Siam est un coup de vent. Elle claque les portes, avant même qu'on ait le temps de les rattraper. Et elle s'en va en nous laissant con. Elle est là, elle n'est plus là. Partie, loin. On ne sait où d'ailleurs. C'est toujours comme ça que ça se passe avec elle. Et moi j'suis toujours celui qui reste. Comme là. Assis par terre, adossé à la porte d'entrée. Je guette le moindre bruit provenant du couloir, mais les pas ne s'arrêtent jamais de l'autre côté de la porte. Elle ne reviendra probablement pas. Peut-être que c'était la dernière dispute, le dernier coup de gueule. La dernière fois que j'voyais son visage d'ange. De toute façon, ses culottes ne sont même plus dans l'placard. Elles ont fini sur le trottoir après que je les aie balancées par la fenêtre. Et Siam aussi elle a fini sur le trottoir au bout du compte. Sur le trottoir à fouler la route en quête d'un nouveau refuge. Le truc, c'est qu'c'est elle mon refuge. Alors j'ai enfilé mes godasses et ma veste, et j'ai pris la route moi aussi. Je suis allé sur la tombe de son grand-père, mais elle n'y était pas. Je suis resté un peu quand même. Agenouillé dans la terre. Je lui ai demandé de m'aider à la retrouver, et de veiller sur elle tant que je ne pouvais pas le faire. Puis je suis reparti à sa recherche. En passant par le pont où je l'avais trouvée la première fois. Sauf qu'il n'y avait personne. Alors j'ai fini par y penser. Par me dire que peut-être, elle était chez lui.

Iason. Iason tête de con. Iason tu pues l'cochon. Iason trou du fion. Faut que j'aille chez cet abruti. J'ai pas le choix. Et si elle était chez lui ? Si elle m'avait abandonné pour le rejoindre lui ? J'en prendrais une belle dans la gueule. J'crois même que je l'assassinerais c'pauvre type. Enfin c'est p't'être lui qui m'assassinera. Qu'elle soit chez lui ou non d'ailleurs. Je marche à reculons pour aller chez Iason. Je marche à reculons, mais voilà que j'y suis quand même. Y'a son sale nom d'écrit sur la sonnette. Alors j'appuie dessus, le plus fort possible. Je l'écrase. Et voilà qu'il ouvre, le tatoué. On dirait un vieux tableau blanc sali par des gamins de trois ans. "Elle est là ?" Pas de salut, ni rien. Et pas la peine que je précise de qui je parle. Il le sait très bien. Je regarde par dessus son épaule, mais je ne vois personne. Et à première vue, je dirais qu'il n'y a aucune trace de son parfum dans l'air.