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C'était une fin de journée habituelle. Les patients arrivaient et sortaient des urgences comme du bétail. Comme eux, j'entrais dans le mémorial de la Rate Sacrée pour ma garde de nuit. J'étais venu jusqu'ici en moto, un petit plaisir que je m'accordais tous les jours pour me divertir avant de travailler d'arrache-pied pour soigner ces patients qui voulaient toujours que le service aille plus vite, qu'ils soient pris en charge encore plus rapidement et que leur maux se guérissent en un éclair. Je n'étais pas médecin et encore moins Dieu. Je n'étais que Cassandre Lefèvre, infirmier. Autrement dit, un pion parmi le personnel soignant du centre hospitalier. Cela ne signifiait pas que je détestais mon travail. Au contraire, il était maintenant toute ma vie. Je ne vivais que pour mes proches et mon job. J'en avais fini avec les déceptions amoureuses et je ne recherchais plus l'âme-sœur ou le prince charmant. Je m'arrêtais au simple plaisir de la chair, une fois ou deux. Aucune attache, aucun sentiment. Seulement du plaisir et rien d'autre. J'avais une nouvelle vie. Une vie que j'espérais bien meilleure que la précédente. J'avais connu quelques hommes et tous m'avaient déçu d'une quelconque manière. L'amour rendait faible et les trahisons perpétuelles me brisaient. J'avais un cœur meurtri mais la décision que j'avais prise venait renforcer ce dernier. Plus aucune souffrance ne m'atteindrait. Je serais maître de ma vie et des hommes qui côtoieront mon lit. Pourtant, un homme était venu et avait tout remis en cause. Thomas De Lagarde, un bourgeois français.

J'interpellais un soignant. « Le patient de la première chambre aurait besoin qu'on lui donne une couverture supplémentaire. Vous pourriez vous en occuper, s'il vous plaît ? » J'accompagnais ma demande d'un sourire. « Je ne sais pas ce qu'il se passe ce soir, mais j'ai l'impression que tous les alcooliques du coin se sont donnés rendez-vous aux urgences. » Lançais-je avec humour. La soignante ria avec moi et suivit ma demande. Je retournais alors à l'accueil où les autres alcooliques m'attendaient. Je soupirais, regardant tous les dossiers l'un après l'autre sans grande conviction. « Eh, John ! T'aurais pas un cas plus intéressant que ceux-là ? » Demandais-je en attrapant un chocolat que le réceptionniste gardait pour lui derrière son bureau. J'étais gourmand et alors ? Chacun avait droit à ses petits péchés. « Y'a un certain Ewan qui est arrivé depuis plus d'une heure et qui te cherche. » Je tournais mon visage vers la salle d'attente et apercevais mon meilleur ami. Que faisait-il ici ? Que lui arrivait-il ? Pourquoi était-il aux urgences ? J'attrapais rapidement son dossier et filais dans sa direction. « Ok, je m'en charge. » Je me retrouvais rapidement face à lui et, d'un air presque sérieux, je le regardais en fronçant les sourcils. « Qu'est-ce que t'as encore fait pour arriver dans cet état-là ? » Lui demandais-je. « Bon allez, suis-moi. Je vais soigner tout ça et tu vas devoir tout m'expliquer en même temps. » Je l'emmenais plus loin et l'installer sur un lit avant de prendre le matériel nécessaire. « Je t'écoute... Dis-moi tout. »

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« Au fait ewan…j’me suis toujours posé la question, ta femme n’a pas honte de se taper une pédale ? » Les paroles aux assonances quasiment sadiques suivies des rires amusés de ton ami ne te vinrent aux oreilles que quelques minutes après, encore engourdi par l'effet de l'alcool qui circulait dans tes veines. Puis ce fut le silence, un silence complet, gêné… Sans même avoir à lever les yeux, tu sentis plusieurs regards interrogateurs se poser sur toi, les regards si familiers de ta bande de potes présents ce soir-là dans ce bar miteux. Depuis de nombreuses années c'était une question qui avait brûlé les lèvres de plusieurs de tes potes mais que personne n'avait osé poser, tout du moins personne à l'exception de Terrence, tellement défoncé que tu doutais qu’il comprenait l’enjeu de sa question. Il avait bien raison après tout non ?... A quoi bon faire preuve de tact s’il avait raison ? À quoi bon faire semblant ? Malgré tout, tu ne bougeas pas, assistant au spectacle dans un mutisme le plus total, la douleur dans ta poitrine ne cessant d’augmenter de seconde en seconde tandis qu’elle se battait toujours mentalement pour ne rien laisser paraître malgré ton regard de plus en plus brillant de rage et de douleur. Honteux de te laisser aller de la sorte tu fermas brusquement les yeux, de lugubres images défilant à vive allure dans ton esprit torturé face aux paroles indiscrètes de ton pote. Tes paupières se rouvrirent, découvrant ton regard chocolat dont le dédain habituel qui les caractérisait semblait sur le point de se briser. Posant ton regard noir de haine sur le visage de ton vis-à-vis, tu le fixas quelques secondes, chassant tes souvenirs d'un clignement de paupières. « Bordel. Quel con ! ». Malgré le fait qu’il ne s’agissait que de murmures, étant donné le calme – hormis les grincements sinistres des chaises – ces quelques mots avaient fait leur chemin jusqu'à tes oreilles et tu sorti brutalement de ton mutisme serrant tes poings si fort que tes ongles s’enfoncèrent dans tes paumes, éveillant une douleur vive aux creux de tes mains.

Énervé contre celui que tu avais considéré comme l’un de tes ami, tu portas à nouveau la bouteille de whisky à ta bouche, pressant le goulot entre tes lèvres sèches et t'enfilas presque la moitié de la bouteille cul sec. Sentant la douce liqueur couler dans ta gorge tu esquissas un sourire satisfait. A nouveau maitre de toi-même tu optas toi aussi pour la vulgarité. « Et toi, ta mère n’a pas honte d’avoir mis un enculé dans ton genre au monde ? » Ta voix ne trembla pas lorsque ces paroles fendirent l'air, sèches, que tu déclamas sans la moindre hésitation... Tu percevais nettement le changement d’atmosphère soudain .Souriant d'une façon sadique tu jetas un regard à l'assemblée comme si tu défiais le monde entier. Tu se sentais fort, supérieur. Rien ne pouvait te toucher. Le temps semblait s’être arrêté, alors que vous vous faisiez face, encore une fois, comme depuis le début de leur rencontre. Il soutient ton regard quelques instants. Bleu contre vert. Combat silencieux. Tu sentis ta lèvre éclater au moment même où le poing l’atteignit. Le goût métallique du sang envahissait ta bouche et tu te sentis un moment étourdi. Tu pris appui sur le mur en pierre se trouvant juste derrière toi et regarda ton adversaire tenter un autre crochet du droit. Le choc fut de nouveau brutal et il sentit cette fois que son arcade avait émis un léger craquement. Il oscilla et regarda troublé ce qui se déroulait sous yeux. Laissant de côté la promesse que tu avais faite au videur avant d’entrer dans la boite, tu décrochas un coup de poing à ton agresseur, l’envoyant directement au sol.

T’abaissant à son niveau tu agrippas sa gorge, la serrant douloureusement entre tes doigts. Rapprochant son oreille de ta bouche tu murmuras un rapide message en estonien : Ne me manque plus jamais de respect ! Les yeux écarquillés de terreur Terrence hocha brutalement la tête, grimaçant quand sa nuque douloureuse craqua. Tapant doucement sa joue comme tu l’aurais fait avec ton chiot Alecto, tu le relâchas violemment au sol, un sourire sadique étira ses lèvres quand le bruit mat de sa tête claqua contre le parquet de la boite s’éprit de tes oreilles. Passant à côté du reste de ta bande tu lâchas un rapide : J’vous laisse vous occupez de lui… avant de quitter les lieux. Pendant quelques secondes un soupçon de remord te prit a la gorge, et tu frappas a coup de poing le mur le plus proche, grimaçant quand plusieurs de tes os craquèrent et qu’un liquide poisseux roula le long de tes doigts. Reprenant rapidement ta marche tu savais parfaitement où tu allais. Après une petite quinzaine de minute de marche, l’enceinte blanche de l’hôpital s’afficha enfin devant tes yeux rougis par le sang qui coulait le long de ton arcade, maculant lentement ta tempe déjà trempée de sueur. Déplaçant lentement les portes automatiques de l’hosto’, une moue dégoutée étira ton faciès quand l’odeur caractéristique à ce type d’endroit envahit tes narines. Envoyant littéralement chier le réceptionniste qui tentais de t’aider, tu prononças seulement une phrase : J’veux voir Cassandre Lefèvre …Après de deux heures d’attente interminable, tu l’aperçus enfin…Passant rapidement ta langue sur tes lèvres sèches, tu grimaças quand elle toucha douloureusement l’entaille qui parcourait ta lèvre inférieure. « J’me suis défendu… » Juste ? Mouai tu l’avais explosé avec pour seul raison l’alcool qui stagnais dans ton sang…Relevant tes fesses du fauteuil que tu occupais depuis plusieurs minutes tu le suivis alors qu’il t’accompagnait dans l’une des chambres de l’hôpital. Une fois arrivée tu te posas sur le lit, attendant qu’il finisse de préparer le matériel nécessaire pour te recoudre et te soigner. « On m’a insulté j’me suis juste défendu, fin de l’histoire ! »

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Recevoir Ewan, ici, à l'hôpital était tout de même assez surprenant. Nous nous connaissions depuis des années, depuis que nous étions des gamins. Le voir au mémorial et le soigner n'était pas une première mais c'était belle et bien la première fois que je le croisais aux urgences dans cet état-là. Je l'observais, tout d'abord surpris, puis j'exprimais mon avis, sans qu'il ne me le demande. Ma grande curiosité provoquait chez moi cette envie irrémédiable de connaître les faits de toute cette histoire. Qui lui était-il arrivé ? Qu'avait-il fait pour en arriver là ? Qui lui avait démonté la mâchoire et qui avait-il frappé ? Je voulais tout savoir. J'avais besoin de tout savoir que se soit pour ses soins et son bien-être ou que se soit pour ma curiosité maladive. Le jeune Valentyne me connaissait et savait très bien que je ne pourrais m'empêcher de le questionner à ce sujet. « J’me suis défendu… » Je restais légèrement sur ma fin. Ok, il s'était défendu mais je désirais connaître tous les détails. Premièrement, parce que j'étais son meilleur ami. Deuxièmement, parce qu'il n'avait pas d'autres choix et, pour terminer, parce que j'étais en droit de connaître la vérité malgré son incroyable silence sur le sujet.

Je le conduisais alors jusqu'à un lit où je pourrais alors le prendre en charge, le soigner et surtout recoudre sa main. Après un tel combat, je me doutais qu'il n'y avait pas été doucement. Vu les dégâts, je n'avais d'autres choix que de prendre une aiguille et un fil pour lui venir en aide. Il m'avait demandé, j'agissais alors en conséquence de ces actes. Il souffrirait peut-être. Peut-être pas. En attendant, je n'aimais pas le voir dans cet état. Je posais mes yeux sur lui après avoir attrapé tout le matériel nécessaire. « On m’a insulté j’me suis juste défendu, fin de l’histoire ! » Je ne disais rien, restant de marbre même si l'envie de l'interroger était grande. Cependant, je n'étais pas actuellement son meilleur ami - même s'il m'avait demandé - je n'étais que l'infirmier le prenant en charge. Soupirant, j'attrapais une lingette pour nettoyer sa blessure. Ne lui laissant aucune chance de reprendre la parole ou même de le prévenir des picotements douloureux que j'allais lui procurer, je déposais la lingette sur sa main, nettoyant le sang et le reste pour le recoudre. S'il grimaçait, tant pis. S'il hurlait, je m'en contrefichais. Ewan était entre mes mains et tant qu'il ne me raconterait pas toute l'histoire, je continuerais. « Tu me racontes tout ou je continue ? » Lui demandais-je avec un fin sourire au coin des lèvres. « Tu croyais vraiment pouvoir t'en sortir aussi facilement ? »

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« Tu me racontes tout ou je continue ? » Incertain, tu lui jetas un regard interrogateur alors que t’étais certain qu’il ne te lâcherait pas aussi facilement ! Vous vous connaissiez depuis gosse alors que tu le connaissais assez pour affirmer qu’il était d’une curiosité maladie donc c’était sûr et certain qu’il te laisserait pas te défiler ainsi… Mais après tout pourquoi tu ne lui dirais pas ? C’était bel et bien ton meilleur ami non ?! Perdu dans tes pensées tu ne t’aperçus pas qu’il approchait une compresse imbibé d’un liquide incolore de tes blessures pour les nettoyer. « AIE» Ton hurlement de douleur se répercute entre les quatre murs de la pièce alors qu’il te sourit, hilare. Cet enfoiré était prêt à te torturer pour savoir ce qui c’était passé cette nuit et pire encore il trouvait ça drôle ! Grimaçant, tu lui crachas un bref « mais tu es crétin ou quoi ?! Ça fait mal enfoiré » avant de détourner la tête, dardant tes yeux vert bouteille sur l’aiguille et le fils qu’il venait de préparer. Nom d’un chien en espérant qu’il n’est pas la mauvaise idée de te recoure a vif pare que t’avais déjà assez mal comme ça…La douleur qui remontait le long de ton bras était vraiment intense et pendant quelques secondes tu te maudis toi-même. Quel idée de perdre son calme pour un idiot pareil et surtout quelle idée de frapper à coup de poing dans un mur de brique !

Un soupire las s’échappa d’entre tes lèvres alors que tu relevas doucement les yeux pour le plonger dans les siens, inquiet. T’aurai du le parié, il s’inquiétait vraiment pour toi ! Mais il fallait l’avouer, c’était la première fois que tu arrivais aux urgences dans cet état, les autre fois c’étaient pour ta fille ou encore une ou de fois pour ton épouse Amélia. « Tu croyais vraiment pouvoir t'en sortir aussi facilement ? » Un rire joyeux explosa dans ta gorge alors qu’il finit sa phrase. « Non mais au moins j’aurais essayé non ? » Un sourire amusé peint aux coins des lèvres tu soupiras avant de lui expliquer la cause de ton état. Après il avait le droit de savoir ! C’était ton meilleur ami et tu savais que tu pouvais lui faire confiance ! « Je te résume l’histoire…J’étais tranquillement en train de discuter et de boire avec quelques amis, quand cet enculé de Terrence m’a lancé une pique un peu trop personnel pour que je laisse passer et j’en suis venu aux mains…j’ai perdu mon calme quoi ! Ça te va ?» Un soupire t’échappa pour la forme alors que tu terminas ton petit discours, lâché d’une voix dolente de douleur. « Et toi alors tu as eu des cas intéressant ce soir ? » Ton sourire le plus innocent scotché aux lèvres, t’essayas de l’amadouer. Non tu n’essayais pas de détourner le sujet de la conversation, tu n’oserais pas et puis ce n’était vraiment pas ton genre !