repartit en Russie et accoucha du fils adultérin au cours d’une brûlante journée de printemps: le 17 mai 1985. Un magnifique bébé né d’une union sans amour mais élevé d’une affection sans égale de la part de sa mère et surtout de sa grand-mère. Nommé Tristan et Arthur d’après son grand-père décédé en début de cette même année, sa mère lui donna clandestinement le nom de famille de son père.
Tristan grandit donc dans la grande demeure que possédait sa grand-mère et tous les trois formèrent une famille distordue et peu commune mais soudée comme aucune autre. Un grand domaine faisant parti du patrimoine familial mais mal entretenu offrit à l’enfance du gamin un terrain d’exception. Pouvant y déverser toute l’énergie que pouvait posséder un môme de 7 ans et la frustration d’un manque d’une présence masculine dans sa vie, il passait le plus clair de son temps à s’y défouler avec ses petits amis et entreprit même de construire une cabane dans l’immense chêne qui se présentait derrière la maison. Peut-être parce que personne ne lui apprit à jouer au football que lui, il s’amusait à créer des vêtements aux poupées artisanales que lui glissaient entre les mains sa grand-mère. Ce fut également à cet âge qu’il entra dans l’école primaire du quartier. Avouons-le, avec son air gringalet, ses inaptitudes aux sports dis viriles et ses gestes maniérés, le jeune Tristan n’eut pas beaucoup d’amis masculins jusqu’à ses années lycéennes. Doué naturellement mais vite enflemmardi, l’adolescent réussit toutes ses années en figurant dans les dix premiers de la classe. Ce fut d’ailleurs durant cette période de sa vie qu’il vécut ses plus belles rencontres. En effet, étonnamment, son aspect élancé et ses airs de jeunes premiers lui permirent de séduire bien des jeunes demoiselles de son âge ou plus âgées. Tout juste âgé de 15 ans, il vécut un été passionnel et tumulteux avec une demoiselle venue passée ses vacances estivales en Russie, son pays d’origine. La fin de l’été venue, ils se séparèrent dans un commun accord, sans larme ni remords. Il s’était agit d’une phase qu’ils savaient tous les deux éphémères et ne valant que le titre d’ « amour d’été ».
A la veille de son entrée au lycée, sa grand-mère maternel décéda d’une suite d’une crise cardiaque au cours d’une nuit sans nuage de juin. Profondément affecté par cette perte soudaine d’un des êtres les plus proches de sa vie, Tristan traversa une douloureuse période qui dura plus d’un an. Mais ce fut surtout sa mère qui fut affligé. L’annonce du décès de sa vieille mère fut un véritable choc et bien que son fils avait toujours fortement besoin d’elle, elle se laissa tragiquement aller vers la dépression et la détresse. Une responsabilité cruciale pesa alors sur les épaules du jeune homme qui pour l’unique bien de sa mère prit la difficile décision de l’interner dans l’hôpital de santé le plus réputé du pays. Dès lors, Tristan projeté brutalement dans les réalités du monde adulte ressentit le besoin essentiel de retrouver la trace de son père. Ce ne fut pas une tâche difficile, sa mère gardant son numéro dans son tiroir, sous une petite photo de l’homme dont Tristan devait à présent connaître tous les détails tellement il l’avait regardé. Cet homme, il ne le connaissait qu’à titre indicatif : il l’appelait certes à chacun de ses anniversaires mais mis à part l’argent qu’il envoyait à sa mère, rien de plus ne lui parvenait. Il ne s’était jamais rencontré et d’ailleurs Tristan ne l’avait jamais proposé. Cet homme qu’il ne pensait pas un jour pouvoir appeler « papa », il ne l’aimait ni le détestait. Il avait comprit qu’il ne servait à rien d’attacher le moindre sentiment à une personne qui n’avait rien fait de plus que d’engrosser sa mère. Il l’appela alors mais tomba sur Mrs Conrad. Naïf mais surtout profondément désespéré, Tristan lui raconta tout. Dès lors, il ne sû exactement ce qu’il se passa de l’autre côté de l’Atlantique mais à chaque fois qu’il arrivait à avoir son père au téléphone, c’était une voix abrupte et un ton sec. En revanche, depuis la révélation de l’adultère, il apprit qu’il avait une demie-sœur. Ce fut l’unique personne de cette famille découverte qu’il pensait affectionner. La fille unique, la fille légitime. Elle avait un peu tout ce qu’il aurait aimé avoir. Un père et une mère aisés, aimants et toujours près d’elle. Il l’enviait mais ne la maudissait pas. Tous les mois depuis que le secret avait éclaté – soit à la suite de la détérioration de la santé de Lidiya, ils s’étaient appelés et discutaient des soirées entières. Plus le temps passait, plus un lien fraternel naissait entre eux grâce à deux simples appareils téléphoniques. Aussi peu concret et aberrant que pouvait sembler cette relation, elle se forgeait de plus en plus jusqu’à ce que Tristan accepta de qualifier sa frangine de « p’tite sœur » (à titre affectif).
Les évènements se précipitèrent dès lors que Lidiya Polovnikova, à bout de force et de nerfs abandonna sa vie et son fils par la même occasion. Perdu, choqué et accablé, Tristan ne vit son destin sauvé et évita à son tour une fin tragique que grâce à son père qui accepta pour la première fois de prendre toute l’ampleur de sa responsabilité en lui proposant d’intégrer le une école de renom a Los Angeles dans les plus brefs délais afin d’être rapproché de sa demi-sœur. Malgré les éclats de colère de sa femme et ses menaces de séparations, Tristan âgé de 16 ans et demi descendit à l’aéroport de Los Angeles, la mine déboussolé et l’âme déchirée d’avoir perdu sa mère et son pays. Il ne savait pas vraiment comment il allait pouvoir s'intégrer mais avec le temps, il y réussit. Lors d'un été, il rencontra une jeune femme avec qui le courant ne tarda pas à passer bien qu'elle n'avait que quinze ans à l'époque. La jeune fille était venue passer des vacances en famille bien que jamais Tristan ne l'avait apperçut avec ses parents. Se rapprochant petit à petit de la jeune femme, ils ne tardèrent pas à sortir ensembles mais pas une relation qui ne dure qu'un été puisque quand elle s'en alla, ils restèrent en contact bien que ce n'était plus comme avant. Ils avaient finalement rompus bien que Tristan eut quelque peu du mal à tourner la page. Il poursuivit ses études puis obtient son diplome et devint policier.
A présent âgé de vingt-six ans, il passait la majorité de son temps en compagnie de sa soeur mais c'était bien lassé de Los Angeles et recherchant le numéro de son ex-petite amie adorée, il la contacta afin de la prévenir qu'il viendrait à Montsimpa quelques temps et aimerait bien la retrouver ... Tristan aurait-il une petite idée derrière la tête ?